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Ces petits réacteurs sont l'avenir du nucléaire: voici les "SMR"

Bruxelles accueille ce jeudi le premier Sommet global sur l'énergie nucléaire. Une cinquantaine d’états y participeront. En Belgique, près de 50% de l’électricité que nous produisons provient des centrales nucléaires. Quel est l'avenir du nucléaire?

Comment produira-t-on de l’électricité à l’avenir ? Après avoir annoncé la fermeture puis la prolongation de certaines centrales atomiques, le gouvernement fédéral investit dans la recherche sur les petits réacteurs modulaires. Une technologie nucléaire présentée comme celle du futur. A Mol, le centre d’étude nucléaire développe un modèle de démonstration avec quatre partenaires internationaux. Une expérience unique au monde qui permet de mieux utiliser les ressources en uranium et même de recycler d’anciens déchets nucléaires. 

Une équipe de RTL info a pu exceptionnellement pénétrer dans le centre de recherche nucléaire de Mol. La visite commence dans le hall technologie. "Ce que vous voyez ici, ce sont des installations. Certaines sont déjà là depuis une dizaine d’années", explique Marc Schyns, responsable du projet SMR – small modular reactor, petit réacteur modulaire en français.

Depuis des années, les scientifiques qui travaillent ici sont reconnus dans le monde pour leur maitrise du plomb dans des applications nucléaires. Un métal qui se trouve ici sous toutes ses formes. "Ici, c’est du plomb qui est liquide. Cela ressemble, comme pour beaucoup de métaux liquides, à un miroir", montre-t-il.

L’idée de Marc Schyns et ses collègues : utiliser ce plomb liquide dans le cœur du réacteur développé ici, en lieu et place de l’eau utilisée dans une centrale classique. On appelle cette technologie un réacteur à neutrons rapide. 

Voici quelques explications pour éclaircir la situation. Le combustible d’une centrale nucléaire c’est de l’uranium. Un métal composé de plusieurs types d’atomes : l’uranium 238 et l’uranium 235. Dans 100 kilos d’uranium, on retrouve plus de 99 kg d’uranium 238 et à peine 700 grammes d’uranium 235. Aujourd’hui, une centrale classique à refroidissement à eau fonctionne uniquement avec de l’uranium 235. Mais ce n’est pas le cas du réacteur du futur développé ici.

Utiliser beaucoup mieux les ressources disponibles

"Grâce à la technologie aux neutrons rapides, il devient possible d’utiliser beaucoup plus d’uranium finalement qui est disponible sur la terre et donc d’utiliser beaucoup mieux les ressources disponibles", indique Marc Schyns.

L’utilisation plus efficace des ressources, c’est le point fort de cette technologie selon Thomas Pardoen, professeur à l’Ecole Polytechnique de Louvain. "Si on arrive à la déployer industriellement, on va avoir notre ressource en combustible nucléaire qui va passer de 100-150 ans pour l’uranium à une ressource qui va pouvoir durer 4.000-5.000 ans. Et ça, cela nous donne le temps évidemment de réfléchir à d’autres technologies bien à l’aise", révèle-t-il. 

Cerise sur le gâteau, le réacteur développé à Mol pourrait même recycler d’anciens déchets nucléaires. "Naturellement, cela demande un peu de préparation comme on dit. Mais non seulement on va mieux utiliser les ressources, mais nous allons pouvoir aussi recycler des déchets nucléaires existants", se réjouit Marc Schyns. 

Dernier avantage de la technologie développée ici à Mol. La réaction produit beaucoup moins de déchets hautement radioactifs. Les scientifiques du centre de recherche espèrent avoir construit un premier réacteur de démonstration d’ici 2035. 

En Belgique, près de 50% de l’électricité que nous produisons provient des centrales nucléaires. Une situation appelée à changer : à l’horizon 2050, à priori, les derniers réacteurs Doel 4 et Tihange 3 auront fermé. Pareil pour les centrales au gaz, qui émettent du CO2.

Les énergies renouvelables sont donc appelées à prendre de plus en plus de parts dans ce gâteau énergétique. Problème : on sait déjà, aujourd’hui que ce ne sera pas suffisant. Dans ce centre de recherche, on pense avoir trouvé une partie de la solution. 

Marc Schyns, responsable du projet et ses collègues, développent un SMR. Il sera plus petit et produira moins d’énergie que les centrales nucléaires classiques : 300 MW maximum contre 1000 MW pour son grand frère. En revanche, il pourra être produit en série et installé en de nombreux exemplaires partout en Belgique. 

"L'idée est de diminuer les coûts et d'arriver à u, prix d'électricité comparable, voire même inférieur à celui des grandes centrales", explique Marc Schyns. Le réacteur "made in Belgium" fonctionnera au plomb liquide. Une technologie qui pourrait lui permettre de produire bien plus que de l’électricité. 

L'alternative : le plomb

"Du fait que nous allons pouvoir aller à des températures plus élevées grâce au plomb, nous pourrons utiliser la chaleur à d'autres fins que la production d'électricité, comme la production d'hydrogène", explique-t-il.

Une flexibilité utile, en complément des énergies renouvelables. Chez nous le vent n’a pas toujours la même intensité : les éoliennes ne tournent donc pas constamment. Pareil pour l’énergie solaire : un panneau photovoltaïque ne produit plus d’électricité lorsqu’il y a beaucoup de nuages ou la nuit.

Un parc de SMR pourrait prendre le relais lorsque la production renouvelable est faible, par exemple en hiver et fournir de l’hydrogène ou de la chaleur à l’industrie à d’autres moments de l’année.  

"On va d'abord réserver l'utilisation des SMR à des besoins spécifique où nous avons des grands besoins d'électricité pour des grosses entreprises par exemple, là ce sera très efficace", explique Thomas Pardoen, professeur à l'École Polytechnique de l'UCLouvain. En Belgique, la loi interdit la construction d’une nouvelle centrale nucléaire. Dans le même temps, le gouvernement investit 100 millions d’euros pour développer les petits réacteurs.

À Mol, un consortium international a été mis sur pied pour commercialiser cette technologie. Alors question, la législation doit-elle changer ? "Pour le développement, le cadre législatif belge suffit, mais pour le déploiement, il faudra une adaptation", explique Marc Schyns.

Une version de démonstration du SMR au plomb liquide de Mol devrait être prête vers 2035. Les scientifiques espèrent lancer la production commerciale à partir de 2040

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  • La solution pour nos problèmes d'électricité est évidente et la moins chère.On obroge la loi de 2O03.On remet en route les deux réacteurs arrètés et on continue pour 20ans avec tous les réacteurs,on récupère ainsi les milliards donnés à Engie pour le démentellement des centrales.

    Louis Neys
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