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Signé Giltay: Gaza-Kippour, mêmes erreurs, même combat?

Depuis l'attaque du Hamas contre Israël, la comparaison s'est imposée à tous ceux qui ont connu cette époque : "Ça ressemble la guerre de Kippour en 1973". Pourtant, ce n'est pas si simple et le conflit qui a débuté le 7 octobre est d'une toute autre nature.     

Le 6 octobre 1973, l’Egypte et la Syrie ont attaqué massivement l’Etat hébreux, complètement pris par surprise. Pendant quelques heures, on a pu croire qu’Israël allait disparaitre, tant son armée paraissait dépassée.  Il a fallu 48 heures à Tsahal pour redresser la situation, arrêter les assaillants et mener avec son aviation et ses chars une importante contre-offensive en territoire ennemi. La guerre pris fin le 25 octobre 1973. La solution fut politique et aboutit aux accords de camp David cinq ans plus tard entre Israël et l’Egypte.

Deux éléments imposent presque évidemment la comparaison avec le conflit actuel. La coïncidence de date, 50 ans et un jour après l’assaut de 1973, et l’effet de surprise, qui a assommé Israël un jour de fête. On pourrait ajouter la répétition d’une trop grande confiance de la part des israéliens, persuadés que la puissance de leur armée dissuaderait toute agression, malgré les avertissements. En effet on a appris mi-octobre que l’Egypte avait averti le gouvernement israélien, plus d’une semaine avant l’attaque, de la possibilité d’un raid du Hamas.

De même en 1973, un agent double égyptien, proche du président Sadate, avait communiqué la date de l'assaut égyptien mais les services israéliens avaient tardé à faire remonter cette information à la Première ministre Golda Meir. A l’époque, la présence au gouvernement comme ministre de la Défense de Moshé Dayan, considéré comme le vainqueur de la guerre des Six Jours, avait fait naître un excès de confiance dans la société israélienne. 

De même ces derniers mois le gouvernement Netanyahou s’était persuadé que le Hamas était tombé dans une sorte de léthargie. Au point de dégarnir la frontière de la bande de Gaza, pour redéployer l’armée en Cisjordanie, où les troubles se multipliaient.

Une guerre classique et une guerre asymétrique

Pour le reste, les différences sont nombreuses. En 1973 Israël affrontait deux armées régulières. Une guerre classique. Ces deux armées, hormis la destruction improbable d’Israël, avaient des objectifs stratégiques clairs. Pour l’Egypte récupérer le Sinaï perdu lors de la guerre des Six Jours , et pour la Syrie le plateau du Golan. Et même si cette guerre a fait de nombreux morts israéliens, plusieurs milliers, c’étaient essentiellement des militaires (de l’ordre de 7000). Cette fois, dans les deux camps, les victimes sont avant tout civiles, le but du Hamas n’était pas de conquérir des territoires, mais de terrifier Israël et le monde en commettant les mêmes crimes horribles que Daesh. Pour le Hamas il n’est pas question de négocier avec Israël un quelconque accord de paix, son objectif est de détruire l’Etat d’Israël et de rejeter les Hébreux à la mer.  

Quant à Benjamin Netanyahou, il a dit et répété que son objectif était de neutraliser définitivement le Hamas pour assurer la sécurité d’Israël. Contrairement à la guerre du Kippour, il n’y aura pas d’issue diplomatique. Quant à la solution à deux Etats, prônée par l'ONU depuis 1947 et qui était l'objectif final des accords d'Oslo, elle semble plus que jamais hypothétique. Joe Biden et les Européens répètent qu'il n'y a pas d'autre issue, mais Benjamin Netanyahou l'a récemment exclue définitivement. 

A qui la faute ? 

Chaque chose en son temps, mais tôt ou tard viendra l’heure des explications devant l’opinion publique Israélienne. Benjamin Netanyahou, a voulu l’anticiper le 29 octobre en se dédouanant de toute responsabilité dans l’impréparation d’Israël face au Hamas.  

Dans un tweet publié ce jour-là à une heure et demie du matin, il a affirmé sur X, l’ancien Twitter, que toute la responsabilité de l’impréparation reposait sur  les renseignements militaires et le Shin Beth, le renseignement intérieur. Moins d’une heure plus tard, Benny Gantz l’un de ses principaux adversaires politiques, ancien ministre de la Défense, et actuellement membre du gouvernent d’union nationale, a demandé que le premier ministre retire ce message. Un autre de ses rivaux, Yaïr Lapid, éphémère Premier ministre en 2022, affirmait  pour sa part avoir reçu en tant que chef de l’opposition, des informations du Mossad sur les intentions du Hamas dès le mois de septembre ! Bien sûr les services eux-mêmes se sont gardés de toutes réactions en vertu de leur devoir de réserve mais Netanyahou a senti le vent du boulet. Dans la nuit, il a effacé son message déclarant : "Ces choses n’auraient pas dû être dites." 

Le lendemain, la presse ne l’a pas épargné. L’un des principaux quotidien titrant à sa une : "Netanyahou déclare la guerre à l’Etat d’Israël". Sans oublier les familles des otages qui quotidiennement lui ont réclamé des comptes, sans obtenir autre chose que des réponses de principe. A tel point que les binationaux, par exemple les Franco-Israéliens ou les Américano- Israéliens, se sont tournés vers leur autre pays pour obtenir des soutiens. La cérémonie d'hommage organisée à Paris le 7 février en fut l'un des moments le plus symboliques. 

Bibi, c’est fini? 

Le Premier ministre israélien continue de refuser toute idée de cessez-le- feu. Il est prêt à poursuivre la guerre indéfiniment avec le secret espoir de voir Donald Trump récupérer la Maison Blanche. En clair il s'accroche au pouvoir. Mais un jour il devra rendre des comptes, probablement devant une commission parlementaire, elles sont en Israël très intrusives et impitoyables. C’est une démocratie à l’américaine, il ne s’en sortira pas avec quelques formules à l’emporte-pièce. Par ailleurs il n’est pas exclu que la justice s’en mêle, si jamais des familles de victimes se portaient parties civiles.

Il est fini ! C’est le commentaire que font la plupart des observateurs de la politique israélienne.  Et ce quel que soit le résultat d l’opération menée contre le Hamas, l’impréparation du 7 octobre et cette déclarions sur Tweeter pour s’en laver les mains ne lui seront pas pardonnés. En 1973, après la guerre du Kippour, la Première ministre Golda Meir, sévèrement auditionnée par la Knesset, avait dû démissionner. Malgré la victoire ! 

Et elle était d’une autre trempe…  

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