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4 généralistes quittent la maison médicale de Libin, Christelle est dépitée: "C'est difficile de vivre dans des petits villages"

Christelle habite Libin, dans le sud du pays. Elle nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous pour raconter la situation difficile dans laquelle se trouve sa commune et surtout, les habitants, après le départ de plusieurs médecins généralistes. Le nombre, trop peu élevé, de généralistes est un problème dans la province de Luxembourg, mais pas seulement. Plusieurs mesures sont prises pour améliorer la situation.

"Il y a un phénomène de crise pour trouver un médecin dans la région." C'est le constat dressé par Christelle, qui habite Libin, en province de Luxembourg. Selon les chiffres de l'AViQ (agence wallonne pour une vie de qualité), c'est un fait, cette partie de la Belgique est particulièrement touchée par la pénurie de médecins généralistes. Christelle en a déjà fait les frais quand elle a déménagé de Verviers pour s'installer à Libin. Elle raconte: "Il a fallu que je cherche un nouveau médecin, j'ai dû téléphoner à sept, huit endroits parce qu'il y a plusieurs médecins qui ne prennent pas de nouveaux patients." Et même quand on en a un, il est compliqué de le voir rapidement: "Il faut parfois attendre 48 à 72 heures pour avoir rendez-vous."

C'est finalement à la maison médicale de la commune que la Libinoise a trouvé un nouveau praticien. Pas de bol, il s'en va. Quatre généralistes quittent la maison médicale cette année: "On a été averti par un toutes-boîtes", se souvient Christelle. Seulement voilà, pour quatre départs, il y a… une seule arrivée. Le tout à mi-temps. Elle va donc devoir "retrouver un docteur". Pour les soins qui ne sont pas urgents, elle et son mari ont carrément décidé de retourner à Verviers chez le généraliste où ils allaient avant de déménager. Ils feraient donc… plus de 100 kilomètres. "C'est pénible. C'est difficile de vivre dans des petits villages pour les soins de santé", avance Christelle dépitée.

De son côté, Anne Laffut, la bourgmestre de la commune compte tout faire pour "maintenir la maison médicale": "On a suspendu le loyer pour qu'ils puissent sortir la tête de l'eau." Pour inciter les jeunes médecins à s'installer là, l'administration de Libin a aussi mis un studio à disposition. Reste à voir si cela suffira, la bourgmestre, elle, y croit: "On a été gâté et maintenant, c'est un peu plus compliqué mais on y arrivera."

Pas seulement au Luxembourg

Toujours selon les chiffres de l'AViQ, la problématique relative à la pénurie de médecins généralistes touche aussi d'autres communes wallonnes. Au Luxembourg majoritairement, mais aussi dans la botte du Hainaut et au sud de la province de Namur. Vous pouvez consulter la carte complète qui reprend toutes les communes en pénurie ici.

Nous avons interpellé Paul De Munck, le président du groupement belge des omnipraticiens (GBO) sur la question. Il affirme que la situation évolue. Il explique qu'il y a une commission de planification qui travaille sur les sous-quota, soit un nombre minimum d'étudiants qui se dirigent vers la médecine généraliste. "Il faut minimum 50% de généralistes formés", dit-il. Précisons que c'est le Fédéral qui fixe le nombre de numéros Inami mais c'est la Fédération Wallonie-Bruxelles qui décrète la répartition entre généralistes et spécialistes.

50%, c'est bien, mais "il faudra attendre 2041 avant de voir les effets", prévient Paul De Munck. Il estime aussi qu'il en faudrait même plus: "On ne sait pas ce qu'il va se passer sur une dizaine d'années, il y aura encore des incertitudes, il faut prévoir plus."

Deux médecins pour remplacer un retraité

La pénurie s'explique aussi par "un arrêt prématuré de la pratique". Les mentalités évoluent et l'époque où les médecins de famille travaillaient 70 heures par semaine est révolue. "Les généralistes à venir cherchent un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée", souligne le président du GBO. Il continue: "C'est bien d'avoir plus de formés, encore faut-il créer des conditions de travail qui puissent les retenir." À l'heure actuelle, on estime que pour un généraliste qui part en pension, il en faut deux ou trois pour combler le vide.

Enfin, vient la question de la répartition sur le territoire. "Il n'y a pas de planification d'installation", précise Paul De Munck. En d'autres termes, ce n'est pas parce qu'il y a un manque sérieux de médecins à Froidchapelle, par exemple, qu'un jeune diplômé va être sommé de s'installer là. "Ce n'est pas évident de dire spontanément qu'on va s'installer ailleurs, on a peur de devoir assumer une lourde garde et si le médecin a des avantages, encore faut-il que le compagnon ou la compagne puisse trouver un job dans la même région", dit Paul De Munck.

Pour inciter les généralistes à s'installer dans les communes en pénurie, certaines, comme à Libin, mettent des logements à disposition ou d'autres avantages. Dans la même idée, la Wallonie octroie des aides "Impulseo" aux médecins qui s'installent dans ces zones. Ainsi, ils touchent 20.000 ou 25.000 euros (en fonction de la faible ou très faible densité de médecins généralistes) pour une première installation.

Le chemin est encore long mais les choses évoluent. Quant à Christelle, elle doit espérer que la maison médicale puisse trouver de nouveaux praticiens pour remplacer ceux qui sont partis.

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