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"Ça me choque": face à un cas de maltraitance animale, Michaël ne peut rien faire... sans l'identité des propriétaires du chien

Depuis les fenêtres de sa colocation, Michaël constate ce qu’il pense être de la maltraitance animale. Le chien de ses voisins se trouve jour et nuit dehors dans une petite cour, complètement délaissé. L’étudiant souhaitait donc signaler la situation. Mais sans les nom et prénom du propriétaire de l’animal, impossible de déposer plainte. Grâce à notre reportage, le directeur de l’Unité du Bien-Être animal du SPW découvre le problème. Quelles sont alors les démarches à effectuer ?

"Depuis les fenêtres de ma colocation, on peut voir un berger allemand qui, j’estime, être délaissé et maltraité", nous écrit Michaël via le bouton orange Alertez-nous. Cet étudiant nous a contactés dans l’espoir de faire bouger les choses : il constate depuis plusieurs semaines que le chien de ses voisins ne semble pas en grande forme. "C’est un berger allemand qui se trouve dans une petite cour, il passe son temps dehors, par toutes les météos. Même la nuit, il est dehors", nous explique le jeune homme. 

Pour lui, il est clair qu’il s’agit de maltraitance animale. "Le simple fait qu’il est dehors par tous les temps. Ses maitres le prennent par les babines pour le faire entrer dans la cour, on voyait aussi clairement qu’il avait des plaques sur son dos. Et il pleurait souvent quand ses maîtres partaient…", décrit-il.

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Touché par cette situation de "délaissement", Michaël décide de déposer une plainte auprès de la zone de police locale. "Je me suis rendu au commissariat de Saint-Servais parce que je ne savais pas quoi faire d’autre. Et là, ils m’ont dit que ma plainte serait redirigée vers le SPW donc que c’était mieux si je portais plainte directement auprès du SPW." C’est ce qu’il fait, mais un vrai parcours du combat débute alors pour notre étudiant… "C’est comme ça que j’ai été renvoyé d’organisme en organisme", dit-il.

Contact pris auprès du Service Public de Wallonie (SPW), on lui conseille de téléphoner au 1718, le numéro gratuit de la Région wallonne. "Pour porter plainte, on m’a demandé les nom et prénom du propriétaire du chien." Informations dont ne disposait pas Michaël. "Le SPW refuse de me donner ces informations, question de vie privée. La police ne veut pas me les donner non plus. Et les refuges ne peuvent pas me les donner non plus. Donc, je suis coincé", déplore-t-il.  

"Je ne sais pas avoir accès à ces informations donc je ne sais pas porter plainte"

Il se tourne alors vers "la responsable du bien-être animal de la commune de Namur" mais cette personne "n’a pas non plus accès à ces informations donc comment je suis censé les avoir ?", s’insurge-t-il. 

Michaël se trouve en effet coincé dans une boucle sans fin où les différents acteurs se renvoient la balle. "Pour pouvoir porter plainte, il me manque les nom et prénom du propriétaire du chien mais je ne sais pas avoir accès à ces informations donc je ne sais pas porter plainte", résume-t-il. Une situation qui, selon lui, n’est pas normale et même "choquante". "Je suis allé voir le code de déontologie de la police, il y a une loi sur le bien-être animal. Ils sont censés faire respecter les lois, donc ça me choque quand même."

Une problématique réelle

Si vous constatez un cas de maltraitance animale, le premier réflexe est en effet de contacter le numéro gratuit 1718. Pour ouvrir une plainte, il faut cependant disposer de suffisamment d’informations, dont les nom et prénom des propriétaires de l’animal. Ce qui est problématique, reconnaît Bruno Cardinal, directeur de l’Unité Bien-Être animal du Service public de Wallonie (SPW). Grâce à notre reportage, ce responsable découvre le souci. "Vous avez clairement attiré notre attention sur le fait qu’il y a un problème", nous a-t-il confié. Il n’était en effet pas au courant de cette contrainte. Contrainte qu’il souhaiterait voir disparaître.

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Le numéro gratuit 1718 est "un call center habilité à prendre en compte la plainte, les faits donc vous auriez connaissance. Ce call center va enregistrer votre plainte et la répercuter vers nos services en fonction des faits qui sont relatés", développe le directeur de l’Unité Bien-Être animal du SPW.

S’il s’agit de faits concernant, par exemple, un élevage, un refuge, une pension ou encore un parc zoologique, la plainte sera prise en charge par l’Unité du Bien-Être animal du SPW. "Notre unité a développé une vraie expertise pour laquelle il y a des vétérinaires qui sont spécialisés en matière de bien-être des animaux. Ils vont pouvoir investiguer et prendre en compte la plainte qui a été déposée", explique-t-il.

Dans le cas de Michaël, il s’agit d’un fait concernant un particulier. La plainte sera donc destinée aux acteurs locaux, comme la police ou l’administration communale. "Les zones de police ont la compétence en matière de bien-être des animaux, ainsi que les agents constatateurs communaux, les communes et les bourgmestres. Mais ils ne sont pas livrés à eux-mêmes, notre unité – qui a l’expertise – est en soutien vis-à-vis de ces acteurs locaux", assure Bruno Cardinal. 

Une autre solution : les refuges ou associations d’aide aux animaux

Etant donné que Michaël ne dispose pas des informations requises pour déposer plainte auprès du SPW ou de la police, il lui reste encore une autre possibilité : s’adresser à un refuge proche de chez lui. 

Les associations d’aide aux animaux sont aussi parfois sollicitées lorsque de la maltraitance animale est constatée. Chez Sans Collier, par exemple, plusieurs centaines de plaintes sont dénombrées chaque année. "Notre rôle, c’est d’essayer de récolter un maximum d’informations, mais normalement la police a été informée en amont. Car ils ont le rôle légal de constater et éventuellement de saisir si nécessaire", souligne Mélodie Michaux, responsable du service bien-être animal chez Sans Collier. 

L’ASBL, située à Perwez, a en réalité un rôle secondaire : lorsque la réponse apportée à la plainte ne satisfait pas le plaignant, ce qui est ici le cas de Michaël. "On essaye de prendre le relais auprès des autorités et voir ce qui est possible de faire. Mais si quelqu’un pense voir un animal maltraité, il faut prendre un maximum d’informations sur l’état de l’animal, sur le logement, ses conditions de vie, l’adresse précise… Et transférer dans un premier temps à la police. En deuxième temps, si la personne n’est pas satisfaite, à ce moment-là, il faut contacter l’association la plus proche de chez elle", insiste Mélodie Michaux.

Des formations dans les écoles de police

Notons que toutes les zones de police ne sont pas forcément sensibles à la cause animale. "Il y a encore du travail à faire, mais ça dépend de la zone de police. C’est vraiment dommage car la maltraitance animale, c’est un délit comme un autre. Une personne qui est arrêtée en état d’ivresse, c’est une infraction. C’est la même la chose pour un animal. Mais à l’heure actuelle, certains policiers ne sont pas sensibilisés à ça et vont passer outre", regrette-t-elle. 

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Pour répondre à cette problématique, le directeur de l’Unité du Bien-Être animal du SPW nous assure que des formations ont lieu dans les écoles de police et auprès des acteurs communaux. "Nous passons dans toutes les écoles de police où nous formons les futurs inspecteurs en matière de bien-être des animaux et nous formons aussi les agents constatateurs communaux. C’est en tout cas le souhait que nous avons de développer de plus en plus la collaboration que nous avons avec ces acteurs locaux", conclut Bruno Cardinal. 

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