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"Je suis bloqué": amputé d'une jambe, Olivier se voit refuser l'accès à… son mariage

Les bâtiments publics ne sont pas toujours adaptés aux personnes à mobilité réduite. Olivier, qui se déplace en chaise roulante, nous a contactés via le bouton orange Alertez-nous pour nous raconter son calvaire au quotidien.

"Il y a déjà 15 marches pour accéder à la commune, je ne sais pas comment je pourrais monter 15 marches…", Olivier est dépité. Sa compagne et lui ont tout prévu. Cette année, le 25 juillet, ils se marient à la commune de Gosselies. Tout est en ordre, à une exception près, et pas des moindres: l'accessibilité aux personnes à mobilité réduite (PMR). Olivier se déplace en chaise roulante depuis 7 ans, quand il a dû être amputé d'une jambe à cause de son diabète.

Le hic? L'ascenseur de la commune en question ne fonctionne pas. Le futur marié a bien essayé de trouver une solution, en vain: "J'ai demandé à la société qui m'aide pour les transports s'il était possible que deux personnes me soulèvent mais ils m'ont dit non, parce que c'est trop dangereux." Finalement, le couple a dû se résoudre à changer de lieu. Après tout, il y a plusieurs salles communales dans l'entité. C'est décidé, le mariage aura lieu à Marchienne-au-Pont. "Il a fallu tout recommencer à zéro", regrette Olivier. Autre désillusion pour le couple: la date initiale ne peut pas être maintenue. "Le 25 juillet, c’était la date anniversaire du papa de ma femme qui est décédé, on aurait bien voulu faire ça en hommage à lui. C'est raté. Ma femme est fortement déçue."

Il y a beaucoup d'endroits auxquels je n'ai pas accès

La commune, bien consciente du problème, assure que "le bâtiment va faire l'objet d'une grosse rénovation" et qu'"un accès va être mis en place pour les PMR". La solution proposée reste "d'aller ailleurs". L'entité de Charleroi dispose de six salles de mariage dont quatre sont ou seront accessibles aux PMR dans un avenir proche. "Dès qu'il y a des travaux, on fait des aménagements PMR", affirme le cabinet de Xavier Desgain, échevin des bâtiments. Avant de reconnaître: "Les aménagements sont parfois difficiles dans ces bâtiments qui sont anciens."

La situation rentre dans l'ordre

Tout n'est pas perdu pour Olivier et sa femme. Quelques jours après notre entretien, l'homme nous apprend qu'il a reçu un courriel de la commune de Gosselies: "Ils m'ont dit qu'ils pourraient me mettre une rampe en bois." Voilà les tourtereaux rassurés pour leur grand jour, mais cette mésaventure n'est que le reflet des problèmes que vit Olivier au quotidien avec son handicap.

"Il y a beaucoup d'endroits auxquels je n'ai pas accès", témoigne-t-il. Il continue: "À la longue, je commence à en avoir assez. Chez moi, tout est adapté, mais quand je sors, je suis bloqué. Depuis que j'ai été amputé, je ne sors plus, ou uniquement pour aller à l'hôpital. Je suis comme dans une prison."

"La Belgique n'est pas assez inclusive"

Pour mieux comprendre le contexte dans lequel évoluent les PMR dans notre pays, nous avons contacté Unia, une institution publique de lutte contre la discrimination. Leur réponse est sans équivoque: "La Belgique n'est pas assez inclusive". Quand nous avons exposé le problème d'Olivier, Marie-Ange Vandecandelaere du service handicap n'était "pas surprise".

Et pour cause, Unia a mené une enquête en 2017 sur l'accessibilité des communes wallonnes aux personnes en situation de handicap dont les résultats ne sont pas très encourageants. Près de 60% des communes qui ont répondu au questionnaire déclarent que leurs services et infrastructures ne sont pas suffisamment accessibles aux personnes en situation de handicap. Les communes ne représentent qu'une partie de l'iceberg: "D'un point de vue global, il y a encore beaucoup à faire pour améliorer l'accessibilité et l'inclusion des personnes en situation de handicap en Belgique." Le souci, nous explique-t-on, réside dans le fait que "les obligations d'accessibilité ne s'appliquent qu'aux bâtiments et espaces neufs ou à rénover". En d'autres termes, les bâtiments et espaces publics existants ne sont pas tenus de s'adapter dans l'immédiat. "Or, rénover l'ensemble de celui-ci prendra plusieurs décennies", regrette Marie-Ange Vandecandelaere.

Du côté de l'AViQ (l'Agence pour une Vie de Qualité), on préfère voir le verre à moitié plein: "Tout est perfectible, mais on avance." Lara Kotlar, la porte-parole, met en avant le plan d'accessibilité wallon 2022-2024 dont "l'objectif est d'assurer l'autonomie et la participation de tous à la société". Elle nous explique que toutes les politiques entreprises doivent l'être "à travers le prisme de l'accessibilité".

Autant dire qu'Olivier va encore devoir patienter avant de se déplacer avec autant d'aisance et d'indépendance qu'il ne le faisait il y a 7 ans, mais les choses vont dans le bon sens… doucement mais sûrement.

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