Que font les auto-écoles quand il neige?

La neige est tombée à plusieurs reprises au cours des derniers jours, provoquant des embarras de circulation largement évoqués sur RTL info. Les conducteurs, même expérimentés, ne sont pas toujours prêts à affronter ce genre de situation stressante. Dès lors, le climat n'est certainement pas idéal pour se mettre pour la première fois derrière un volant. Pourtant, "hier des auto-écoles conduisaient alors que les routes étaient gelées et recouverte de neige", remarque un alerteur en nous contactant via le bouton orange Alerte-nous. "Ils ne devraient pas reporter ?", se demande-t-il.

Que font les auto-écoles lorsque des chutes de neige s’abattent sur les rues que les élèves doivent emprunter? Quelles sont les règles? Est-ce que les cours sont directement annulés? L’élève a-t-il le choix de prendre la route coûte que coûte? Va-t-il pouvoir facilement déplacer son cours?


"On ne va pas prendre le risque de mettre en danger des élèves"

Pour répondre à ces questions, nous avons contacté quatre auto-écoles en Belgique francophone, à Bruxelles, Tournai et Florenville.

Aucune d’entre elles ne semble prendre des risques inconsidérés. "Si vraiment les conditions sont mauvaises comme hier, on ne va pas prendre le risque de mettre en danger des élèves", dit Dimitri créateur et directeur de l'auto-école 66 à Tournai.

"Le but, c’est de montrer comment la voiture se comporte, pas de faire peur !"

"On regarde le matin la météo pour avoir une idée de l’état des routes. S'il y a un risque de danger, on reportera le cours. Le but, c’est de montrer comment la voiture se comporte, pas de faire peur !"

Le danger est sans cesse mesuré, mais les voitures ne restent pas immobiles à chaque flocon. "S’il y a un peu de neige et qu’on peut aller à des endroits sans risque, on sortira. Dans un zoning bien dégagé par exemple, on aura l’occasion de monter des petites choses aux élèves."


"Certains élèvent peuvent être intéressés de rouler dans de telles condition" 

"Enseigner la conduite sur route enneigée n’est pas notre priorité, des centres de maîtrise s’en occupent et sont spécialisés, mais certains élèves peuvent être intéressés de rouler dans de telles conditions", remarque Dimitri. "On peut rapidement intégrer quelques petites choses en plus, qu'un autre élève qui aura suivi des cours en été n’aura pas apprises. A la fin du cours, ils disent qu’ils sont contents d’avoir pu voir comment le véhicule se comporte".

A Tournai, la fermeture de l’école de conduite est un événement plutôt rare. Dimitri ne prend la décision de ne pas ouvrir seulement une à deux fois par an. "On a de la chance, on se situe dans une grande ville où il ne tombe pas beaucoup de centimètres de neige".


"Les routes sont dégagées rapidement"

Mais même dans la province du Luxembourg, où la neige tombe plus régulièrement que dans d’autres régions de Belgique, les intempéries ne semblent pas perturber le fonctionnement des écoles de conduites plus qu’ailleurs. "Les routes sont dégagées rapidement, ça n’arrive pas souvent qu’on ne roule pas, 2 ou 3 fois par an maximum", explique Louis, directeur de l’auto-école Val d’Or à Florenville. "C’est comme dans tout, quand il y a un risque, on ne le prend pas !"

"Le moniteur a toutes les commandes, mais quand on voit ce qu’il se passe sur les routes, on constate rapidement qu’on n’est pas en sécurité. Ce sont des débutants, on ne prend pas de risque avec des élèves !"


"On annule dès que le marquage au sol n’est plus visible"

Parfois, malgré l’ouverture du centre, certains élèves ne viennent pas suivre leur cours. "Certains parents empêchent leur enfant de venir au cours car ils ont peur et estiment, malgré notre avis, que conduire sera trop dangereux", raconte Louis. "On ne peut pas les obliger. Dans ce cas, on reportera le cours."

Certaines écoles ont une règle simple pour savoir quand autoriser la conduite ou non: "On annule [les examens, NDLR] dès que le marquage au sol n’est plus visible, car l’examinateur ne peut plus évaluer la capacité de l’élève à respecter le marquage", explique Eric, moniteur à l’auto-école européenne d’Ixelles à Bruxelles. Hier, le centre d’examen a donc annulé les épreuves pratique le matin.

 
"Pour faire 400 mètres en 2 heures, ce n’est pas la peine"

Mais à Bruxelles, un autre problème se pose : la neige ralentit la circulation, ce qui provoque rapidement d’énormes bouchons. "J’ai annulé mon cours entre 10 heures et midi, on n’avançait pas. Pour faire 400 mètres en 2 heures, ce n’est pas la peine, l’élève n’apprend rien."

C’est donc le moniteur qui prend la décision d’annuler, au cas par cas, en fonction du danger potentiel. "On analyse les conditions météo en fonction du niveau de l’élève.  Si c’est juste avant l’examen, l’élève ne veut pas annuler, il veut un dernier entrainement. Mais quand ils n’ont pas le niveau, ils sont contents qu’on annule parce qu’ils ont la trouille ! C’est pareil pour nous : si un élève vient de commencer, ce n’est pas la peine de maintenir le cours alors qu’il ne sait pas démarrer. Il va mettre trop de gaz, la voiture va mal réagir, il ne va pas y arriver... c'est inutile, l’élève ne va rien apprendre."

 
"Apprendre quoi faire face à de telles conditions"

Comme Dimitri à Tournai, en fin d’écolage, Eric profite de l’occasion pour leur apprendre quoi faire face à de telles conditions climatiques à Bruxelles.

"C’était le cas hier, je les ai emmenés dans un coin sûr où il y avait de la neige, pour qu’ils puissent se rendre compte de la manière dont la voiture réagit quand elle tourne, quand elle freine. Je les ai fait freiner brusquement pour qu’ils voient comment fonctionne l’ABS ou qu’ils expérimentent comment, sur de la neige à 30 km/h, la voiture met 30 mètres à s’arrêter. Ils étaient très contents !"

Bien-sûr, même si le moniteur n’est pas contre le fait de prendre la route, certains élèves appellent pour annuler et dans ce cas, le moniteur acceptera de reporter.

"Ils paniquent et se disent ‘je vais provoquer une catastrophe !'"

Généralement, la neige angoisse les élèves en plein apprentissage. Mimoun, directeur et moniteur de l’auto-école Horizon à Bruxelles, l’a lui aussi constaté. "Le climat général renforce la peur chez les élèves. Quand ils voient des conducteurs expérimentés qui patinent et qui ont du mal à monter une côte, ils paniquent et se disent ‘je vais provoquer une catastrophe !’ "

Mais ce n’est pas une généralité. Certains élèves veulent conduire, quoi qu’il arrive. "J’ai eu un élève vraiment persévérant hier matin, il voulait absolument conduire. Mais j’ai pris la responsabilité de ne pas le laisser faire".

Même si l’élève veut prendre la route, c’est évidemment le moniteur ou le directeur d’auto-école qui a le dernier mot. Surtout qu’en cas de neige, même si l’élève conduit bien, le danger peut surgir de partout. "Je n’ai pas envie qu'on se retrouve dans un accident, quand bien même l’élève ne serait pas en tort."

 
"Les routes n’étaient pas salées, c’était le chaos"

Hier, Mimoun n’a pas voulu prendre de risque: "120 heures de cours ont été annulées", précise-t-il. "Les routes n’étaient pas salées, c’était le chaos".

L’après-midi, le directeur d'auto-école a laissé la décision aux moniteurs. Les routes étaient praticables, mais malgré tout, là encore il a enregistré des annulations. "Elles étaient faites à la demande des élèves ou sur décision des moniteurs, en fonction du niveau de l’élève et de sa peur."

Pour une sécurité maximale, Mimoun déclare équiper ses voitures de pneus neige. Il est convaincu qu’il faudrait obliger les véhicules professionnels - taxis, camionnettes de livraison, auto-écoles - à faire comme lui en hiver. Car même avec un permis en poche, sur une route enneigée ou verglacée, le conducteur le plus expérimenté peut lui aussi se trouver facilement en difficulté !