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Scandale Publifin: Paul Furlan reconnaît "ne pas avoir cherché à savoir"

Le ministre wallon des Pouvoirs publics a répondu mercredi en plénière du parlement wallon sur le scandale Publifin, appelant à un "sursaut collectif" et avançant plusieurs mesures pour renforcer la gouvernance des structures publiques en Wallonie.

"Je ne savais pas, j'aurais pu le savoir et c'est vrai, je n'ai pas cherché à le savoir"

Concernant les mandats de son ex-chef de cabinet adjoint Claude Parmentier chez Publifin et Nethys, "je ne savais pas, j'aurais pu le savoir et c'est vrai, je n'ai pas cherché à le savoir, car sa situation n'avait pas évolué lorsqu'il est entré en 2014 dans mon cabinet", a-t-il dit, confirmant qu'il n'y avait pas à ses yeux de conflit d'intérêts.

"Quelle que soit l'option en termes de légalité, ces pratiques apparaissent contestables sur le plan éthique"

Sur le scandale Publifin en lui-même, pour lequel des mandataires locaux ont perçu d'importantes rémunérations contre des prestations faibles voire inexistantes dans des organes consultatifs (comités de secteur), M. Furlan a dévoilé un premier rapport de son administration, relativement ambigu: ce rapport conclut en effet à la possibilité de deux lectures, selon la lettre ou l'esprit de la législation. La conclusion de l'administration est que "quelle que soit l'option en termes de légalité, ces pratiques apparaissent contestables sur le plan éthique". L'enquête administrative se poursuit, une information judiciaire est toujours ouverte. Le ministre a rappelé les démarches qu'il avait déjà entreprises pour renforcer la gouvernance des intercommunales.

Cinq réformes

Il a réfuté tout immobilisme de sa part et assuré que toutes les propositions avancées par l'opposition seraient examinées. Il a avancé cinq réformes à mener au minimum: un screening de tous les organismes supracommunaux afin de "supprimer tout ce qui n'est pas indispensable", la suppression des rémunérations dans les instances consultatives, la proportionnalité des rémunérations dans les organes de gestion par rapport aux responsabilités, au travail effectué et à la présence, la publication de toutes les rémunérations et l'ouverture des assemblées générales au public.

"Vous êtes affaiblis, vous n'avez pas la capacité à mener ces réformes"

Pour Pierre-Yves Jeholet, trop peu de réponses sont ainsi apportées. Il persiste à voir dans le chef du ministre PS "une négligence forte, une paresse coupable, un dilettantisme inacceptable." "Vous êtes affaiblis. Vous n'avez pas la capacité à mener ces réformes. Soit vous démissionnez, soit un autre membre du gouvernement, peut-être le ministre-président, assume ces responsabilités". A ces mots, le chef de groupe PS Christophe Collignon s'est emporté en accusant M. Jeholet de "poursuivre une responsabilité individuelle" alors que le libéral avait reconnu une responsabilité collective quelques dizaines de minutes plus tôt.

"Aucune mesure n'est prise par rapport aux puissants intouchables"

Pour Ecolo, Stéphane Hazée a confirmé qu'à ses yeux, la responsabilité du gouvernement restait engagée, et que personne ne semblait l'assumer. Il a pointé du doigt l'insuffisance des propositions avancées par le gouvernement, ainsi que le fait qu'"aucune mesure n'est prise par rapport aux puissants intouchables" dans les intercommunales ciblées. A ses yeux, la réponse de la coalition PS-cdH est "sans commune mesure avec la crise, et c'est très inquiétant".



RAPPEL DES FAITS DE L'AFFAIRE PUBLIFIN: CHRONOLOGIE

17 janvier: le vice-président de Nethys démissionne de son poste de président du comité d'éthique du cdH
Le vice-président de Nethys, Dominique Drion, a démissionné mardi des fonctions de président du comité de déontologie et d'éthique du cdH qu'il occupait jusqu'à présent. Conseiller provincial et patron du cdH liégeois, M. Drion a également été administrateur de Publifin. Il a à ce titre bénéficié du régime de rémunérations litigieux mis au jour ces dernières semaines.


17 janvier: trois administrateurs indépendants de Nethys dénoncent un lynchage immérité

Trois administrateurs indépendants de Nethys, société privée opérationnelle du holding financier public liégeois Publifin, ont défendu mardi l'image de cette société, écornée à leurs yeux par un "bashing" immérité et potentiellement destructeur de valeur. Ces trois administrateurs indépendants - Philippe Delaunois, ex-CEO de Cockerill Sambre, Pierre Meyers, ancien vice-président de CMI et du groupe FN et Diego Aquilina, directeur d'Intégrale - sont entrés dans la structure en 2014, dans un souci de renforcement de la bonne gouvernance dans l'ex-Tecteo et d'un renforcement de son expertise. 
Dans un communiqué, ils rappellent l'ampleur de Nethys (3.000 emplois directs pour un chiffre d'affaires d'un milliard d'euros) dans des secteurs très concurrentiels (télécoms, médias, énergie, finance, assurances et participations). Ils notent que la structuration - légale - du groupe Nethys est similaire à des acteurs tels qu'Ethias, la FN, la Sonaca, Elia ou Fluxys.


16 janvier: démission de Claude Parmentier, le chef de cabinet-adjoint de Paul Furlan


La même journée, l'hebdomadaire Le Vif avait révélé que Claude Parmentier, par ailleurs bourgmestre de Wanze, a touché depuis fin juin 2013 plus de 153.000 euros brut en tant qu'administrateur de Nethys SA, l'entité opérationnelle de Publifin. L'homme fait également partie du conseil d'administration de Publifin, holding public liégeois qui secoue actuellement le monde politique wallon en raison des rémunérations très généreuses perçues par certains mandataires locaux en tant que membres de ses comités d'avis.


13 janvier: "Je suis en colère parce qu'on m'a roulé dans la farine" dit Furlan

Le ministre wallon des Pouvoirs locaux Paul Furlan est en "colère" et estime avoir été "roulé dans la farine" dans le contexte des révélations sur les rémunérations des comités de secteur de Publifin, lit-on vendredi dans L'Avenir. Il promet d'être "intransigeant" lorsqu'il aura les résultats de l'enquête demandée à son administration au sujet de l'affaire.


22 décembre: Publifin supprime les comités de secteur controversés

Le conseil d'administration du holding public liégeois Publifin, ciblé par les critiques ces derniers jours en raison des montants jugés abusifs de rémunération des membres de ses comités de secteur, a décidé jeudi de supprimer ces organes consultatifs, ainsi que le lui avait enjoint la veille le ministre des Pouvoirs locaux, Paul Furlan.


20 décembre: l'affaire "Publifin" éclate grâce au magazine Le Vif

Vingt-quatre mandataires locaux perçoivent de très généreuses rémunérations pour siéger dans trois organes d'avis internes à Publifin, l'intercommunale qui contrôle à 100% l'entreprise Nethys (Voo, BeTV, L'avenir), rapporte alors Le Vif sur son site internet.

Celui-ci s'appuie sur les propos de l'échevin des Finances d'Olne, l'une des 76 communes actionnaires de Publifin, qui, à ce titre, a pu consulter des données internes sur la composition et l'activité de ces organes d'avis, qualifiés de "bidon" par Le Vif, ainsi que les rémunérations dont bénéficient leurs membres. Celles-ci oscillent entre 1.340 et 2.871 euros bruts par mois et ce, pour quelques réunions où la présence n'est pas obligatoire pour être rémunéré, soit un salaire horaire de... 9.800 euros bruts, avait calculé Le Vif. Ces organes d'avis, qui portent le nom de "comités de secteur", sont censés "éclairer" le conseil d'administration de Publifin mais "servent en réalité à rémunérer des élus rendant ou ayant rendu service à leur parti", ajoute le site d'information.Le mécanisme profiterait au total à 24 mandataires locaux issus du PS, du MR ainsi que du cdH.

Dans un communiqué envoyé mardi soir, Publifin contestait toute mauvaise gouvernance et souligne qu'elle fut à l'origine de "la plus grande rationalisation du nombre d'intercommunales en Wallonie" par l'absorption de toutes les intercommunales wallonnes de câblodistribution ainsi que plusieurs autres actives dans l'énergie. "Dans ce cadre, et afin d'intégrer ce processus de rationalisation, il a été décidé par les différentes forces politiques liégeoises de conserver un comité de secteur pour chaque activité relative à un secteur industriel: l'énergie, les télécoms et plus spécifiquement l'ancienne Intermosane", expliquait Publifin. "Cette logique permettait à un nombre plus large de mandataires de rester en contact avec les activités menées tout en supprimant les conseils d'administration et en maintenant uniquement l'équivalent de trois anciens comités de gestion exécutifs sur dix", ajoutait le holding.

Quant aux rémunérations évoquées par Le Vif, celles-ci sont "exactement calquées sur les barèmes établis par la Région wallonne", poursuivait le communiqué. "Pour le surplus, une fois constitué, chaque comité, sous la conduite de son président, est responsable de son fonctionnement, du nombre de ses réunions et du rappel à l'ordre de ses membres et ce, en toute autonomie. Les objectifs poursuivis par chaque comité de secteur et leurs travaux figurent dans le rapport annuel de Publifin en toute transparence", insiste Publifin.

Réagissant aux informations du Vif, l'opposition Ecolo avait exigé "la plus grande transparence et le retour à la raison" au sein de "la nébuleuse Publifin-Nethys". "Ce nouveau scandale s'ajoute aux dérives et à la faiblesse du contrôle sur Nethys, dont de nouveaux éléments ont encore été dévoilés il y a quelques jours", commentait Stéphane Hazée, chef de groupe au Parlement de Wallonie. Pour les Verts, ces "rémunérations exorbitantes apparaissent d'autant plus scandaleuses qu'il s'agit d'argent issu de la collectivité: en effet, Publifin est 100% public et le financement des comités de secteur est donc payé par les citoyens", soulignaient-ils.

Une affirmation que le holding contestait avec force: "Publifin n'est aucunement financé par une quelconque dotation publique et donc de l'argent de la collectivité. Publifin vit uniquement de ses activités industrielles et commerciales et a d'ailleurs réalisé un bénéfice de 68,2 millions d'euros en 2015".

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