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Obèse, Annie, 52 ans, veut courir The Military Run: "Oisiveté et gourmandise ont fait ce que je suis devenue maintenant"

Après avoir perdu son emploi en 2007, Annie, 52 ans, a pris du poids jusqu’ à en devenir obèse. Aujourd’hui, la balance affiche 98 kilos. Pour se sortir de là, elle s'est lancé un défi personnel : courir "The Military Run" en septembre, avec ses enfants.

Le jour de son mariage, en 1985, Annie pesait 65 kilos pour 1,68 mètre. Année après année, les vicissitudes de la vie ont ajouté des kilos supplémentaires à cette ancienne aide-soignante. Jusqu'à approcher aujourd'hui des 100 kilos. Jusqu'à décider de réagir. Déterminée à inverser la tendance, cette maman de 52 ans s'est fixé un premier but, participer avec ses deux enfants à la "Military Run", nous a-t-elle annoncé via le bouton orange Alertez-nous. Nous l'avons rappelée pour qu'elle nous raconte son histoire.


De 65 à 98 kilos

Après son mariage, Annie vit deux grossesses et arrête de fumer. Elle prend 15 kilos. Mais le véritable tournant survient en 2007, suite à un accident de la route. Annie s’en sort indemne mais y laisse sa voiture, qui part à la casse. Seule avec ses deux enfants à charge, elle n’a pas les moyens d’en racheter une neuve. Alors qu’elle se déplaçait avec sa voiture personnelle pour exercer son métier d’aide-soignante à domicile, on la licencie. "On m’a dit ‘si t’as plus de voiture t’as plus de boulot’, et on m’a gentiment donné mon préavis", raconte-t-elle. Elle enchaîne ensuite des formations, stages et petits CDD, pour finalement se retrouver au chômage, son dernier contrat ayant pris fin en septembre. Une situation qui accentue encore sa prise de poids. "Le fait d’être au chômage ne m’aide pas, il n’y a plus de vie sociale, plus de sous... C’est moche à tous points de vue", confie-t-elle avant de synthétiser en toute honnêteté et lucidité: "L’oisiveté plus la gourmandise ont fait ce que je suis devenue maintenant". 


"Il ne me reste qu'une seule chose, c'est bouger"

La quinquagénaire a vu plusieurs diététiciennes et essayé plusieurs régimes. Mais l’effet est toujours le même : son poids joue au yoyo. Selon elle, il ne reste plus qu’une issue : "Je ne veux pas avoir recours à la chirurgie et je suis très gourmande, il ne me reste qu’une chose, c’est bouger". 

Facile à dire mais moins à faire, puisqu’elle n’arrive pas à trouver la motivation de pratiquer du sport seule. "Toute seule je n'y arrive pas, et puis avec le temps qu'il fait, on a plus envie de se mettre dans le fauteuil avec un paquet de chips plutôt qu'une paire de baskets aux pieds", déplore-t-elle.

Elle a imaginé les services d’un coach personnel. Mais elle n'est pas riche et cette possibilité lui est inaccessible financièrement. Participer à une émission de téléréalité pour personnes en surpoids, va-t-elle jusqu'à songer. Mais ce type d’émissions, qui existe aux Etats-Unis, n’existe pas dans le paysage audiovisuel belge.

Du point de vue de la diététicienne Manon Desmet, qui travaille à la Clinique du poids idéal à l'hôpital Saint-Pierre à Bruxelles, ça n'est de toute façon pas une bonne solution : les candidats perdent une grande quantité de poids très rapidement, mais ils perdent plus de muscle que de graisse. "Le problème c’est qu’en rentrant chez eux après, les candidats reprennent deux fois plus de poids puisqu’ils n’ont plus de masse musculaire, qui sert justement à brûler les calories", explique la professionnelle.


Le véritable défi derrière la course militaire : continuer le sport après 

Finalement, Annie a décidé de se prendre en main elle-même, et elle compte sur ses enfants pour la soutenir : elle s’est fixé l’objectif audacieux de courir "The Military Run" ("La course militaire") de Bruxelles avec eux, au mois de septembre prochain. Un parcours du combattant semé de dizaines d’obstacles qu'on rencontre dans les entraînements à l'armée, et qui s'étend sur 6 kilomètres. Un véritable défi pour une personne en surpoids, dans lequel la motivation va jouer un rôle majeur. "Le mot motivation vient du latin movere, ça veut dire avancer, et tant qu’on avance et qu’on se sent bien, on est motivé. Mais à un certain moment ça plafonne et puis on craque et on reprend. Généralement, on voit aussi ça dans les régimes", nous dit Kris De Ruysscher, psychologue. Pour que cette course s’illustre comme un nouveau départ, Annie devra continuer à faire du sport après "The Military Run" et ne pas s’arrêter en si bon chemin, au risque de retomber dans le cercle vicieux stress - mal-être - nourriture.


"Le premier lien neurologique d'un être, c'est la nourriture"

D'après Kris De Ruysscher, qui exerce notamment à la Clinique du poids idéal, c'est une "rupture sociale" due à son licenciement, qui constitue probablement la cause principale du gain de poids d'Annie.

Une situation qui n’est pas rare chez les personnes en surpoids. Le psychologue estime que 30 à 35% de ses patients (qui sont tous en obésité morbide) ont pris du poids suite à un licenciement. "Un emploi c’est gratifiant, on doit se montrer aux collègues, aux clients, aux patients. C’est une structure qui est essentielle pour la qualité de vie. Et si quelque chose comme un licenciement arrive et coupe ce processus de qualité de vie, la personne vit certainement des moments de stress fort élevés. C’est un changement que la nourriture peut combler malheureusement, parce que manger beaucoup de calories va activer le centre du plaisir dans le cerveau, le nucleus accumbens, et procurer momentanément un sentiment de bien-être", nous explique-t-il.

Un rapport à la nourriture qui se passe surtout dans le cerveau, et que l’on nous inculque dès la naissance : "Le premier lien neurologique d’un être, c’est la nourriture : un bébé naît et on lui donne le sein. Il pleure, crie, on lui donne le sein et il est comblé. Et ça dure tout au long de notre croissance : à 2 ans le premier bout de chocolat, etc. On est éduqués dans l'idée qu'on peut être bien en mangeant. Et généralement ce ne sont pas des fruits et des légumes, c’est du chocolat, des chips, de la bonne nourriture", dit le psychologue De Ruysscher.

Une tendance à grignoter qui s’explique également par "la disponibilité des aliments" à la maison, nous dit la diététicienne Manon Desmet. "Au travail vous avez uniquement votre pique-nique, alors qu’à la maison vous avez le frigo, les placards... Au travail on ne pense même pas à manger". Pour éviter ça, l'experte en nutrition recommande à ses patients de faire du bénévolat ou de se trouver une activité qui les fasse sortir de chez eux. 

En attendant de courir "The Military Run", Annie reprend le sport en douceur, en vue de pouvoir surmonter les obstacles qu’elle rencontrera sur le domaine militaire en septembre. "J’aime relever les défis, ce n’est pas quelque chose qui me fait peur si je suis encadrée et aidée. Quant à savoir si je vais tenir sur long terme, on verra..." conclut-elle.

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