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La fin de la 2e guerre mondiale (3/6): "Au fort de Breendonk, mes journées étaient déchirées par des cris de tortures"

A l’ occasion de la commémoration du 70ème anniversaire de la fin de la seconde guerre mondial, nous vous proposons une série chaque jour sur la Belgique durant l’occupation à travers le récit de ses derniers témoins et d’historiens. Aujourd’hui, Sébastien Rosenfeld et Michel Herinckx nous plonge au cœur de la répression allemande. Nous sommes au Fort de Breendonck, à Willebroek le 12 juillet 1943.

"On m’a mis un sac sur la tête et on m’a collé sur un mur. Je me suis dit ‘Là, c’est ma dernière heure’", se souvient Jacques Burniat.

Cela fait 3 semaines que Jacques est au fort de Breendonk. Il a 20 ans. "Un officier allemand m’a enlevé le sac et je me suis retrouvé devant un objectif", raconte-t-il. "On voulait me photographier. Les gens riaient de voir que je m’étais rendu compte que j’étais devant un photographe plutôt qu’un fusil."


Des journées déchirées par les cris

Ce résistant de la première heure, étudiant à l’ULB vient de se faire arrêter à Bruxelles avec son cousin après une dénonciation. En ce mois de juillet 1943, il est à l’isolement dans une cellule.

"Les journées étaient souvent déchirées par les cris de gens qu’on torturait non loin. Ou bien on entendait des SS arriver et extraire un prisonnier de sa cellule, ne lui permettant même pas de prendre une cigarette et puis 15 minutes plus tard on entendait qu’on le fusillait."

Au total, 3.500 prisonniers vont passer par le fort de Breendonk. Dès novembre 1942 commence les premières exécutions en représailles aux attentats contre les collaborateurs et les soldats allemands. 164 personnes vont être fusillées. 21 vont être pendues. Une centaine vont mourir d’épuisement et de torture.


Il s'évade d'un camp de travaux forcés

Jacques grave les jours qui passent dans la brique.  Il évite la torture de justesse.

Quatre mois plus tard, il se retrouve dans le nord de la France à Watten pour construire une base pour les futurs V2 des nazis.

Huit jours après son arrivée, il s’évade du camp de travaux forcés en se faisant passer pour un ouvrier. Il parvient à franchir la frontière et atteindre Bruxelles pour se cacher jusqu’à la libération.


Il se cache dans les meules de foin

"Combien de régiments de SS j’ai rencontré... Je me suis caché dans les meules de foin. Vous ne pouvez pas imaginer", détaille le rescapé Jacques Burniat. "C’était truffé d’Allemands, et pas des tendres."

L’historienne Chantal Kesteloot spécialiste de la seconde guerre mondiale retrouve le dossier de Jacques dans les archives du service pour les victimes de guerre.

Avec l’aide de l’archiviste, l’historienne retrace le parcours de la plupart des prisonniers.


Le règne de l'arbitraire

"C’est vraiment le règne de l’arbitraire", explique Chantal Kesteloot. "Ils peuvent rester un jour, une semaine, un mois voire plus. On les amène par exemple Avenue Louise à la gestapo. Ils vont être interrogés et ensuite ils vont être condamnés à des travaux forcés dans le nord de la France mais peuvent aussi être déportés en Allemagne ou être pendus."

A la libération, la rue se déchaine contre les collaborateurs responsables de tant de souffrances. 

Il retrouve la trace de son père

Jacques tente alors de retrouver son père arrêté en 1944.

"J’ai réussi à refaire le parcours de mon père qui est mort d’épuisement dans un commando. J’ai retrouvé le compagnon dans les bras duquel il est mort", confie Jacques.

Une blessure toujours vivace, 70 ans après.

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