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Nos révélations sur l’affaire Wesphael? "Je suis au bord du dégoût, cet homme est déjà privé de son droit au procès équitable"

‘C’est pas tous les jours dimanche’ revenait sur l’affaire Wesphael, dont le procès commence lundi à Mons. Parmi les invités, l’avocat et professeur de droit constitutionnel Marc Uyttendael. Il n’y a pas été par quatre chemins et rejoint l’accusé quand il parle de boucherie médiatique.

"Je suis plus que gêné, je suis au bord du dégoût là", a déclaré l’avocat bien connu des plateaux de télévision après avoir réentendu des extraits du document exclusif révélé cette semaine par l’émission Indices de RTL-TVI : l’enregistrement de la conversation entre O., l’amant de Véronique Pirotton, et celle-ci alors qu’elle fuyait son mari pour se réfugier à Ostende.

"C’est un dossier extrêmement important, extrêmement sensible. C’est un dossier dont nous ne connaissons rien si ce n’est quelques champignons qui sont sortis médiatiquement. Il est clair que je crois que cet homme est déjà privé de son droit au procès équitable parce qu’on n’a pas un débat qui se limite au cadre de la cour d’assises. Dans ce cadre, vous aurez tout, des éléments à charge et à décharge. Mais le fait qu’un climat soit créé avant, qui est un climat qui ressemble quand même à un lynchage, on peut comprendre que cet homme parle de boucherie."

Christophe Deborsu lui fait alors remarquer que le camp Wesphael a lui aussi utilisé la presse pour servir sa cause et tenter de disculper l’accusé auprès de l’opinion publique. "Oui, mais vous avez des morceaux de dossier qui jaillissent comme ça et qui sont isolés de leur contexte. Je crois qu’il n’y a rien de pire que de casser la sérénité d’un procès d’assises, et ici, le simple fait que nous soyons ici en train de parler de pièces du dossier, c’est entamer cette sérénité", a regretté Me Uyttendael. "Le climat qui est créé médiatiquement avant a une influence sur le procès."


"Un des éléments les plus scandaleux de ce dossier"

D’autres révélations obtenues par RTL-TVI desservent particulièrement la cause de M. Wesphael. Comme cette interview de Philippe Boxho, professeur de médecine légale à l’ULg au micro de Christine Calmeau dans l’émission ‘Indices’ en 2014. Notre journaliste Christine Calmeau lui a soumis le rapport d’autopsie de Véronique Pirotton qu’elle était parvenue à se procurer. Les journalistes n’étant pas tenus par le secret de l’instruction, elle pouvait donc le révéler et M. Boxho s’est donc exprimé sur ce qu’il a pu y lire.

Ses conclusions excluaient totalement la thèse du suicide défendue par le camp Wesphael.

C.C. : "Est-ce que vous êtes formel pour dire qu’il y a eu intervention d’une tierce personne ?"

P.B. : "Ha oui oui oui, on ne se fait pas ça tout seul. Je ne sais pas qui, mais il y a eu quelqu’un."

C.C. : "Ce n’est donc pas un suicide ?"

P.B. : "Oui. Je ne vois pas comment elle aurait fait en se déposant un sac en plastique sur la face, même en étant imprégnée par de l’alcool, même en étant imprégnée par quelques médicaments qui sont d’ailleurs à des valeurs (taux dans le sang, ndlr) thérapeutiques et non toxiques. (...) Poser le sac sur le visage, ça ne marche pas. Je n’en ai jamais eu" de cas semblables, exprimait l’expert.

Pour Marc Uyttendael, "cette interview de Philippe Boxho fait partie à mon sens des éléments les plus scandaleux de ce dossier. On ne voit pas pourquoi un expert des tribunaux qui peut intervenir dans de nombreux dossiers se permette comme ça -comme un papillon attiré par les 'sunlights"- de venir intervenir dans un dossier qui est encore à l’instruction, de donner son avis sans avoir accès aux pièces du dossier auxquelles juridiquement il ne pouvait pas avoir accès et prendre ainsi parti. Je trouve que cet homme s’est fondamentalement disqualifié en faisant ce qu’il a fait", a asséné l’avocat. Car si notre journaliste, en possession de ce document, était en droit de le dévoiler, "que cet expert qui a une déontologie aille intervenir dans une affaire qui ne le concerne pas, c’est scandaleux", a estimé Me Uyttendael.

Le problème, à la base, ce sont les fuites. "Il y a quelque chose qui est complètement absurde et illégal, c’est que ce rapport d’expertise ou d’autopsie soit sorti du dossier", a conclu l’avocat.


Aucune influence sur les jurés

Les 3 journalistes invités sur le plateau en plus de notre confrère Christine Calmeau, la chroniqueuse Emmanuelle Praet, Marc Metdepenningen du Soir et Albert Jallet de L’Avenir, qui suivront tous les deux le procès, ont tous tempéré les déclarations de l’avocat.

Pour Emmanuelle Praet, premièrement, un journaliste qui se retrouve avec de tels documents dans les mains ne peut pas les passer sous silence. Et quand Bernard Wesphael parle de "boucherie médiatique" il faut se rappeler qu’en tant que politicien, "il est médiatiquement connu. Mais tous les autres auteurs ou victimes", non connus publiquement, "ont aussi leurs noms révélés dans la presse."

Albert Jallet, lui, ne croit pas que tout ce déballage médiatique qui orienterait le procès selon Me Uyttendael ait au final cet impact sur le jury. "La cour d’assises va avoir une vision beaucoup plus globale. Le jury va être immergé dans ce dossier et il va prendre du recul. Donc dire que le jury est sous influence, je ne pense pas qu’il le sera. De plus, le procès va durer 3 semaines", largement le temps de prendre connaissance des témoignages à charge et à décharge.

Marc Metdepenningen, dans le métier depuis de nombreuses années, a lui conclut en ces termes: "Le débat sur la presse dans les procès est quelque chose d’absolument récurrent et c’est toujours la première mi-temps d’un procès."

Rendez-vous lundi pour la 2ème, l’ouverture des débats à la cour d'assises de Mons.

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