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"Sleep Well Beast", le nouveau souffle de The National

"On voulait détruire ce qu'on avait construit jusqu'ici, il fallait explorer de nouvelles voies": le guitariste américain Bryce Dessner raconte à l'AFP la remise en question payante de son groupe de rock, The National, sur le dense et réussi "Sleep Well Beast".

Quatre ans séparent ce huitième opus studio, dans les bacs vendredi, du précédent "Trouble Will Find Me". Un laps de temps plus long qu'à l'accoutumée, mais nécessaire, pour le quintet américain originaire de Cincinnati, devenu en 18 ans et quasiment malgré lui un acteur majeur du rock alternatif.

"Pour cet album, on n'était pas très pressé de se retrouver, avoue Bryce Dessner, dans un excellent français. Nous avions besoin de nous retrancher dans nos coins respectifs, de nous lancer dans d'autres projets musicaux. Il se trouve que nous vivons éloignés les uns des autres. C'est bénéfique car depuis quelques années on fait de longues tournées ensemble".

Si lui vit à Paris, son frère Aaron (également guitariste) réside à Copenhague, Matt (Berninger, chanteur) à Los Angeles, Bryan (Devendorf, batteur) à Cincinnati, son frère Scott (bassiste) à Long Island.

Mais tous se sont retrouvés l'an passé à Long Pond, dans les montagnes de l'Etat de New York, où ils ont fait construire un studio.

"C'était la première fois que nous avions autant d'espace. On a apprécié de travailler ensemble, alors que par le passé, il y a eu des sessions très difficiles, au cours desquelles l'angoisse et la tension étaient extrêmes. C'est la première fois où l'improvisation, l'expérimentation n'avait pas de fâcheuse conséquence", assure Dessner.

Le groupe a aussi enregistré à Paris, à Los Angeles et surtout à Berlin, dans un des studios de la Funkhaus, mythique complexe qui abritait les stations de radio est-allemandes.

- "On a affirmé notre personnalité" -

"Beaucoup d'artistes d'horizons différents traînaient là-bas, raconte Dessner. Musicalement, on s'est ouvert à beaucoup de choses. On s'est amusé sur des nouvelles machines. Ç’a été très enrichissant. On voulait trouver une nouvelle énergie."

Si la puissance mélancolique qui caractérise le rock de The National demeure sur des titres comme "Day I Die", l'apaisement ("The System Only Dreams in Total Darkness") se fait aussi entendre derrière la voix grave et lancinante de Matt Berninger, auteur de chansons toujours aussi désespérées comme "Nobody Else Will Be There" ou "Guilty Party".

"Il y a toujours eu quelque chose de sombre chez lui. Mais sur le morceau +Sleep Well Beast+, il se montre aussi bienveillant envers la jeunesse, dit Dessner pour la défense de son parolier-interprète. Aux Etats-Unis, que fait-on pour nos jeunes? Il y a dans cette chanson l'idée de prendre soin d'eux en améliorant la société, en s'occupant de la planète. Mais la réalité, c'est qu'on en est très loin."

Une réalité qui s'écrit depuis quelques mois avec Donald Trump à la Maison Blanche. "Une catastrophe, peste-t-il, dépité. On est très affecté. On a manifesté contre lui juste avant son intronisation."

"Quand l'élection a eu lieu, l'album n'était pas fini. Le monde basculait d'un coup et forcément cela nous a impactés. Une chanson comme +Turtleneck+, si elle n'est pas à proprement parler politique, contient beaucoup de colère, on ne pensait pas la retenir pour cet album, mais elle a fini par s'imposer".

Pour celui qui compose l'essentiel des mélodies avec son frère Aaron, "Sleep Well Beast est l'album le plus ambitieux du groupe. Je crois qu'on a affirmé notre personnalité. Chaque instrument se fait entendre, on n'est plus vraiment dans le maelstrom sonore qui nous a longtemps caractérisés".

"Il ouvre une fenêtre vers l'avenir. Il y a encore de nouveaux chemins à explorer pour nous, ce qui est positif après presque vingt ans passés à faire de la musique ensemble", conclut-il.

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