Accueil Actu

"Sublime de voyage", première biennale d'art contemporain 100% nomade

Un drôle de véhicule doré s’élancera mercredi de Limoges sur les routes pour rallier la 56e Biennale de Venise en quatre jours, avec à son bord huit artistes internationaux, une vingtaine d’oeuvres d’art contemporain et un studio de radio mobile pour "Sublime de voyage", la toute première biennale d’art contemporain embarquée.

Cette "première", portée par la plasticienne Clorinde Coranotto, placée sous le commissariat de l’historien d'art Paul Ardenne et soutenue notamment par le ministère de la Culture et l’Union européenne, terminera sa course à la 56ème Biennale de Venise samedi 24 octobre.

Paul Ardenne, qui suivra le convoi, confesse son excitation pour ce projet "tout à fait exceptionnel", dit-il. "Je suis spécialisé dans les formes d’art non-conventionnel, c’est-à-dire hors atelier, dans la rue, dans un cadre participatif… Quand j’ai rencontré Clorinde, j’ai été impressionné par son approche qui ressemble à une démarche missionnaire. On a coutume de dire que l’art est une mise en danger. Or, l’art contemporain est trop souvent cantonné à des lieux d'élection et à un public qui peut l’appréhender. Ici, avec ce véhicule unique, spécialement aménagé pour amener l’art auprès d’un public non conquis, il y a une authentique démarche pédagogique", explique-t-il.

Depuis 1999, la plasticienne Clorinde Coranotto, professeure à l’Ecole des Beaux-Arts de Limoges, avec son étrange véhicule baptisé "Art NOmad", amène l’art contemporain aux confins des campagnes limousines: "Une grande aventure humaine, expose-t-elle avec un sourire éclatant. Je pense que les gens sont tout à fait prêts à recevoir cette offre culturelle, mais qu’il y a des complications physiques, les lieux sont loin, et parfois psychologiques. Mon approche de l’art est celle de la fête permanente et la fête est accessible à tous".

Ce cheval de Troie, "conçu pour se fondre au décor avant d'exploser de surprises", aura à son bord une vingtaine d’oeuvres d’artistes contemporains venus des quatre coins du monde, d’Europe, d’Amérique mais aussi d’Asie. Un convoi de 27 personnes réunies sous le thème "Sublime de voyage".

- 'A contre-courant du désenchantement' -

"Ce thème je l’ai pensé comme un +nécessaire de voyage+. Quand on part on ne prend que l’essentiel. Le thème de sublime est un hommage à James Lee Byars", artiste plasticien américain (1932-1997), explique Paul Ardenne. Et tout au long du voyage, le véhicule fera des haltes auprès du public qui participera à la création d’une oeuvre éphémère.

Au-delà de la démarche, Paul Ardenne a été séduit "par la forte exigence stylistique et poétique" du projet: "J’ai toujours été intéressé par la question de la manière d’approcher les publics. Et en tant que commissaire d’exposition je commençais à sentir une certaine lassitude à organiser des expositions dans des lieux conventionnels. Cette biennale c’est une performance à part entière, qui tourne autour de la transmission et de ses moyens".

"Le sublime est un thème qui m’intéresse parce que je fais partie de cette génération post-soixante-dix, celle qui a fait le deuil de toutes ses utopies pour construire une société individualiste et par trop souvent haïssable. Cette biennale a la volonté d’aller à contre-courant du désenchantement. Le sublime est une manière de s’en extraire sans mot dire. Or à mes yeux, James Lee Byars est emblématique de cette pulsion qui pousse les êtres à inventer des moyens, même quand ils n’ont pas les moyens. Avec ses collages, son recyclage de papier à chocolat doré et sa quête de sublime grandiose de modestie, il a tracé une voie pour sublimer le monde. Tous les artistes à bord de cette biennale ont une généalogie commune avec lui".

"Ce qui compte dans notre démarche" c'est "ce qu’on laisse aux personnes que l’on croise", résume Clorinde Coranotto.

À la une

Sélectionné pour vous