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A Roubaix, quarante ans de street art retracés en une exposition

De Seen à Vhils, en passant par Invader, Shepard Fairey ou Banksy, la Condition Publique de Roubaix (Nord) propose à partir de vendredi une rétrospective consacrée au street art, la première de cette envergure en France, qui entend aussi démontrer que la discipline a toute sa place dans l'art contemporain.

Dans cet immense bâtiment autrefois affecté au stockage de la laine devenu une manufacture culturelle, "Street Génération(S)" retrace, en 50 artistes et 200 oeuvres, toute l'histoire du mouvement, nouvelle génération comprise.

Ainsi, Jacques Villeglé, connu pour ses affiches lacérées transformées en tableaux, ouvre l'exposition : pour de nombreux artistes, il a posé les bases du mouvement dans les années 1950.

C'est dix ans plus tard que, sur la côte Est des États-Unis, prospèrent les tags sur les trains et les murs. A cette époque, "on est dans l'écriture très simple", explique la commissaire Magda Danysz.

Les artistes se contentent d'abord de recouvrir la ville de leurs signatures, à l'image de Taki183, puis, peu à peu, vont chercher à se distinguer en ajoutant des éléments graphiques.

Fin 1970, les codes de la discipline sont définis par ceux considérés aujourd'hui comme ses maîtres, à l'image de Seen, icône du graffiti new-yorkais avec ses couleurs éclatantes ou Futura, "l'un des premiers à être dans l'abstrait", dit la commissaire.

A la fin des années 1990, les sujets de société deviennent centraux et les artistes apportent davantage de profondeur à leur expression, comme l'Américain Shepard Fairey auteur du célèbre portrait stylisé de Barack Obama sur fond rouge et bleu ou Zhang Dali en Chine. Autre artiste majeur : Invader et ses iconiques Space Invaders réalisés en mosaïque distillés au quatre coins du monde.

- 'Gros chapitre de l'histoire de l'art' -

Aux alentours de la Condition Publique, des artistes ont investi les murs du quartier populaire du Pile: Crash, Vhils, Rémi Rough ou encore Ludo, qui a réalisé un impressionnant oiseau aux ailes armées de 16 mètres de haut et de 36 mètres de large sur le coin d'une usine.

Quant au Nantais Jef Aérosol, il s'est installé sur le toit de la manufacture culturelle pour y poser ses pochoirs et créer "un rassemblement de personnes anonymes grandeur nature avec Chuck Berry qui donne le là à l'ensemble", décrit l'artiste. Une partie de l'exposition est d'ailleurs vouée à l'avènement du pochoir dans l'art urbain, avec Miss.Tic, Blek le rat ou encore le mystérieux Banksy.

A Roubaix, "l'environnement extérieur est hyper intéressant, c'est un terrain d’inspiration étonnant, avec des perspectives, un passé, c'est très habité, je rêve que les artistes reviennent pour faire d'autres murs", assure la commissaire de cette exposition composée "d'oeuvres muséales", mais aussi de photographies, de vidéos et d'archives d'artistes, comme leurs carnets d'esquisses.

Selon Magda Danysz, "le street art est l'un des gros chapitres de l'histoire de l'art par la force de sa culture, de ses codes, de ses langages, de ses thèmes, de ses techniques... le mouvement possède un socle très fort".

Mais, il doit ausi lutter contre un "snobisme anti street art" dû "a une méconnaissance du mouvement", d'après elle. "Le terme +street art+ a été galvaudé et beaucoup pensent que ce n'est pas de l'art contemporain, que c'est un truc à part, ce qui est irrespectueux envers les artistes".

Aussi, "cette exposition a notamment pour but de montrer aux sceptiques, que l'art urbain, qui fait partie de l'ADN visuel de tout le monde, peut être très intéressant", conclut l'auteure d'une "Anthologie du street art".

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