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A Times Square, des histoires d'immigrés au bout du fil

Elles ont quasiment disparu de New York, mais trois cabines téléphoniques publiques ont été installées sur Times Square par l'artiste Aman Mojadidi pour y écouter des immigrés raconter l'histoire de leur voyage, un projet transformé par le climat politique ambiant.

New York ne compte plus que quatre cabines téléphoniques fermées, derniers vestiges d'une ère balayée par les téléphones portables.

Cette semaine, ce chiffre a quasiment doublé avec l'arrivée, au coeur de Times Square, de trois nouveaux modèles, personnalisés par l'artiste américain d'origine afghane, dans le cadre d'une installation baptisée "Once Upon a Place" ("Il était un endroit"), en partenariat avec l'association Times Square Arts.

A l'intérieur des cabines, on décroche le combiné mais uniquement pour écouter. A l'autre bout du fil, les voix sont celles de New-Yorkais venus d'ailleurs, qui racontent leur périple.

Aman Mojadidi leur a simplement demandé de parler de leur parcours, dans leur langue, pendant 15 minutes au plus, sans leur poser aucune question, a-t-il expliqué à l'AFP.

Il n'a pas voulu faire traduire ces témoignages lorsqu'ils n'étaient pas en anglais. "Même si vous ne comprenez pas la langue, vous pouvez sentir l'émotion, comme si c'était une chanson", dit-il.

Au total, on peut écouter environ 5 heures 30 d'enregistrements et quelque 70 de ces petites histoires de migration, jusqu'au 5 septembre.

Habitué des installations, l'artiste avait lancé ce projet à l'été 2014, bien avant le début de la campagne présidentielle américaine et des premières saillies de Donald Trump contre l'immigration clandestine.

Le changement de climat politique l'a contraint à modifier son projet, lui qui espérait initialement installer des ateliers dans plusieurs quartiers de la ville, pour en faire des lieux de rencontre et d'interaction.

Mais les immigrés pressentis sont devenus "très nerveux".

"+Pourquoi devons-nous aller là-bas? Qui d'autre sera là?+, interrogeaient-ils", raconte Aman Mojadidi.

L'artiste a finalement dû procéder à des entretiens individuels, certains de ces immigrés étant arrivés clandestinement aux Etats-Unis.

Le choix des cabines et de ces témoignages n'est pas anodin. La disparition de la plupart de ces vestiges d'une autre époque à New York, c'est celle "de toutes les histoires coincées dans ces téléphones", résume l'artiste.

"J'ai pensé à une manière naturelle de ramener ces histoires", dit-il, "ramener l'esprit des cabines téléphoniques".

Ces cabines un peu spéciales, il les verrait bien à Paris, où il habite. Il songe aussi à en installer sur les itinéraires des migrants, pour recueillir leurs récits et les télécharger, pourquoi pas, sur une site dédié.

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