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Baptême du feu pour les auteurs de premiers romans

La cuvée 2017 de la rentrée littéraire qui débute cette semaine avec la parution d'ici la mi-octobre de 581 livres (dont 390 relevant du domaine français) est l'occasion de découvrir 81 nouvelles signatures.

Signe de la confiance des éditeurs dans ces nouvelles plumes, le nombre de primo-romanciers est en légère hausse par rapport à l'an passé (ils étaient 66). Les deux-tiers de ces nouveaux romanciers sont des hommes. Voici un bref état des lieux des premiers romans de la rentrée:

- "Le courage qu'il faut aux rivières" (Albin Michel) d'Emmanuelle Favier revient sur la tradition méconnue des "vierges jurées", ces femmes qui peuvent acquérir les mêmes droits que les hommes à condition de renoncer à leur féminité et de rester vierges. Pour échapper notamment à des mariages forcés, des femmes albanaises n'hésitent pas à suivre ce chemin, coupant leurs cheveux et bandant leurs seins. Emmanuelle Favier raconte tout cela mais surtout décrit dans de magnifiques portraits de femmes le réveil de la sensualité étouffée.

- "Petits remèdes à la dépression politique" (Don Quichotte) de l'éditeur Jean-Christophe Brochier est un des romans les plus toniques (et mélancoliques!) de la rentrée. On y parle beaucoup de rock, de politique et de la révolution... qui attend sur une voie de garage. Entre chaque chapitre on trouve l'éphéméride d'un événement politique et culturel qui a marqué l'auteur, issue d'une génération qui n'a "ni fait la guerre, ni la révolution, ni rien du tout". Le livre s'achève à la date du 31 décembre 1877, jour de la mort de Gustave Courbet. "Proudhonien, communard et libertaire", écrit Brochier semblant ainsi dresser une sorte d'auto-portrait.

- "Sauver les meubles" (Gallimard) de la Suissesse Céline Zufferey, 26 ans, est un nouvel exemple de la vitalité de la jeune littérature helvétique. Le narrateur, photographe aux ambitions artistiques contrariées, est contraint (il faut bien vivre) de gâcher son talent en photographiant des meubles pour les catalogues publicitaires d'une grande entreprise d'ameublement. Quand on lui propose de prendre des photos pornos, il imagine renouer avec la vie d'artiste mais est-ce si sûr? Le roman est désopilant et cynique.

- "Encore vivant" (Rouergue) de Pierre Souchon est un roman à couper le souffle. Pierre Souchon raconte sans fard ses internements en hôpital psychiatrique. Mais la folie ne se raconte pas, elle se vit. Le livre est âpre, parfois terrifiant, souvent drôle et toujours d'une lucidité aveuglante. Pierre Souchon, aujourd'hui journaliste à l'Huma et au Monde diplo, nous fait partager la misère de ses compagnons d'infortune, des paysans de la Drôme en train de disparaître ou des bourgeois satisfaits qu'il croise sur son chemin. On est foudroyé par l'humanité qui se dégage de ce livre plein de rage et de vie.

- "Mon père, ma mère et Sheila" (Stock) d'Eric Romand est une histoire d'enfance dans une banlieue populaire de Lyon à la fin des années 1970. Eric, le narrateur, rêve de devenir Sheila. Sheila, "la chanteuse à pédé"? ça ne plaît pas du tout au père, ouvrier brutal et macho. Raconté de façon fragmentaire avec de courts paragraphes, ce livre écrit avec pudeur rappelle combien il était (et reste parfois) difficile pour un jeune garçon de faire admettre son homosexualité. Le livre est souvent poignant. La lettre à son fils que le père laisse après s'être suicidé est troublante. Trouver les mots pour dire que l'on aime est parfois si difficile.

- "Ces rêves qu'on piétine" (L'Observatoire) de Sébastien Spitzer est le premier roman de la première rentrée littéraire de ce nouvel éditeur. L'auteur revient sur les derniers jours de Magda Goebbels, l'épouse du chef de la propagande nazie, dans le Berlin à feu et à sang de la fin de la guerre. En parallèle, alors que Magda s'enfonce dans la nuit on entend les voix de déportés s'élever des ténèbres.

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