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Dominique Blanc, une "jeune" pensionnaire de 59 ans à la Comédie-Française

Dominique Blanc a gardé la fraîcheur lumineuse d'une jeune fille et c'est "avec le trac" qu'elle fait son entrée, à 59 ans, à la Comédie-Française pour y incarner au printemps prochain Agrippine, un rôle tragique, comme celui de Perséphone, qu'elle joue ces jours-ci à Aix-en-Provence.

"La tragédie grecque devient mon identité, mon asile, je m'y sens chez moi!", confie-t-elle, toute souriante dans son chemisier clair, malgré la chaleur étouffante d'Aix où elle reprend du 5 au 19 juillet ce rôle de la fille de Zeus, enlevée par Pluton pour devenir reine des Enfers.

L'opéra est repris dans la mise en scène de Peter Sellars créée en 2012 à Madrid. Mais elle ne sera plus de la partie pour la prochaine étape à Lyon: Dominique Blanc aura intégré, à partir du 19 mars, la Comédie-Française pour y préparer "Britannicus", sous la direction de Stéphane Braunschweig.

Un "accomplissement", dit-elle. "J'ai le trac! j'ai envie d'être acceptée et j'ai envie qu'on m'aime évidemment". Dominique Blanc a pourtant une impressionnante carrière derrière elle. Elle a été la Phèdre de Patrice Chéreau (2003) avec Eric Ruf, actuel patron de la Comédie-Française, qui vient de l'embaucher. "Il a été mon Hippolyte", dit-elle, "cela nous lie à jamais".

De Chéreau, elle dit qu'il lui "manquera jusqu'au bout". 33 ans de cheminement commun ne s'effacent pas facilement, de "Peer Gynt" en 1981 à cette "Elektra" de légende, la dernière production de Chéreau qu'elle était venue voir spécialement ici, à Aix, juste avant son décès en octobre 2013.

"J'ai joué six fois avec lui, j'ai eu beaucoup de chance, la chance de le rencontrer à mes débuts, parce que dés le départ, ça vous introduit dans ce milieu et ça vous donne une exigence artistique incroyable", dit-elle doucement, émue.

Le 12 juillet, elle lira des textes de Patrice Chéreau au Musée Calvet au festival d'Avignon, à l'invitation de France Culture.

Fidèle en amitié, Dominique Blanc ne donne pas une interview sans citer également Nina Companeez, disparue en avril dernier, pour qui elle a tourné "des fictions magnifiques" à la télévision.

- 'Un rôle de méchante, quel bonheur!'-

Sa silhouette gracieuse, l'ovale fin du visage en amande ont été tour à tour ceux de Madame de Maintenon ("L'allée du roi") et Madame Verdurin ("A la recherche du temps perdu") dans les téléfilms de Nina Campaneez.

Quatre Césars et deux Molières ont couronné son talent à ce jour. Ce n'était pourtant pas gagné dès le départ: elle rappelle en souriant avoir raté "le concours du conservatoire plusieurs fois, et la rue Blanche aussi! Ca a été terrible, j'ai sangloté des jours entiers dans ma chambre de bonne et je ne me suis pas rendue dans le quartier du conservatoire pendant des années!"

C'est François Florent qui la "sauve" en la persuadant d'intégrer la fameuse classe libre du Cours Florent, pépinière de comédiens d'exception.

Et il lui prédit: "toi, Blanc, après trente ans tu n'arrêteras plus". Ce n'est pas aujourd'hui qu'elle va le démentir: avant "Britannicus", elle sera la marquise de Merteuil des "Liaisons dangereuses" mises en scène par Christine Letailleur, au TNB à Rennes, puis en tournée jusqu'en mars au Théâtre de la Ville.

Une perspective qui l'enchante: "Je vais me régaler, une vraie méchante, quel bonheur!"

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