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Le cinéma français perd l'une de ses figures: Claude Rich est décédé

Sourire gourmand et regard malicieux, le comédien Claude Rich, décédé jeudi soir, a vécu mille et une vies en 60 ans de carrière, des "Tontons flingueurs" à Panoramix au cinéma en passant par quelques grands personnages historiques au théâtre.

"Messieurs Claude Rich", comme l'avait surnommé le journaliste Claude Roy, était l'un des derniers "Tontons flingueurs" (1963). Il y incarnait l'impertinent Antoine, marié à la "nièce" de Lino Ventura.

Je n'ai jamais été un saint

Passionné d'histoire, Claude Rich, né le 8 février 1929 à Strasbourg, affectionnait les rôles de grands personnages - Talleyrand, Mazarin, Voltaire ou Blum. Il a joué au total dans une cinquantaine de pièces et près de 80 films.

"Je m'amuse beaucoup à faire ce métier, parce que je suis moi tel que je l'ai toujours été mais je suis aussi quelqu'un d'autre", confiait de sa voix subtile, un peu voilée, cet Alsacien grandi à Paris après la mort précoce de son père. "Je n'ai jamais été un saint", ajoutait-il avec une pointe de regret teinté d'ironie.

Catholique convaincu, il confessait avoir rêvé de jouer Charles de Foucauld (moine français mort en 1916) dont il a longtemps gardé la photo dans son portefeuille en raison de "son besoin d'absolu". Claude Rich restait marqué par son enfance - "je ne m'en suis jamais vraiment remis" - et sa mère, qu'il ne quittera que pour se marier avec la comédienne Catherine Renaudin avec laquelle il a eu deux filles, Natalie et Delphine.

A la Libération, il a quatorze ans et goûte le bonheur sur le boulevard Saint-Michel, où sa famille habite : "Je découvrais d'abord les filles, les femmes, je découvrais le chocolat, les Gauloises, tout ce qu'il y a d'extraordinaire!".

Il commence à travailler comme employé de banque mais lorgne sur le théâtre. En 1953, il sort du Conservatoire avec un deuxième prix de comédie.

Sur les planches, il jouera aussi bien l'aristocrate dans "Château en Suède" de Françoise Sagan (1960) que l'enfant dans "Victor ou les enfants au pouvoir" de Roger Vitrac (1963).

Le cinéma m'apporte beaucoup, mais le théâtre, c'est le vrai métier de l'acteur

Très vite, le cinéma l'appelle aussi, avec "Les Grandes Manoeuvres" de René Clair (1955). "Le cinéma m'apporte beaucoup, mais le théâtre, c'est le vrai métier de l'acteur", observait-il. "On vit au théâtre, avec la troupe, on va boire des verres, on dîne ensemble, on reparle de la représentation et on espère, le lendemain, refaire la même chose en progressant".

En 1975, pour le théâtre, il se lance dans l'écriture avec "Le Zouave". Le mauvais accueil de la critique ne l'empêche pas d'écrire trois autres pièces ("Un Habit pour l'hiver" en 1979, "Une chambre sur la Dordogne" en 1987 et l'adaptation du roman de Sandor Marai "Les Braises" en 2003).

Il contribue aussi au travail du dramaturge Antoine Rault pour lequel il est le philosophe Louis Althusser dans "Le Caïman" (2005), le cardinal Mazarin dans "Le Diable rouge" (2008) ou un scientifique faustien dans "L'Intrus" (2011).

En 1989, il campe un Talleyrand d'anthologie dans "Le Souper" de Jean-Claude Brisville. Mais c'est la transposition de la pièce au cinéma qui lui offre un César du meilleur acteur en 1993.

Au cinéma, il joue souvent les seconds rôles et passe du jeune premier des années 1960 à l'acteur élégant prisé des plus grands réalisateurs ("Le Crabe-Tambour" (1976), "L'Accompagnatrice" (1992), "Le Colonel Chabert" (1994). Il n'hésite pas à devenir le druide Panoramix d'"Astérix et Obélix" (2002).

"Il est comme un joueur de jazz qui fait chaque fois des variations différentes, pour le plaisir, pour épater", dit de lui Bertrand Tavernier avec lequel il a tourné plusieurs films et qui aime "sa jeunesse, sa folie, son inventivité", mais aussi "ses angoisses et ses doutes, sa discrétion" et puis "ses fous rires".

Actif sur les planches comme sur grand écran jusqu'à l'âge de 86 ans, sa dernière apparition au cinéma remonte au "Ladygrey" (2015) d'Alain Choquart.

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