Accueil Actu

Les tourments du grand âge de retour au théâtre

Au Théâtre du Petit Saint-Martin, à Paris, Nicole Croisille est Jeanne, retraitée acariâtre cloitrée dans sa solitude. Au Palais des Glaces, Anémone incarne Augustine confrontée aux affres de la maladie d'Alzheimer : entre rire et émotion, deux pièces abordent sans détour les tourments du grand âge.

"Dans le grand âge, le plus désespérant, ce sont ces retraités SDF que l'on voit parfois dans la rue... Il y a quelques années, j'ai eu la panique de cela. Une telle glissade peut arriver à n'importe qui...", confie à l'AFP Nicole Croisille.

Après avoir incarné "Irma la douce" l'an dernier, la comédienne et chanteuse qui a enchaîné les tubes dans les années 60 et 70, révélée par la chanson du film "Un homme et une femme", se transforme tous les soirs en fonctionnaire à la retraite, vivant seule dans une tour HLM. Son franc-parler et sa paranoïa l'ont progressivement coupée du monde.

"Mon personnage a +pété les plombs+... Moi pas encore!", ajoute la comédienne. "A 81 ans, je veux pousser le bouchon le plus loin possible avec ce rôle. Les années passent, c'est maintenant ou jamais!", estime Nicole Croisille.

"C'est vraiment le moment de prendre la tangente en jouant les emmerdeuses pour faire oublier la chanteuse sentimentale ! Après, la difficulté, c'est toujours de faire comprendre au public qu'on peut faire des choses très différentes...", ajoute la comédienne qui se retrouve par hasard dans le théâtre où elle a fait ses débuts aux côtés du mime Marcel Marceau, dans les années cinquante.

Un jour, Jeanne reçoit la visite d'une élue locale lui proposant de bénéficier du service d'aide à la personne. La retraitée accepte à contre-coeur. Dans une relation complexe, deux solitudes vont alors s'entrechoquer: la sienne et celle de l'employé chargé de lui porter chaque jour ses repas et de lui faire un peu de conversation.

- "Sensibiliser par le rire" -

Ecrite par Jean Robert-Charrier, jeune directeur du théâtre de la Porte Saint-Martin et du Petit Saint-Martin, et mise en scène par Jean-Luc Revol, cette pièce inédite, entre comédie et drame, est aussi une critique acerbe de l'électoralisme, avec une maire-adjointe cynique dont le seul but est de s'assurer un bulletin de vote.

"Malgré ses méchancetés et ambigüités, Jeanne est attachante. J'aurais pu la cantonner à cette femme âgée un peu pénible. J'ai eu envie de comprendre comment et pourquoi elle en est arrivée là", explique l'auteur.

Avec une tout autre approche, Anémone fête cinquante ans de carrière à l'affiche du Palais des Glaces avec "Les Noeuds au mouchoir", pièce de Denis Cherrer qui prend le parti d'évoquer la maladie d'Alzheimer dans une comédie douce-amère, mise en scène par Anne Bourgeois.

Confrontés à la perte d'autonomie de leur mère et au choix de la placer en maison de retraite médicalisée, les deux fils d'Augustine s'affrontent dans des moments cocasses et émouvants.

Avec le soutien de France-Alzheimer, l'auteur et son frère Pierre-Jean ont retranscrit de vrais dialogues avec leur propre mère confrontée à cette maladie dégénérative : "Par le rire, je pense que nous pouvons sensibiliser le public de façon différente", dit Denis Cherrer.

"Je ne sais plus qui j'aime et qui je suis... Pourquoi ce n'est plus comme avant ? Je voudrais qu'on m'explique...", lance la vieille dame, interprétée par une Anémone un peu jeune pour le rôle (67 ans), ex-pensionnaire du Splendid et César de la meilleure actrice en 1988 pour "Le Grand Chemin".

Ces dernières années, Michel Bouquet dans "Le Roi se meurt" et Robert Hirsch dans "Le Père", troublant de vérité, ont rempli les salles à Paris en tutoyant sur les planches la vieillesse, la maladie et la mort.

À la une

Sélectionné pour vous