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Magnifique plongée dans l'art Senufo au Musée Fabre de Montpellier

Le Musée Fabre de Montpellier propose à partir de samedi et jusqu'en mars une magnifique plongée dans l'art africain Senufo, qui marque son histoire, car depuis sa création, en 1828, jamais ce musée n'avait exploré les cultures extra-européennes.

"C'est une première", souligne Michel Hilaire, directeur du Musée. "Cela marque une volonté de se renouveler, de s'ouvrir à de nouveaux publics. Aujourd'hui le Musée a la maturité nécessaire pour accueillir un projet d'une telle envergure".

Pour sa première incursion hors d'Europe, ce musée de région, logé dans l'Hôtel de Cabrières-Sabatier d'Espeyran, au coeur de Montpellier, a décidé de s'immerger dans l'art de l'ensemble culturel et linguistique Senufo.

Composée de plus d'une douzaine de langues, présentes sur un territoire s'étendant sur la frontière de la Côte d'Ivoire, du Burkina Faso et du Mali, cette aire est connue en Afrique de l'Ouest comme "la région des trois frontières".

Ce faisant, le musée prend clairement "une dimension internationale", souligne Bernard Travier, vice-président de Montpellier Méditerranée Métropole, délégué à la Culture.

Un couple de statues en bois, d'une pureté saisissante, accueille le visiteur. "Ce sont des sculptures de référence de l'art Senufo", explique Constantin Petridis, commissaire de l'exposition, basée sur les recherches de l'historienne de l'Art Susan Gagliari (Université Emory à Atlanta).

Ce couple sculpté, qui, fait rare, n'a pas été séparé au gré des caprices du marché de l'art, "célèbre la complémentarité entre l'homme et la femme", explique M. Petridis.

- "fascination" et "inspiration" -

Considérés initialement comme ethnographiques, les objets fonctionnels et cultuels Senufo sont entrés dans l'histoire de l'art au début du 20ème siècle.

Les oeuvres Senufo sont pour l'essentiel non datées mais on estime qu'elles remontent à la fin du 19ème siècle et au début du 20ème siècle.

Les noms des artistes n'ont pas non plus été documentés, à l'exception d'une référence au "maître de Folona".

"L'Art africain, et plus particulièrement Senufo, a fasciné et inspiré les plus grands artistes d'avant-garde en Europe comme Picasso, Derain ou Léger", rappelle Michel Hilaire.

De grandes collections privées, comme celle d'Helena Rubinstein, ont contribué à sa renommée.

Parmi les Arts africains, les oeuvres Senufo demeurent actuellement les plus convoitées, l'une d'elles ayant atteint en 2014 le prix record de 12 millions de dollars.

L'exposition invite également à entrer dans deux univers secrets: la société masculine du Poro, chargée de l'initiation des jeunes garçons et des funérailles et celle du Sandogo, au sein de laquelle les femmes se livrent aux arts de la divination et de la guérison.

L'une des plus belles pièces de l'exposition représente une femme assise sur un tabouret, allaitant son enfant d'un sein long et pointu, renvoyant à la "Mère primordiale" du Poro.

Plus loin, une statue d'oiseau Calao au ventre arrondi, évoque avec une sobriété infinie ce gardien traditionnel de la fertilité, célébrant l'union et le dualisme homme/femme.

Les salles sont aussi peuplées d'impressionnants masques heaumes zoomorphes ou à plumes, chargés de chasser les mauvais esprits.

Dernière trouvaille particulièrement bienvenue du musée, à mi-parcours, un espace vaste et chaleureux baptisé "Senufo en jeu", à la fois de pédagogie, de lecture, et de repos, vient compléter une muséographie et une scénographie particulièrement réussies, offrant aux visiteurs de l'espace, de la sérénité, de la clarté et une proximité poignante avec des oeuvres d'une grande humanité.

L'exposition "Senufo, Art et identités en Afrique de l'Ouest", du 28 novembre au 6 mars 2016, illustre la montée en puissance du Musée Fabre, après le succès remarqué, en 2012, de "Corps et ombres: Caravage et le caravagisme européen".

Elle a été montée au sein du réseau de coopération FRAME (French Regional American Museum Exchange), qui regroupe 26 des plus grands musées régionaux français et nord-américains, et plus particulièrement avec le Cleveland Museum of Art, mais repose également sur un partenariat avec le Quai Branly.

Seule étape française et européenne de cette exposition, le Musée Fabre présente 160 objets d'art Senufo d'une grande variété stylistique, issus des collections publiques et privées d'une soixantaine de prêteurs à travers le monde.

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