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Souvenirs de Cannes: interview seins nus sur la plage

Pour la 70e édition du Festival de Cannes, l'AFP a recueilli, à travers le monde, les témoignages exclusifs de 70 personnalités du cinéma qui racontent leur premier Festival et/ou leur meilleur souvenir.

Voici notre cinquième série de témoignages:

- Le réalisateur tchadien Mahamat-Saleh Haroun:

"Il y a vingt ans, j'arrive à Cannes après onze heures de train, je ne vais passer qu'une seule nuit ici, il me faut absolument monter les marches. J'arrive à dégoter une invitation pour le film de Kiarostami +Le goût de la cerise+ (1997). Je foule enfin le tapis rouge. Rite d'initiation. Tu as le sentiment d’avancer au ralenti, comme si le temps était suspendu… L'immensité de la salle. Pour atteindre mon siège, situé au dernier rang, il me faut monter l'interminable escalier. Et en 2010, quand je me retrouve sur la scène pour recevoir le Prix du jury pour +Un homme qui crie+, ma première réaction a été de lever la tête vers les gens perchés là-haut. J'aime accroire que parmi eux un jeune cinéaste observe le spectacle avec des rêves plein la tête…".

- Le réalisateur brésilien Fernando Meirelles:

“La première fois, c'était pour +La Cité de Dieu+ (2002). Le film faisait du bruit et j’ai passé six jours à donner des entretiens et à recevoir des propositions pour diriger d'autres films. J’avais la sensation d'être renversé par un camion, mais cela m'a projeté sur la carte mondiale du cinéma. La deuxième fois, j'ai ouvert le festival avec +Blindness+ (2008), un film pas forcément adapté pour ça. Les critiques furent dures, ce qui a fini par mettre en péril le film. J’ai à nouveau eu l'impression d’être renversé par un camion".

- L'actrice portugaise Maria de Medeiros:

"Je crois que le premier festival de Cannes dans lequel j'étais en compétition était celui qui a valu à +Pulp fiction+ la Palme d'or (1994), c'était incroyable! J'avais l'impression de me retrouver au beau milieu d'un tsunami. Avec le temps, j'ai appris à apprécier le Festival, à m'amuser avec ce qui au début me faisait peur: le tourbillon médiatique, la tension, le rythme fou".

- Le réalisateur philippin Brillante Mendoza:

"Je suis venu pour la première fois en 2007 avec +John John+ à la Quinzaine des réalisateurs. Le seul fait qu'ils m'aient sélectionné était déjà écrasant, il y a eu seulement trois réalisateurs philippins sélectionnés à Cannes et la dernière fois c'était il y a vingt ans. Nous étions en retard à la projection et on a dû se faufiler par l'arrière de la salle. Je n'avais pas imaginé qu'il y aurait une telle ovation. Je me levais pour dire merci, et à chaque fois que je me rasseyais, les applaudissements redoublaient. J'en ai pleuré".

- L'actrice canadienne Monique Mercure:

"Après un long trajet depuis Montréal, j'avais rendez-vous sur la plage et la journaliste est arrivée seins nus pour m'interviewer. C'était absolument incroyable."

"Comme je jouais au théâtre, je suis restée seulement 36 heures à Cannes pour +J.A. Martin Photographe+ (pour lequel elle a eu le prix d'interprétation féminine en 1977, NDLR). Au lieu d'aller à la première, on s'est retrouvé sur la plage à boire du champagne avec le réalisateur Jean Beaudin et Marcel Sabourin (son partenaire dans film)".

- Le réalisateur égyptien Yousry Nasrallah:

"Les gens s'imaginent que c'est de la frime, la jet-set, non, c'est pas du tout ça. Cannes c'est beaucoup de travail, c'est extrêmement dur. C'est une énorme machine qui peut vous porter aux nues et qui peut vous broyer. On y est star pendant 36 heures, et après c'est +au suivant+".

"Mon meilleur souvenir, en tant que critique, c'est d'avoir assisté à 8H30 du matin à +La Cité des Femmes+ de Fellini (1980), avoir eu la chance de le rencontrer et de prendre un café avec lui. Pour quelqu'un qui veut faire du cinéma, ça vous donne le sentiment que +voilà, je peux le faire, je peux être cinéaste+".

- L'acteur américain Robert De Niro:

"J'ai été à Cannes huit ou neuf fois. J'ai toujours aimé son côté glamour, toute l'ébullition autour, son côté très spécial".

"Une année (en 1975), je suis venu pour +1900+ de Bertolucci avec Gérard Depardieu. Gérard et moi, on y est allé ensemble en voiture, et j'ai retrouvé Marty Scorsese. On était sur le point de commencer +Taxi Driver+".

- L'actrice espagnole Rossy de Palma:

"Mon meilleur souvenir, c'est quand Thierry Frémaux m'a appelée et m'a demandé +tu veux être membre du grand jury ? Cette année ce sont les frères Coen qui président+".

"C'était magique, et j'ai eu de graves problèmes de retour à la réalité ensuite. Vous voulez y rester, vous lever et voir des films, discuter avec vos passionnants compagnons de jury +qu'en as-tu pensé ?+… des débats, des repas de régal, des tenues merveilleuses que les créateurs font spécialement pour vous… a dream come true!".

- Le cinéaste franco-polonais Roman Polanski:

"C’était mon premier voyage à l'Ouest après le 20e Congrès du Parti communiste où Khrouchtchev avait dénoncé les crimes de Staline. On a commencé à laisser certaines personnes qui avaient de la famille à l’étranger, aller la visiter. J'ai eu mon passeport, je suis allé à Paris et me suis promis de visiter la Mecque des cinéastes qu'était pour nous le Festival de Cannes. A l'époque (1957), j'étais à l'école de cinéma de Lodz et Wajda, un de mes amis, présentait +Ils aimaient la vie+".

"Il s'est passé un épisode assez drôle, le jour de mon départ. Je n'ai pas pu prendre le bus. Il y avait un monsieur assez âgé avec une abondante chevelure blanche, accompagné d'une femme assez jeune qui a proposé de partager le taxi. J'ai dit oui car je ne voulais pas rater l'avion. On s'est présenté. Il m’a dit +mon nom est Abel Gance+. La femme était Nelly Kaplan. On a partagé le prix de la course. Il était probablement aussi fauché que moi".

Mon meilleur souvenir, c’est bien sûr la palme pour +Le pianiste+ (2002). Rien ne peut être plus fort à Cannes".

- L'acteur français Tahar Rahim:

"Mon premier festival, c'était avec +Un prophète+ (2009), et c'était en même temps mon premier film, ma première grande expérience. Donc on peut dire que l'acteur est un peu né là-bas. C'était comme être dans l'oeil du cyclone. Tout d'un coup, on est au centre de tout, les gens qui applaudissent, les lumières qui s'allument, tout le monde qui se lève. A ce moment là, on n'entend presque plus, on est presque sourd".

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