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Fin de la lune de miel entre Amazon et Wall Street?

Après avoir ravi les investisseurs depuis plusieurs trimestres grâce à ses performances dans le "cloud", Amazon a publié jeudi des résultats jugés décevants, malgré un sixième bénéfice net trimestriel consécutif.

Le géant américain de la distribution en ligne a annoncé avoir plus que triplé son bénéfice net au troisième trimestre comparé à un an plus tôt, à 252 millions de dollars, tandis que son chiffre d'affaires bondissait de 29% à 32,7 milliards.

Son action perdait pourtant plus de 5% dans les échanges électroniques suivant la clôture de la Bourse.

Le bénéfice par action, la référence aux Etats-Unis, a en effet atteint seulement 52 cents quand les analystes en espéraient 78.

"L'entreprise a largement raté ses prévisions de bénéfices", a expliqué Neil Saunders, président de la société de recherche Conlumino, estimant que les comptes de ce trimestre "défont une partie du récent progrès fait par Amazon sur le front des bénéfices, et le ramènent au même type de position qu'à la fin du dernier exercice".

Le groupe de Jeff Bezos privilégie depuis des années la croissance de ses parts de marché au détriment de ses marges, mais il avait surpris ces derniers trimestres en améliorant sa rentabilité, grâce essentiellement à sa filiale de "cloud" AWS.

Cette dernière, qui loue via internet de l'espace dans ses serveurs à d'autres entreprises souhaitant y stocker leurs données ou y faire tourner leurs services en ligne, a encore vu son chiffre d'affaires augmenter de 55% à 3,2 milliards de dollars au troisième trimestre, et son bénéfice d'exploitation doubler à 861 millions.

- Grosses dépenses -

Mais la politique de développement tous azimuts du groupe coûte beaucoup d'argent, que ce soit par exemple afin de produire des séries originales pour son service de vidéo en ligne, d'augmenter son réseau de livraison, ou encore afin de muscler les capacités de son assistant virtuel à intelligence artificielle Alexa. Les dépenses opérationnelles totales d'Amazon se sont ainsi envolées de 29% ce trimestre.

Par ailleurs, si les résultats des activités traditionnelles de commerce en ligne en Amérique du Nord progressent, celles à l'international ont plus que doublé leur perte d'exploitation, à 541 millions de dollars.

Le directeur financier, Brian Olsavsky, n'a rien fait pour atténuer les inquiétudes des investisseurs en indiquant lors de la traditionnelle téléconférence explicative avec des analystes que le groupe était en train d'accélérer ses investissements, et que cela continuerait l'année prochaine.

Les dépenses pour des contenus vidéo ou des campagnes marketing sur l'ensemble du second semestre seront notamment "presque doublées" comparé à un an plus tôt, a-t-il relevé.

Jeff Bezos, le patron-fondateur d'Amazon, ne participait pas à la téléconférence mais a évoqué dans le communiqué des "surprises" à venir concernant les capacités d'Alexa.

Lors d'un événement organisé plus tôt dans la journée par le Economic Club de New York, il a aussi défendu les investissements réalisés dans des séries originales pour son service de vidéo en streaming, qui se pose en rival de Netflix aux Etats-Unis et à commencé à s'étendre à l'étranger (Royaume-Uni, Allemagne, Japon et bientôt Inde).

"Ces séries sont coûteuses", a reconnu Jeff Bezos, mais quand "Transparent" ou "Mozart in the Jungle" gagne un Emmy Award, Amazon gagne des abonnés pour le service Prime, qui donne accès à son catalogue de contenus vidéo mais aussi à des livraisons gratuites pour les commandes dans ses boutiques en ligne. Et "quand on devient membre de Prime, on achète plus chez nous", a-t-il fait valoir.

Amazon ne divulgue pas le nombre d'abonnés de Prime. Mais d'après la société de recherche CIRP, ils étaient 65 millions fin septembre rien qu'aux Etats-Unis, soit 38% de plus qu'un an plus tôt, et dépensent effectivement 1.200 dollars par an en moyenne chez Amazon, contre 600 dollars pour les clients non abonnés.

Neil Saunders estime aussi que l'accélération des dépenses publicitaires pour des appareils comme les enceintes intelligentes pour la maison Echo, le produit le plus en vue intégrant Alexa, "pourrait payer durant les fêtes si Amazon arrive à persuader ses clients d'acheter ses derniers produits".

Le groupe a toutefois livré pour cette période cruciale des prévisions plutôt prudentes, entrouvrant la porte à des résultats moins bons qu'espérés jusqu'ici.

Il table sur un chiffre d'affaires total d'entre 42 et 45,5 milliards de dollars, contre 44,6 milliards anticipés par les analystes, et un bénéfice d'exploitation compris entre zéro et 1,25 milliard de dollars, contre 1,1 milliard un an auparavant.

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