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Les twictées, les dictées sur Twitter, exercice de style version 2.0

Sortez vos tablettes, twictée surprise! Se lancer des défis d'orthographe entre classes de différentes écoles, se corriger et échanger sur Twitter: les twictées réinventent l'exercice tant redouté de la dictée en version 2.0.

Ce matin de décembre, Christelle Prudon, l'institutrice des CM1 B de l'école Romain-Gary à Thiais (Val-de-Marne), a choisi deux phrases de circonstance pour la twictée: "Avant les vacances, nous faisons une dernière dictée. Nous sommes heureux car nous avons changé de copains pour les échanges."

Pour faire une twictée, prenez un récit de moins de 140 signes -la longueur maximum d'une publication sur Twitter- dictez-la à deux classes différentes (ou plus), qui vont se corriger mutuellement via le réseau social, en s'envoyant l'une à l'autre des tweets contenant des micro-leçons (appelées "twoutils").

La twictée passe par différentes étapes et peut durer plusieurs jours. Avant d'envoyer les versions de dictées, commence la fatidique "phase de négociation": par groupe de trois, les enfants doivent discuter de la bonne orthographe des mots.

A Thiais, Dionpolo, solennelle, tend un feutre à Samia et déclare: "Tiens, écris comment tu penses sur l'ardoise."

Cette dernière pense qu'il faut écrire "faisons", mais Dionpolo et Elyan, eux, votent pour "fesons". "Là, on va délibérer après avoir regardé dans le tableau de conjugaison", explique Dionpolo. Mais soudain, Elyan s'écrit: "En fait, on a tout faux! C'est +fécond+" en montrant du doigt le mot dans le dictionnaire.

"On travaille la communication, ils doivent faire appel à un argumentaire et un savoir-parler. Certains ont du mal à le faire de manière diplomatique", reconnaît Christelle Prudon.

Une fois la négociation terminée et tout le monde d'accord sur l'orthographe, chaque groupe envoie sa dictée en message privé à une classe d'une autre école, à 20 Km de là, les CM2 C de l'école de Chevry-Cossigny (Seine et Marne), alias @lesCM2c.

"Pourquoi on les envoie en message privé? demande la maîtresse aux élèves. Parce qu'il y aura peut-être des erreurs."

- Dédramatiser la dictée -

A Chevry-Cossigny, les élèves de Catherine Massicot ont fait de même de leur côté et s'emparent de leurs tablettes pour corriger les dictées des CM1 de Thiais (@CM1BRomainGary).

"On se sent un petit peu dans la peau d'une maîtresse, parce que c'est nous qui corrigeons", explique Lucas. Chaque groupe traque les erreurs et les corrige: "COPAINS s'écrit avec un s car il est au pluriel #accordGN" ou encore "DERNIERE s'écrit avec un "e" car c'est au féminin #lettrequichanteleson".

Le Graal? Un "twoutil" positif: "Bravo. Vous êtes des champions de l'orthographe #0erreur".

"Alors là, on est fier quand on reçoit un", confirme Lucas.

"On n'est pas dans une dictée avec des moins 15. L'idée, c'est vraiment de développer leur vigilance orthographique et qu'ils donnent une justification à l'erreur", explique Catherine Massicot. "C'est ce que nous, en tant qu'adultes, on fait quand on ne sait pas écrire un mot: quel est le sujet? quel est l'accord?"

Pour Fabien Hobart, alias @Karabasse77, l'un des créateurs de la twictée, il ne s'agit pas de se substituer à la dictée, mais de "rendre les dictées plus accessibles et moins effrayantes": "Là, ils développent un sentiment de sécurité par rapport à l'exercice, ça dédramatise la question de l'orthographe."

Gadget numérique? "Pas du tout, rétorque le père de la twictée, pas besoin d'être un geek, ni d'être suréquipé."

Question efficacité, les enseignants constatent souvent des progrès, mais surtout "ils se posent des questions sur la langue".

Environ 70 classes de la Belgique au Québec en passant par le Togo, participent aux défis twictées et Fabien Hobart confie réfléchir à une version anglaise.

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