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A Lviv, crise des ordures sur fond de lutte politique

Lviv, dans l'ouest de l'Ukraine, est surtout connue pour ses bâtiments majestueux, ses rues pavées et sa vieille ville remarquablement préservée. Mais depuis plus d'un mois, ce sont d'impressionnants tas d'ordures qui font sa notoriété.

Dans certaines banlieues de cette cité de 700.000 habitants, les poubelles n'ont pas été ramassées depuis mai. La puanteur fait fuir les touristes et la prolifération des rats menace la santé publique.

Les autorités locales et le gouvernement se rejettent mutuellement la responsabilité de cette crise alors que les déchets s'empilent dans la rue.

Début juin, des habitants ont bloqué plusieurs rues pour protester, certains allant jusqu'à mettre le feu aux tas de détritus.

"C'est une puanteur indescriptible! Certaines piles d'ordures sont si grandes qu'elles atteignent le deuxième étage" d'immeubles, raconte à l'AFP Maria Sidorovitch, une habitante de 58 ans qui n'ose plus ouvrir ses fenêtres malgré les 30 degrés en plein été.

"Nous avons des poubelles juste à côté du terrain de jeu. Les enfants n'y jouent plus depuis des semaines", ajoute-t-elle.

Les médecins partagent l'inquiétude des habitants, soulignant que la situation fait peser des risques sanitaires. "Si nous n'assurons pas le ramassage des ordures rapidement, nous pourrions avoir des conséquences dangereuses pour la santé des résidents", affirme à AFP le chef du département municipal de la Santé, Volodymyr Zoub.

"Une telle situation peut provoquer des infections intestinales. Dans ces conditions, le nombre de rongeurs porteurs des maladies dangereuses peut augmenter", prévient-il.

- 'Blocus des déchets' -

Alors que beaucoup d'habitants accusent la municipalité d'être incapable de gérer les ordures, le maire de Lviv et leader d'un parti d'opposition, Andriy Sadovyï, met lui en cause un "blocus des déchets" orchestré par les autorités ukrainiennes.

Les problèmes ont commencé en mai 2016, lorsque la principale décharge de Lviv a pris feu. Quatre pompiers y ont été tués en tentant de maîtriser l'incendie et la décharge a été fermée sur ordre des autorités.

"Mais depuis, nous avons des problèmes pour trouver un endroit où envoyer nos 600 tonnes d'ordures quotidiennes", explique M. Sadovyï, 48 ans.

"Alors qu'il y a quelque 5.500 décharges en Ukraine, je pensais que nous pourrions trouver une solution. Mais elles nous ont toutes fermé leurs portes, l'une après l'autre", assure-t-il.

Andriy Sadovyï accuse le gouvernement d'avoir mis la pression sur les propriétaires des décharges pour qu'ils n'acceptent pas d'ordures venant de Lviv. Selon lui, les autorités cherchent à le discréditer comme maire, mais aussi comme leader du parti d'opposition Samopomitch.

Car les relations entre le maire de Lviv et le président Petro Porochenko, anciens alliés, ne sont pas au beau fixe. M. Sadovyï et son parti ont quitté la coalition au pouvoir l'année dernière et rejoint les rangs de l'opposition.

"La raison (du blocus, ndlr) est que nous empêchons les autorités de réaliser des projets non démocratiques", affirme le maire de Lviv.

- 'Conflit politique' -

"C'est une question politique plus qu'économique", estime aussi l'analyste Vadym Karassiov qui dirige à Kiev l'Institut des stratégies globales.

"Si M. Sadovyï n'avait pas d'ambition politique nationale, le problème aurait été réglé beaucoup plus rapidement", explique-t-il à l'AFP.

Les autorités rejettent toutes ces accusations. Selon elles, la mairie de Lviv est la seule responsable de la crise des ordures.

Le Premier ministre Volodymyr Groïssman a toutefois dû intervenir quand trois députés du parti Samopomitch ont entamé une grève de la faim. Ils l'ont observée pendant six jours, demandant au gouvernement d'agir pour régler la crise des ordures.

M. Groïssman a notamment appelé les municipalités à aider Lviv à recycler ses ordures en les acceptant dans leurs décharges.

Et le gouvernement a promis d'octroyer 50 millions de hryvnias (1,7 million d'euros) pour la construction d'une nouvelle décharge dans la région de Lviv.

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