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Cannabis: une dépénalisation serait "un grand pas" en avant en France, selon un expert

Une dépénalisation du cannabis "serait un grand pas" en avant en France, estime le psychiatre et spécialiste des addictions, Laurent Karila, de l'Hôpital universitaire Paul-Brousse, qui est favorable aussi à un débat sur une "légalisation très contrôlée".

QUESTION: Faut-il dépénaliser le cannabis?

REPONSE: "Il faut repenser la politique de santé publique autour du cannabis. On est dans une politique de répression vis-à-vis des addictions et les jeunes Français sont au top européen de consommation de cannabis. On voit bien que cela n'a pas fonctionné!

La dépénalisation entraînerait la modification de la loi de 1970 qui interdit strictement la consommation de cannabis. Toutes les drogues sont mêlées dans cette lois, il n'y a pas de distinction. On pourrait dire qu'au vu des avancées des données médicales, des avancées des données scientifiques, certains produits peuvent être moins nocifs que d'autres. Et ne pas traiter le cannabis de la même façon que la cocaïne, les opiacés ou les amphétamines.

La loi a plus de 40 ans et n'est plus applicable. Il faut tout revoir, il faut tout repenser. La dépénalisation serait une première étape pour revoir les choses. Ce serait un grand pas en France."

Q: Au-delà de la dépénalisation, faut-il légaliser le cannabis?

R: "Dans un second temps, un travail de légalisation -- c'est-à-dire rendre légal le cannabis comme le sont l'alcool et le tabac aujourd'hui -- devra se faire, mais de façon très contrôlée.

De toute façon, ça ne veut pas dire que c'est la porte ouverte à tout, qu'on fume des joints dans la rue, etc...

Mais seule une légalisation pourrait générer de l'argent qui pourrait être utilisé pour la prévention et les soins. On ne pourra aborder la question de la qualité du cannabis vendu et des taxes (sur ce produit) qu'avec une légalisation. On en est loin en France. Mais pourquoi pas ?

Les résultats de la légalisation dans d'autres pays ne sont pas négatifs. Certains états américains ont légalisé, de manière contrôlée, le cannabis. Ça rapporte de l'argent, ça permet de développer d'autres choses en terme de santé publique, de développement, de recherche, en terme de soins."

Q: Qu'entendez-vous par une légalisation "très contrôlée" ?

R: "Il faut protéger les jeunes, car c'est là qu'est le vrai problème. Le cannabis est maintenant une maladie de l'ado, de l'adulte jeune.

Un cerveau est mature vers 20/25 ans. Avant, si vous consommez des psychotropes qui se fixent sur le cerveau, vous modifiez un peu l'architecture du cerveau.

En premier lieu, la consommation de cannabis chez un jeune a des répercussions plutôt sociales. Mais si le jeune est vulnérable à des maladies psychologiques, comme l'anxiété ou la dépression, le cannabis peut réveiller, aggraver les choses.

Il faut également protéger les populations vulnérables aux drogues, les populations qui ont des risques de maladies psychiatriques car la consommation de tout type de drogue aggrave la maladie.

Et, bien sûr, prendre en compte la conduite sous l'emprise de stupéfiants, quelle que soit la drogue. Autre point important: en France, on est pas en Jamaïque. On fume le cannabis avec du tabac. Donc, on a les risques liés au tabac qui s'associent à la consommation de cannabis."

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