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Les Académies des sciences veulent éviter un divorce entre science et société

Les Académies des Sciences d'une soixantaine de pays, qui se réuniront mardi à Paris, ont rédigé un manifeste invitant la science et la société à ne pas "s'ignorer ou se combattre" mais "à évoluer en symbiose", selon le texte dont l'AFP a eu copie.

Pour ses 350 ans, l'Académie des sciences a invité les académies étrangères dont elle est partenaire à se rassembler au musée du Louvre pour réaffirmer ensemble les "valeurs portées par la science", a déclaré Catherine Bréchignac, secrétaire perpétuel de l'Académie des Sciences.

Ces valeurs sont notamment "l'universalisme, la tolérance, l'esprit critique, la soif de connaître et de comprendre", selon l'Académie.

Le président François Hollande doit intervenir dans la matinée devant une centaine de présidents et de vice-présidents de ces académies et une quarantaine d'ambassadeurs en poste à Paris.

"Pour les 300 ans de l'Académie des Sciences, le général de Gaulle avait invité les académiciens et leurs correspondants étrangers à une réception au Grand Trianon", rappelle la physicienne.

"Nous, nous avons choisi d'inviter les académies étrangères à rappeler les valeurs de la science à travers ce manifeste rédigé collectivement". Une démarche "inédite", selon elle.

Sous le titre "Science et confiance", le manifeste juge "primordial que nos sociétés s'appuient sur la démarche raisonnée de la pensée scientifique pour répondre de manière responsable aux questions d'aujourd'hui et aborder demain avec sérénité".

La science, "maîtrisée dans ses applications, consolidée au profit des populations - et non à leur détriment - est à même de répondre à bien des défis", selon le texte. Mais elle ne peut "répondre à tout".

"A l'inverse chaque regain d'obscurantisme constitue une régression majeure pour nos civilisations", selon le texte.

Le manifeste est une initiative de l'Académie des sciences française. Elle a rédigé une première esquisse, qui a circulé pendant l'été entre ses partenaires qui ont amendé le texte.

- "Prendre le temps" -

"Il y a parfois des incompréhensions, réciproques, entre la société et la science", relève Mme Bréchignac.

"Les scientifiques ne font pas toujours l'effort d'expliquer aux gens les avancées de la connaissance". "Et il arrive que la société prenne peur face à l'utilisation des résultats scientifiques".

"Il faut absolument éviter de faire croître ce déphasage", estime l'ancienne présidente du CNRS.

"Les scientifiques doivent être à l'écoute de la société, et comprendre où sont ses inquiétudes".

"Nous vivons une phase difficile avec la rapidité de la communication actuelle; les réseaux sociaux diffusent parfois des informations non validées qui font peur". "Penser prend du temps."

"Quand il y a de nouvelles découvertes, c'est enthousiasmant. Il ne faut pas pour autant essayer de les utiliser à toute vitesse pour ensuite se dire que nous sommes allés trop loin."

"Si on peut revenir en arrière, ce n'est pas grave. Tout le monde peut se tromper. Mais nous devons éviter de nous lancer dans des orientations nuisibles et irréversibles pour la société", souligne Mme Bréchignac.

"Il faut notamment prendre le temps en ce qui concerne les manipulations génétiques". Par exemple, le nouvel outil Crispr-Cas9, sorte de ciseaux de l'ADN, est une "technologie intéressante mais son utilisation doit passer par l'éthique".

Pour établir un climat de "confiance" entre la société et la science, "je propose que chacun fasse un pas vers l'autre", dit Mme Bréchignac. C'est-à-dire que la société entende les scientifiques et que ceux-ci écoutent la société".

Au cours de cette "Journée mondiale des sciences", les représentants des académies discuteront en outre de plusieurs "défis du futur".

"La croissance démographique est vertigineuse. Cela perturbe considérablement l'équilibre de la planète", estime Mme Bréchignac.

Autre défi: la révolution numérique et l'essor de la robotique, avec leur impact sur l'emploi.

Les académies parleront aussi "environnement, ressources et recyclage".

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