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Sur les vélins du Muséum, arts et sciences intimement mêlés

Un trésor rarement visible: le Muséum national d'histoire naturelle dévoile au public à partir de mercredi une partie de sa fabuleuse collection de dessins de plantes et d'animaux réalisés sur vélin à partir du XVIIe siècle.

De grande qualité, ce parchemin très fin et très blanc est obtenu à partir d'une peau de veau mort-né. Les peintres miniaturistes ont réalisé leurs planches à la gouache et à l'aquarelle.

Intitulée "Précieux vélins. Trois siècles d'illustration naturaliste", l'exposition, qui se tient jusqu'au 2 janvier, présente 120 vélins, à raison de 40 par mois. Fragiles, les oeuvres ne doivent pas être exposées longtemps à la lumière.

"C'est la première fois de son histoire que le Muséum expose autant de vélins simultanément", déclare Pascale Heurtel, conservateur en chef au MNHN et commissaire de l'exposition.

Pourtant, ce n'est que la pointe émergée de l'iceberg. Au total, la collection compte 7.000 vélins, tous de même format (46 cm sur 33 cm).

Ils sont classés dans 107 portefeuilles non reliés conservés sur les étagères de la Bibliothèque centrale du Muséum.

Tout a démarré dans le jardin botanique de Gaston d'Orléans au château de Blois. Frère de Louis XIII, ce passionné de plantes fait réaliser un catalogue d'espèce rares.

Il engage vers 1630 le peintre graveur Nicolas Robert pour qu'il reproduise les fleurs, les légumes et les oiseaux de la volière du château.

A la mort du Prince, Louis XIV hérite de la collection de vélins. Colbert le convainc de la poursuivre. Nicolas Robert (1614-1685) passe au service du roi. "C'est un immense peintre d'histoire naturelle", souligne Mme Heurtel.

D'autres peintres miniaturistes lui succèdent comme Jean Joubert ou Claude Aubriet dont on peut admirer un homard bleu.

"On attend de ces peintres l'exactitude scientifique, la sûreté du trait, le talent d'observation car ces planches "doivent être utiles", relève Mme Heurtel.

Mais il y a aussi "une part de mise en scène" de l'espèce observée et "il faut être un excellent aquarelliste".

- Egalement un livre d'art -

Après la Révolution, les portefeuilles au nombre d'une soixantaine quittent la bibliothèque royale pour le Muséum national d'histoire naturelle, créé en 1793. Celui-ci poursuit la collection mais demande aux peintres d'opter soit pour la botanique soit pour la zoologie.

Pierre-Joseph Redouté (1759-1840), surnommé "le Raphaël des fleurs", est remarquable par "la légèreté de son style et la transparence inégalée de ses aquarelles", note Mme Heurtel.

La collection s'étoffe. Ce sont les professeurs qui décident en assemblée des sujets à traiter et acceptent ou non l'entrée d'un vélin dans la collection.

Les peintres chargés des vélins sont professeurs de dessin naturaliste au Muséum.

Au XIXe siècle, la collection est très utilisée. "Des trous de punaise sur certains montrent que les professeurs des différentes disciplines les empruntaient pour leur cours", pointe Mme Heurtel, en charge de la bibliothèque du Muséum. "Mais à ma connaissance, il n'y en a qu'un qui a été perdu", ajoute-t-elle.

A la fin du XIXe siècle, la réalisation de vélins ralentit fortement, notamment avec l'apparition de la photographie, moins coûteuse et disponible immédiatement.

"Il y a ensuite un bref renouveau dans les années 1950 pour renouer avec la tradition", explique Alice Lemaire, conservateur à la bibliothèque du Muséum.

Et quelques tentatives à nouveau dans les années 2000. Mais les résultats n'ont pas été jugés très satisfaisants.

L'exposition s'accompagne de la parution d'un livre co-produit par l'éditeur d'ouvrages d'art Citadelles & Mazenod et le MNHN. Il sera disponible à partir du 12 octobre.

Il reproduit en couleur plus de 800 vélins de la collection. Tiré à 2.200 exemplaires, il compte plus de 600 pages et sera vendu 430 euros.

"Ce livre était en gestation depuis plus de quinze ans", relève Mme Heurtel.

Les prises de vue ont été réalisées par un photographe de la RMN (Réunion des musées nationaux) qui a été chargé de photographier pour l'occasion la totalité de la collection. Celle-ci est désormais entièrement numérisée.

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