Accueil Actu

Crash de Smolensk: la Pologne entame l'exhumation des victimes

La justice polonaise entame lundi l'exhumation des victimes de la catastrophe aérienne de Smolensk, en Russie, ayant coûté la vie au président Lech Kaczynski en 2010, une décision qui soulève l'opposition de certains de leurs proches.

L'objectif prioritaire mais non officiel semble être de chercher sur les corps des traces d'explosifs ou de brûlures.

La première enquête officielle réalisée par l'ancien gouvernement libéral a conclu que l'accident était dû à des erreurs humaines et à de mauvaises conditions météo. Mais le parti Droit et Justice (PiS) du frère jumeau du chef de l'Etat tué, Jaroslaw Kaczynski, pense qu'une déflagration est survenue à bord de l'appareil avant qu'il ne s'écrase dans l'ouest de la Russie.

Le parquet, de son côté, dit chercher à vérifier l'identité des victimes - quelques autopsies effectuées en Pologne après la catastrophe ont révélé plusieurs erreurs à cet égard - et à préciser les causes de leur décès.

Ainsi, plus de six ans après les faits, la Pologne se pose encore la question de savoir s'il s'est agi d'un accident ou d'un attentat.

Le nouveau pouvoir en place depuis un an à Varsovie a ordonné une nouvelle enquête, tandis que Moscou refuse toujours de remettre à la Pologne l'épave de l’avion et les boîtes noires originales.

Les proches des victimes sont divisés quant aux exhumations.

Une demi-douzaine de familles ont communiqué au parquet national leur opposition, mais se sont vu répondre qu'une exhumation ne peut être contestée en justice. La démarche est justifiée, selon les procureurs, par "de graves erreurs et omissions" au cours de l'enquête de 2010 et les faiblesses de la documentation fournie par la Russie.

En octobre, plus de 200 proches représentant les familles de 17 des 96 victimes ont protesté contre les exhumations dans une lettre ouverte au président Andrzej Duda, se disant "seuls et désemparés face à un acte cruel et impitoyable".

M. Duda a répondu dans un entretien avec l'agence de presse PAP, demandant à ces familles de manifester de "la compréhension" à l'égard des procureurs qui "ont l'obligation légale" de procéder à l'exhumation.

- 'Chasse aux indices' -

Les exhumations doivent d'abord concerner l'ancien chef de l'Etat et son épouse, dont les dépouilles reposent dans une crypte du château royal de Wawel, à Cracovie (sud). Quatre-vingt-trois corps au total devraient être réexaminés. Les autres ont été soit déjà autopsiés en Pologne, soit incinérés.

Les restes du couple présidentiel, exhumés en présence de Jaroslaw Kaczynski et de la fille du défunt chef de l'Etat, Marta Kaczynska, de prêtres et aussi d'un représentant de la commission d'enquête créée par le ministère de la Défense, doivent être transportés à l'Institut médico-légal de l'Université Jagellonne de Cracovie. Ils devraient être remis dans la crypte vendredi prochain, mais l'étude des prélèvements peut prendre jusqu'à quatre mois.

Le parquet national prévoit de procéder à dix exhumations avant la fin de l'année. L'ensemble de ces opérations risque de durer jusqu'à un an environ, selon lui. Des experts suisses, portugais et danois doivent y participer.

Pour le journaliste Pawel Deresz, qui a perdu à Smolensk son épouse, la députée Jolanta Szymanek-Deresz, "ces exhumations sont une sorte de chasse aux indices pour prouver la théorie absurde de l'attentat contre le président Lech Kaczynski".

Le PiS soupçonne notamment l'ancien Premier ministre libéral Donald Tusk, adversaire politique de Jaroslaw Kaczynski, d'avoir voulu cacher la vérité sur ce qui s'est passé le 10 avril 2010.

Pour Anna Materska-Sosnowska, politologue à l'université de Varsovie, les exhumations donneront du grain à moudre au PiS qui a promis à ses électeurs de tout faire pour que les causes de la catastrophe soient révélées.

Mais rien n'est pour l’instant venu remettre sérieusement en cause la thèse de l’accident.

Le chef du Parti paysan (PSL, opposition), Wladyslaw Kosiniak-Kamysz, a appelé lundi le président Duda à "stopper" les exhumations quand la famille de la victime concernée y est opposée.

À la une

Sélectionné pour vous