Accueil Actu

Dans la Syrie en guerre, de l'aide russe pour survivre

Avec son fils dans les bras, Souleiman Barbar observe anxieusement un camion d'où deux militaires russes déchargent des paquets blancs. Quand soudain son regard s'illumine: son épouse a pu obtenir de quoi manger pour quelques jours.

A 31 ans, ce père de famille compte pour survivre sur l'aide alimentaire russe aux habitants de Rastane, ville de la province de Homs dans le centre de la Syrie.

Devant le camion, une vingtaine de médias internationaux emmenés à Rastane par l'armée russe assistent à la distribution, où se pressent une centaine de personnes, avec une nuée d'enfants aux vêtements poussiéreux.

Tous reçoivent un paquet qui contient notamment du riz, de la farine et du lait condensé, orné des drapeaux syrien et russe et du slogan "La Russie avec vous", en cyrillique.

Dans un pays ravagé depuis 2011 par une guerre qui a fait plus de 350.000 morts, détruit les infrastructures et laminé l'économie, quelque 6,5 millions de personnes souffrent d'insécurité alimentaire, selon le Programme alimentaire mondial (PAM).

Appuyé depuis 2015 par l'aviation de l'allié russe, le régime de Bachar al-Assad est parvenu à reprendre aux rebelles et jihadistes de vastes pans du territoire en lançant des assauts destructeurs et en imposant des accords de capitulation.

La ville de Rastane a été reprise entièrement en mai par le régime, qui a fait évacuer les rebelles et leurs familles vers d'autres zones insurgées, plus au nord.

"Pendant la guerre, c'était très dur. Nous n'avions pas assez à manger ni à boire", explique Souleiman Barbar, les yeux alourdis de cernes. "Maintenant qu'il y a cette aide, ça va mieux".

- Travail à perte -

La Russie livre une fois par jour à Rastane de l'aide alimentaire, affirme à l'AFP le porte-parole de l'armée russe, le général Igor Konachenkov. "Nous continuerons jusqu'à ce que la situation alimentaire s'améliore: cela peut prendre encore plusieurs mois une fois la guerre terminée".

Pour le seul mois de juillet, le PAM a distribué des aides à plus de trois millions de personnes en Syrie. "La flambée des prix de la nourriture et du carburant, la stagnation des salaires, la perte de revenus et une baisse de la production agricole ont entraîné une insécurité alimentaire généralisée dans tout le pays", selon l'organisation internationale.

Dans la ferme d'Ahmed Ali al-Tawil, à Arzah, près de Hama (centre), 15 à 20 ouvriers agricoles s'activent, des déplacés et des réfugiés tout juste rentrés de l'étranger. D'autres ont loué un lopin de terre et le cultivent pour nourrir leur famille.

La petite exploitation d'un hectare revient de loin. "Les combats avaient lieu à 5 km d'ici et lorsque les tirs étaient trop intenses, les ouvriers ne pouvaient pas venir", raconte M. Tawil, au milieu de son verger, où il assure avoir trouvé des mines.

Aujourd'hui, il dit "travailler à perte". "Nos fruits se vendent à des prix très bas car nous ne pouvons pas exporter en raison des sanctions" de l'Union européenne et des Etats-Unis.

Il se réjouit cependant d'avoir réalisé une belle récolte cette année, avec "beaucoup de pluie, ce qui est parfait pour les pommes de terre et les fruits".

- Bonbons au souk -

Pour le Premier ministre syrien Imad Khamis, "le développement du secteur agricole est une priorité". L'agence officielle Sana a dévoilé un plan pour développer l'agriculture avec entre autres une exonération de certaines taxes pour les projets agricoles familiaux.

Entre 2006 et 2010, la Syrie avait connu l'une de ses pires sécheresses, poussant des milliers d'habitants à quitter la campagne et provoquant une hausse des prix des denrées alimentaires.

Dans le centre historique de Homs, où les carcasses en béton d'immeubles pilonnés côtoient les minarets parsemés d'éclats, le gouverneur Talal Barazi a organisé une visite du souk pour les journalistes.

Au coeur de la "capitale de la révolution", le marché pluricentenaire était méconnaissable après un assaut du régime qui a repris la ville en 2014. Il possède désormais une arcade flambant neuve, où quelques rares commerçants étalent leurs marchandises devant les caméras.

A 45 ans, Mohammad tient un magasin de sucreries, ouvert en 1929 par son arrière grand-père, qu'il a reconstruit par la force de ses mains en 2015 pendant huit mois.

"Bien sûr, les affaires ne sont pas les mêmes. Les prix sont bien plus élevés et peu de gens peuvent acheter de la nourriture, encore moins des bonbons", dit-il à l'AFP, estimant avoir perdu environ 30% de sa clientèle d'avant-guerre.

"Mais nous sommes contents, nous avions cru ne jamais pouvoir revenir".

À lire aussi

Sélectionné pour vous