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Dépourvue de pétrole, la Jordanie se tourne toujours plus vers le solaire

Dans le sud d'Amman, des centaines de panneaux font briller les toits des mosquées: la Jordanie s'oriente de plus en plus vers l'énergie solaire pour tenter de réduire sa dépendance aux hydrocarbures, dont elle est dépourvue et qu'elle doit importer massivement.

"Avant, je payais 12.000 à 13.000 dinars par an de factures d'électricité (de 17.000 à 18.500 dollars), et 2.000 à 3.000 dinars par mois (3.000 à 4.500 USD) en été et en hiver. A présent, ma facture s’est sensiblement réduite", se réjouit l'imam Adnane Yahya, de la mosquée Hamdan al-Qarra, à Amman.

Le lieu de culte a été équipé de 140 panneaux solaires en début d'année, ce qui lui permet de produire près de 44 kilowatts (KW) pour un coût de 32.000 dinars (45.700 dollars).

Cela suffit à alimenter la mosquée, d'une capacité de 1.500 fidèles, qui utilise jusqu'à 50 climatiseurs, 35 ventilateurs, plus de 120 lampes, 32 caméras, ainsi que des microphones.

"Avant, durant l’été, les fidèles se plaignaient de la chaleur et nous demandaient d’augmenter la climatisation. Mais, aujourd'hui, ils nous disent de la baisser car ils ont froid", raconte, tout sourire, l’imam à la grande barbe blanche.

Ce lieu de culte compte parmi les 380 mosquées et églises équipées de panneaux solaires dans le royaume, selon le ministère de l’Energie.

La Jordanie, qui importe 98% de son pétrole et s’appuie de longue date sur les énergies fossiles pour exploiter ses centrales électriques, s'efforce de réduire sa dépendance à l'or noir, grâce aux énergies propres.

- Mosquées, écoles, hôtels... -

Dans ce pays semi-désertique, le solaire occupe une place prépondérante et, ces dernières années, des panneaux solaires ont fleuri un peu partout, sur les toits des mosquées mais aussi des écoles, des universités, des hôtels, ainsi que des usines et des villas.

L'an dernier, deux centrales solaires ont été inaugurées dans les camps de Zaatari et Azraq, qui accueillent des dizaines de milliers de réfugiés syriens.

La province de Maan, à 200 km au sud d'Amman, a vu naître 11 projets d'énergie verte, dont la plus grande centrale solaire du pays, "Shams Maan".

Gérée par la société jordanienne Kawar Jordan Investments, le Qatari Nebras Power QSC et le Japonais Mitsubishi, elle a coûté 170 millions de dollars et produit 52,5 mégawatts (MW), grâce à 640.000 panneaux photovoltaïques.

Pour Hanna Zaghloul, le directeur général de Kawar Energy, filiale du groupe Kawar, le solaire doit permettre à la Jordanie de gagner son "indépendance" énergétique.

"La Jordanie est qualifiée pour accueillir de tels projets. Ici, le soleil brille 320 jours par an. Les résultats sont très encourageants, et le secteur peut créer des centaines d’emplois", ajoute-t-il à l'AFP.

- "Changement rapide" -

"La Jordanie connaît un changement (...) rapide", se félicite la ministre jordanienne de l’Energie, Hala Zawati. "Avant 2012, nous n’avions aucune réglementation, ni loi dans ce domaine", dit-elle à l'AFP.

A présent, le pays possède "800 MW de capacité de production grâce à ces ressources, dont 600 MW pour le solaire et 200 MW pour l'éolien".

Selon la ministre, "cela équivaut à 1,1 milliard de dollars d'investissements étrangers" --en référence aux projets mis en oeuvre par des sociétés étrangères--, et représente 7% de l'énergie consommée en Jordanie.

Le chemin de l'indépendance énergétique reste donc long.

D'ici fin 2019, la ministre prévoit toutefois un quasi doublement de la production, à environ "1.500 MW", pour "près de 2,3 milliards de dollars d’investissements étrangers".

L'objectif est d'atteindre "20% de l'électricité consommée" par le pays à l'horizon 2020, poursuit Mme Zawati,qui fait en outre valoir la réduction significative du coût des énergies renouvelables ces dernières années.

"Aujourd’hui, un kilowatt d’énergie solaire coûte environ quatre centimes, en baisse constante", soit "moins de la moitié du coût d'un kilowatt tiré des dérivés pétroliers", note-t-elle.

L'ancien ministre d'Etat aux Affaires économiques, Youssef Mansour, aujourd'hui à la tête de l'entreprise "Envision Consulting Group" partage ce constat: "Il faut profiter de cette énergie propre, peu chère, et largement disponible".

A ce jour, alors que le royaume traverse une situation économique difficile, sa facture pétrolière dépasse encore trois milliards de dinars (4,5 mds USD) par an.

Les projets actuels "contribuent aux efforts pour équilibrer le budget. Ils mèneront l’État vers plus d'indépendance énergétique", souligne-t-il lui aussi.

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