Accueil Actu

Soupçons de discrimination à Disneyland Paris: le parquet requiert la relaxe

Les offres d'emplois exigeaient la "nationalité européenne" pour pouvoir postuler: le parquet a requis la relaxe d'Euro Disney, exploitant du plus grand parc d'attractions d'Europe, qui a comparu mercredi pour discrimination à l'embauche devant le tribunal correctionnel de Meaux (Seine-et-Marne).

Le parc d'attraction, accusé par des associations de "doser" la présence de Noirs et de Maghrébins parmi ses 15.000 employés, a lui plaidé mercredi son "exemplarité" en matière de diversité.

En cause: une annonce de casting pour la parade à Disneyland Paris, publiée à trois reprises en 2006 dans le journal gratuit 20 Minutes, chaque fois avec la mention excluant les candidats non-européens.

Après neuf ans de procédure, ce n'est pas l'amende de 225.000 euros maximum qui inquiète le groupe au 1,3 milliard d'euros de chiffre d'affaires, première destination privée de tourisme en Europe.

Au président, qui lui demande son avis sur la tenue de ce procès, Sophie Matelot, de la direction juridique d'Euro Disney répond: "Nous sommes une cible médiatique, (..) cette plainte est un moyen de faire parler de soi".

Derrière elle, les parties civiles à l'origine de la procédure: pour SOS Racisme et la Maison des Potes-Maison de l'égalité, impliquées dans plusieurs procédures judiciaires contre Euro Disney, dont une instruction ouverte depuis 16 ans, cette audience publique est déjà une première victoire.

D'un côté, Euro Disney assure qu'il ne s'agit ici que d'une "erreur humaine", un "cas unique" et une formulation "maladroite et incomplète".

De l'autre, Samuel Thomas, vice-président de le Maison des Potes, voit dans ce faux-pas du premier employeur privé d'Île-de-France un lapsus révélant des pratiques dissimulées pour assurer un recrutement des salariés conforme à la clientèle du parc, en majorité européenne.

- 100 nationalités, 20 langues parlées -

"Le recrutement des +Cast Members+ (les salariés d'Euro Disney, NDLR) opérationnels prend en compte les différentes nationalités des visiteurs", affirme un bilan social d'Euro Disney 2007, cité à l'appui de la plainte.

"Il y a une théorie selon laquelle il faut limiter +la dose+ de la population noire et maghrébine pour ne pas gêner la clientèle", lance à la barre Samuel Thomas, invoquant des témoignages, non versés au dossiers. "Dans cette instruction, il manque le vécu, le récit des employés", regrette d'ailleurs le président, approuvé par des parties civiles scandalisées par les lacunes de l'enquête.

Dans le bilan social de 2007, les employés étrangers sont classés suivant des catégories telles que: "Afrique hors Maghreb", "Afrique Maghreb", "Autres Antilles", "Europe (Ouest) dont Français".

"C'est une réclamation des représentants du personnel, qui souhaitaient vérifier le respect de la diversité", justifie Mme Matelot.

"Voilà le paradoxe de cette procédure: savoir si la diversité est représentée et les discriminations évitées dans un pays où il est illégal de faire ce genre de statistiques", explique le président, Olivier Protard.

"La diversité est une réalité chez nous qu'on vit bien", se défend encore Mme Matelot, mettant en avant "l'exemplarité" de son groupe en la matière: 100 nationalités, 20 langues parlées, des prix de la diversité et une instance interne en charge des discriminations.

"On confond diversité et discrimination", lui répond Samuel Thomas. "Ce sont les entreprises qui ont le plus fort taux de diversité qui pratiquent le plus la discrimination", assure-t-il.

Bien que l'infraction soit constatée, le parquet requiert la relaxe pour l'entreprise. Selon le procureur, il n'est pas établi que le cadre ayant rédigé l'annonce a commis l'infraction au titre de "représentant" de l'entreprise plutôt qu'en son nom propre.

Ce dernier, qui n'était ni poursuivi ni cité à comparaître, n'était pas présent à l'audience.

Le jugement a été mis en délibéré au 7 juin.

À la une

Sélectionné pour vous