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Investissements: le gouvernement salue, peut-être trop vite, un indicateur encourageant

"Le moteur de la reprise est en train de s'allumer": le gouvernement a été prompt mercredi, et peut-être trop prompt selon les économistes, à saluer l'annonce par l'Insee d'une forte progression des prévisions d'investissement des industriels.

Les chefs d'entreprise de l'industrie manufacturière anticipent une hausse de 7% de leur investissement en 2015, d'après les résultats d'un sondage trimestriel mené par l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), et publié mercredi.

Le ministre des Finances Michel Sapin n'a pas manqué de s'en féliciter immédiatement: "C'est un moteur durable de la reprise qui est en train de s'allumer. C'est la cohérence et la continuité de notre politique qui permettra de le confirmer", estime-t-il dans une déclaration écrite.

Cette estimation des industriels est en hausse de 4 points par rapport à leur prévision précédente, datant de janvier, selon l'Institut. Qui souligne toutefois que les investissements industriels, même moteurs pour l'activité économique, ne représentent qu'un quart de l'investissement productif en France.

Les plus optimistes sont les industriels des transports, qui ont relevé leur prévision de 9 points par rapport à janvier, suivis par ceux de l'agro-alimentaire (+4 points), et les "autres industries" (+3 points).

Moins enthousiastes, les patrons des industries de biens d'équipement ont au contraire baissé leur prévision de 2 points. Cette baisse assombrit le tableau d'ensemble: les achats de biens d'équipement, notamment les machines, sont en effet un indicateur important du moral à plus long terme des patrons.

Dans l'ensemble toutefois, cette publication soulage le gouvernement, qui a fait du redémarrage de l'investissement la grande priorité économique de la fin du mandat de François Hollande.

L'enquête de l'Insee a été menée en avril, au moment où l'exécutif annonçait une salve de nouvelles mesures de soutien aux entreprises, en plus de baisses de charge et d'impôts de quelque 40 milliards d'euros déjà promises.

Le gouvernement a ajouté un coup de pouce de 2,5 milliards d'euros, étalé sur plusieurs années, et permettant d'augmenter les déductions fiscales liées à des investissements.

Si la croissance française montre des signes de frémissement cette année, et pourrait dépasser 1% contre seulement 0,4% en 2014, elle reste surtout soutenue jusqu'ici par des données externes (euro faible, pétrole bon marché, conditions de financement avantageuses). Et surtout elle est impuissante à faire refluer le chômage.

Pour que la reprise s'installe véritablement, cela passe selon les économistes par une reprise des investissements des entreprises, déprimés depuis plusieurs années.

une embellie "largement à confirmer"

A cet égard, si la publication de l'Insee est un bon signal, elle n'est pas non plus la garantie d'un redémarrage, souligne Philippe Waechter, économiste de Natixis Asset Management.

"L'année dernière, nous avions eu une embellie similaire de cette enquête, qui avait fait long feu", avertit-il. La reprise de l'investissement en 2015 reste pour M. Waechter "largement à confirmer, parce que la dynamique industrielle des derniers mois n'est pas flamboyante".

Comme pour illustrer son propos, les équipementiers automobiles installés en France ont ainsi annoncé mercredi une hausse de leurs ventes, mais une nouvelle contraction de leurs effectifs.

Et il y a une semaine exactement un grand nom de l'industrie française, le fabricant de tubes sans soudure Vallourec, avait annoncé la suppression de 2.000 postes dans le monde d'ici 2017 dont 600 en France.

Un autre indicateur publié mercredi incite également à la prudence: il s'agit du sondage mensuel de la société d'études économiques Markit auprès de cadres dirigeants d'entreprises françaises, les directeurs des achats.

Cet indice montre que si l'activité économique française reste tout juste en expansion, elle ralentit depuis le début de l'année et surtout, selon Dominique Barbet, économiste de BNP Paribas, elle est "en retrait de la reprise en zone euro".

D'autres pays européens, en particulier l'Espagne et Italie, ont selon Markit de meilleurs perspectives de croissance.

M. Waechter s'enthousiasme tout particulièrement pour la dynamique à l'oeuvre en Italie, où selon lui le chef de gouvernement "Matteo Renzi donne de la profondeur, donne de la perspective, aux consommateurs comme aux chefs d'entreprise".

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