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La BCE rassure sur la croissance mais ne baisse pas la garde

La Banque centrale européenne a estimé jeudi que la reprise économique en zone euro était "de plus en plus solide" et moins entachée de risques, mais sans laisser présager une fin prochaine de sa politique très interventionniste.

Les chiffres récents "confirment que la reprise cyclique de l'économie de la zone euro est de plus en plus solide et que les risques ont continué à diminuer", a déclaré Mario Draghi, le président de l'institut monétaire, lors d'une conférence de presse à Francfort.

La reprise est "solide et large" dans l'ensemble de la zone géographique, a insisté le banquier italien, mais l'inflation en zone euro demeure à un niveau inférieur à celui désiré par l'institution.

En mars, l'inflation en zone euro a reflué à 1,5% par rapport au chiffre de 2% affiché un mois auparavant, lequel était conforme à l'objectif de la BCE à moyen terme d'une progression des prix à la consommation légèrement inférieure à 2%.

Mais pour M. Draghi, l'inflation doit "converger durablement" vers les 2%, un message laissant clairement entendre que l'institut monétaire juge prématuré d'infléchir sa politique de soutien à l'économie.

- Finir le travail -

De fait, la BCE n'a touché jeudi ni à ses taux directeurs, à leur plus bas niveau historique depuis mars 2016, ni à son vaste programme de rachats de dettes, le "QE", lancé en mars 2015.

La BCE a par ailleurs promis de garder ses instruments traditionnels, les taux, à leur très bas niveau pendant encore longtemps et elle n'envisage pas de les modifier avant la fin du programme d'achats de dettes.

"Notre impression est qu'il y a un assez large consensus au sein du conseil des gouverneurs pour 'finir le travail' ", commente Frederik Ducrozet, économiste chez Pictet.

"Pour l'heure, la BCE semble vouloir simplement regarder la reprise gagner en amplitude sans changer sa politique monétaire. La BCE semble prête à agir uniquement quand et si la plus forte reprise commence à conduire à des prix plus élevés", renchérit Carsten Brzeski, économiste chez ING Bank.

La France doit élire un nouveau président dans dix jours, avec d'importantes répercussions en cas de victoire de la candidate du Front National. Mais M. Draghi a balayé ce risque politique de la main, affirmant que la politique monétaire ne se décide pas en fonction de "possibles résultats électoraux."

Concernant les risques pesant sur la croissance en zone euro, la BCE considère d'ailleurs qu'ils sont moins liés à des facteurs domestiques qu'à des éléments mondiaux, comme la montée du protectionnisme. Avec prudence, après la réunion de printemps du FMI, M. Draghi estime cependant que la ligne protectionniste de l'administration Trump est en train de s'atténuer.

- Critiques allemandes -

Le patron de l'institution de Francfort s'est montré indifférent aux critiques de plus en plus vives venues en particulier d'Allemagne, où des élections générales se tiendront en septembre et où le ministre des Finances Wolfgnag Schäuble a récemment égratigné la politique très interventionniste de la BCE.

L'économiste allemand Marcel Fratzscher, président de l'institut DIW, a défendu quant à lui la ligne de M. Draghi mais a craint qu'elle ne soit "instrumentalisée" lors de la campagne législative pour "créer un sentiment anti-européen" et "rendre la BCE responsable des erreurs de la politique", selon un communiqué.

Certains membres du conseil des gouverneurs, notamment le président de la Bundesbank Jens Weidmann, plaident pour qu'à défaut de réviser sa politique, l'institution monétaire adapte rapidement sa communication face aux derniers développements de l'inflation et à l'embellie économique à l'oeuvre en zone euro.

Les experts attendent désormais qu'un changement de discours de la BCE soit opéré lors de la prochaine réunion du mois de juin, sur la base des nouvelles prévisions d'inflation et de croissance pour la zone euro.

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