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Levothyrox: Merck condamné, "une reconnaissance pour les patients"

"Enfin une reconnaissance pour les patients": le tribunal de grande instance de Toulouse a ordonné mardi aux laboratoires Merck de délivrer "sans délai" son ancienne formule du Levothyrox à 25 malades de Haute-Garonne, sous peine d'astreinte, lors du premier jugement dans cette affaire, auquel le fabricant pharmaceutique a aussitôt décidé de faire appel.

Cette décision civile ne concerne que 25 des 90 plaignants qui s'étaient plaints des effets secondaires du nouveau Levothyrox et réclamaient de bénéficier de l'ancienne formule, dénommée Euthyrox, pour se soigner. Le juge des référés de Toulouse s'est déclaré incompétent pour les 65 patients résidant à l'extérieur du département de Haute-Garonne.

"C'est une première brèche! Locale, certes, mais on peut espérer qu'elle fera jurisprudence", a salué Béate Bartès, présidente de l'association Vivre sans thyroïde, voyant dans ce jugement "une véritable bouffée d'air pour les malades", selon un courriel à l'AFP.

"C'est une première. On ne s'y attendait pas", a renchéri Chantal L'Hoir, fondatrice-présidente de l'Association française des malades de la thyroïde (AFMT), car, dit-elle à l'AFP, tous les référés en matière sanitaire ont jusque-là échoué. Elle pense "qu'il va y avoir des répercussions".

"C'est enfin une reconnaissance pour les patients", s'est félicitée Sylvie Chereau, la responsable du collectif Levothyrox, qui avait introduit ce référé devant le juge toulousain. Mais "il y a dans ce dossier des zones d'ombre qui nous dépassent", a estimé la jeune femme ne comprenant toujours pas pourquoi la France avait décidé l'abandon du Levothyrox, alors que l'ancienne formule du médicament est toujours disponible chez nos voisins européens.

A l'audience, le 8 novembre, l'avocat des plaignants Jacques Lévy avait parlé de "véritable scandale sanitaire".

"Certains ont vu leurs cheveux tomber, d'autres avaient des envies suicidaires, ou des problèmes gastriques", a énuméré Me Levy affirmant que "dans les trois mois qui ont suivi la mise sur le marché de la nouvelle formule, plus de 9.000 patients ont fait un signalement de pharmacovigilance" pour dénoncer les troubles.

Dans le jugement que l'AFP s'est procuré, le tribunal de Toulouse ordonne à Merck de fournir à 25 malades de Haute-Garonne, "par le biais des circuits de distribution et de commercialisation, sans délai" l'ancienne formule. Il a assorti sa décision d'une astreinte de 10.000 euros par jour et par infraction constatée.

"C'est une pression considérable pour les contraindre à livrer le produit", a réagi Me Lévy.

A l'audience, le juge s'était transporté dans une pharmacie pour constater l'absence de l'ancien médicament.

"Il n'y a pas de problème d'approvisionnement que vous soyez sous la nouvelle formulation ou sous l'ancienne", a déclaré à l'AFP le PDG de Merck France, Thierry Hulot, annonçant son intention de faire appel du jugement.

- Deuxième importation d'Euthyrox -

Face à la colère des patients, l'ancien médicament prescrit à 3 millions de personnes en France pour traiter des pathologies thyroïdiennes avait fait son retour début octobre dans les pharmacies françaises, mais en quantités limitées.

Le PDG de Merck France a indiqué qu'il restait "encore 40.000 boîtes" d'Euthyrox sur les 200.000 boîtes déjà importées, "de quoi traiter 20.000 patients".

Il a en outre annoncé avoir décidé une "deuxième importation d'Euthyrox", à la demande de l'ANSM, l'agence du médicament, pour "laisser plus de temps" aux patients "qui avaient rapporté une altération de leur qualité de vie" avec la nouvelle formulation du médicament.

Ces 200.000 boîtes supplémentaires seront "disponibles à la fin de l'année" pour permettre aux patients de renouveler leur ordonnance de trois mois début janvier, a-t-il expliqué.

"Où était donc l'urgence d'aller prendre une ordonnance en référé d'heure à heure pour 25 d'entre eux?", s'est demandé M. Hulot, annonçant toutefois des mesures pour ces 25 patients de Haute-Garonne en attendant "le jugement d'appel".

Il s'agit de la première décision judiciaire dans cette affaire, mais plusieurs procédures restent en cours.

La nouvelle formule du Levothyrox a suscité plus de 300 plaintes, ce qui a conduit la justice à ouvrir une enquête. Des perquisitions ont eu lieu au siège de Merck à Lyon et au siège de l'ANSM. A Lyon, une autre audience civile est prévue le mois prochain dans le cadre d'une action collective d'une centaine de malades.

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