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Première émission d'obligations laborieuse pour la Grèce d'Alexis Tsipras

La Grèce a bouclé mercredi sa première émission d'obligations depuis l'arrivée de la gauche radicale au pouvoir, dans des conditions laborieuses tenant à l'incertitude autour des négociations sur sa dette.

L'agence publique gérant les émissions de dette a indiqué avoir vendu pour 812,5 millions d'euros d'obligations à échéance de 6 mois, avec un taux d'intérêt de 2,75%.

L'opération était vouée à être scrutée sous toutes les coutures, venant d'un pays "en faillite", à en croire une interview de son ministre des Finances Yanis Varoufakis dans la presse allemande diffusée mercredi.

La Grèce ne se finance depuis 2010 que grâce à de très fréquents emprunts de quelques mois, et à l'aide internationale, là où la plupart de ses partenaires européens empruntent confortablement pour dix ans ou plus, à des taux toujours plus bas.

Par rapport à la dernière émission datant de début janvier, avant les élections, la levée de fonds s'est révélée plus difficile pour Athènes.

Le taux de janvier s'était établi à 2,30%. Un taux d'intérêt en hausse montre une défiance des investisseurs. A titre de comparaison, la France emprunte aujourd'hui sur cette échéance de six mois à un taux négatif (environ -0,1% lors d'une vente de titres lundi), ce qui signifie que les investisseurs la payent pour lui confier leurs deniers.

La demande mercredi pour les titres grecs s'est aussi révélée moins soutenue qu'en janvier, avec un ratio de couverture, c'est-à-dire la proportion de demande des investisseurs par rapport à l'offre d'obligations, de 1,30, contre 1,58 en janvier. Plus ce ratio est élevé, plus l'émission a suscité d'intérêt.

Des obligations à échéance de "six mois, c'est long dans le cas de la Grèce", souligne René Defossez, stratège à la banque Natixis, pour qui "même ces bons à court terme, dont on sait bien qu'ils sont achetés par les banques grecques essentiellement, ont du mal à partir".

La Grèce est condamnée depuis des années à n'emprunter qu'à très court terme : sa dernière émission sur l'échéance reine pour les titres obligatoires, à 10 ans, remonte au 11 mars 2010, juste avant qu'éclate la crise de la dette.

- Hausse "justifiée et attendue" -

L'émission de mercredi s'est faite dans un contexte de grande incertitude autour de l'issue du marathon de négociations engagé par le gouvernement grec avec ses créanciers, et après des informations de presse peu rassurantes.

Selon le Financial Times, la Banque centrale européenne, un maillon essentiel dans la stratégie de désendettement imaginée par Athènes, serait sur une ligne dure. L'institution de Francfort, qui a reçu mercredi matin la visite du ministre des Finances Yanis Varoufakis, refuserait en particulier d'accorder à Athènes une rallonge financière, en laissant l'Etat émettre jusqu'à 25 milliards d'euros de dette à court terme cette année, au lieu du plafond de 15 milliards en vigueur jusqu'ici, et déjà atteint.

Pour Panayotis Petrakis, professeur d’économie financière à l’université d’Athènes, la hausse du taux sur l'émission de mercredi "est justifiée et attendue". "Elle montre que le marché devient plus prudent, ce qui est normal après ce changement politique". Cet économiste rappelle que la Grèce "avait traversé des moments beaucoup plus difficiles lors de l'émission des bons à court terme pendant la crise il y a quelques années".

Pour M. Defossez, le marché "est nerveux et le restera" jusqu'à ce que la BCE précise ses intentions, mais il ne part pas en vrille". Selon lui, deux stratégies expliquent ce calme relatif du monde financier : "soit, et c'est l'hypothèse optimiste, les marchés partent du principe qu'une solution va être trouvée. Soit, au fond, ils se disent qu'une sortie de la Grèce de l'euro, ne serait pas si grave", tout en étant "dramatique pour les Grecs".

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