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"Confident royal", l'amitié entre la reine Victoria et son serviteur indien vue par Stephen Frears

Le réalisateur britannique Stephen Frears conte l'histoire de l'amitié méconnue et indéfectible entre un Indien, roturier et musulman, et la reine Victoria dans "Confident royal", un film à la fois drôle et sensible dans les salles mercredi.

Le dernier opus du réalisateur de "The Queen" (2006) et de "Liaisons dangereuses" (1988) avait été présenté en septembre à Venise (sous son titre original "Victoria & Abdul").

L'histoire "tirée de faits réels... pour l'essentiel" débute en 1887 au château de Windsor lors des célébrations des 50 ans de règne de Victoria (alors âgée de 68 ans) interprétée par une magistrale Judi Dench. La distribution compte plusieurs grands comédiens du cinéma britannique comme Michael Gambon, Simon Callow et Timothy Pigott-Smith décédé en avril, et auquel le film est dédié.

Quand le regard du jeune serviteur "importé" des Indes Abdul Karim, incarné par la star bollywoodienne Ali Fazal, ose croiser celui de Victoria, toute la cour d'Angleterre est scandalisée.

A la manière candide des "Lettres Persanes" de Montesquieu, Abdul et son acolyte Mohammed s'adonnent à des commentaires cocasses sur les moeurs "tout à fait barbares" du pouvoir colonial qui "exploite un quart du genre humain".

Victoria, veuve depuis peu, isolée par le pouvoir, entourée de courtisans qui l'ennuient, est aussitôt séduite par la beauté et l'exotisme du jeune homme, et décide d'en faire son "munchi", professeur de langue ourdou.

Leur relation était-elle de l'amour? "L'attitude de la reine Victoria est complexe. Il ne s'agit pas juste d'un sentiment amoureux qu'elle éprouve, mais du bonheur de se sentir détendue avec quelqu'un, d'apprendre auprès de lui", avait souligné Judi Dench, 82 ans, à Venise. Pour les besoins du rôle, elle a dû porter des robes immenses semblables à celles que portait la souveraine, devenue obèse pendant les dernières années de son règne.

- Du curry à la Mostra -

"J'ai dit que je n'aurais réalisé ce film qu'avec Judi Dench et, par chance, elle a accepté", avait souligné Stephen Frears, 76 ans, pour tourner cette histoire qu'il dit avoir découverte: "Je ne connaissais pas l'histoire de la reine Victoria et d'Abdul, ni l'affection qu'elle portait à son serviteur indien."

A la stupéfaction générale, Abdul partage peu à peu avec la souveraine une intimité exceptionnelle qui durera jusqu'à son décès en 1901. Abdul la rassure et la fait rêver en lui parlant de ses Indes lointaines dont est elle est l'impératrice.

Le récit est adapté et scénarisé par Lee Hall ("Billy Elliot") d'après "Confident royal", livre de Shrabani Basu, journaliste et historienne britannique, qui vient de paraître en France.

"Je connaissais l'existence d'Abdul Karim depuis la lecture d'un livre sur l'histoire du curry en Grande-Bretagne", a déclaré Shrabani Basu dans un entretien à l'AFP. "Je savais que la reine Victoria adorait la cuisine au curry et qu'elle était entourée de serviteurs indiens".

Mais en 2001, en visitant Osborne House, la propriété de vacances de Victoria sur l'île de Wight, elle est attirée par "un portrait d'Abdul Karim dans le couloir indien". "Il ne ressemblait pas du tout à un serviteur", poursuit-elle. Et puis, elle remarque sa photographie dans le vestiaire de la reine. "J'ai alors compris que c'était quelqu'un de spécial".

En 2006, elle entame des recherches intensives sur le mystérieux personnage, notamment dans les archives de Victoria, en particulier dans les carnets de la souveraine.

"Ces carnets m'ont renseignée sur la nature de leur relation", précise l'auteure, qui était aussi invitée à la Mostra de Venise.

Elle s'est rendue en Inde, à Agra la ville d'Abdul et à Karachi, au Pakistan, où elle a retrouvé ses journaux intimes.

A travers cette histoire de la fin du XIXe siècle, Stephen Frears évoque des sujets tels que le multiculturalisme, les classes sociales et le racisme qui résonnent encore aujourd'hui.

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