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Attentats en Espagne: voici le récit de l'incroyable course pour tuer des djihadistes

Ils avaient décidé de frapper très fort en Catalogne, et une manipulation d'explosifs a fait échouer leur plan initial. Mais les djihadistes ont tout mis en oeuvre pour poursuivre leur mortelle entreprise, tuant 15 personnes.

L'histoire est racontée dans l'ordonnance de placement en détention de deux suspects inculpés mardi soir, deux des quatre membres présumés de la cellule encore vivants. Si la maison où ils entreposaient les explosifs n'avait pas sauté il y a une semaine, des Barcelonais et des touristes ne seraient sans doute plus en vie.

Le 16 août, le Marocain Driss Oukabir, 27 ans, louait une camionnette à Sabadell, près de Barcelone. Un autre membre de la cellule, Mohamed Hichamy, faisait de même avec une deuxième fourgonnette. Le soir même, vers 23h00, trois personnes, dont l'imam marocain Abdelbaki Es Satty, 44 ans, qui les aurait tous radicalisés, et deux jeunes s'affairaient dans cette maison, une discrète bâtisse entourée d'oliviers située à Alcanar, à 200 kilomètres au sud-ouest de Barcelone.


Un nuage "en forme de champignon"

Au début du mois, des membres du groupe avaient notamment acheté 500 litres d'acétone. Ils préparaient les bombes qui devaient servir à un double attentat, avec les deux camionnettes louées la veille. Mais quelque chose a mal tourné "pendant la manipulation des engins explosifs", selon l'ordonnance. L'explosion a été si forte qu'elle a suscité un nuage "en forme de champignon".

Deux occupants sont morts sur le coup: l'imam et un deuxième homme, Youssef Aalla, même si dans son cas l'expertise ADN n'a pas encore parlé. Mohamed Houli Chemlal, 21 ans, mis en examen mardi soir pour "assassinats en relation avec une entreprise terroriste", a survécu. Selon le récit qu'il a fait aux enquêteurs, il se trouvait "dehors, sous le porche, après le dîner", ce qui l'a sans doute sauvé.


Des indices matériels de leurs projets criminels

Dans les décombres, la police a découvert les indices de leurs projets criminels: "Une grande quantité de bonbonnes de butane, de l'acétone, de l'eau oxygénée, du bicarbonate, une grande quantité de clous qui devaient être utilisés comme mitraille et des détonateurs pour déclencher l'explosion". Certains de ces ingrédients permettent de fabriquer du TATP, explosif prisé du groupe Etat islamique, qui a revendiqué les attentats.

La police a aussi découvert un texte glissé dans un livre de couleur verte. "Au nom d'Allah.... Brève lettre des soldats de l'Etat islamique dans la terre d'Al-Andalous (l'Espagne quand elle était sous domination musulmane, ndlr) à l'attention des croisés, des haineux, des pécheurs...".

Le lendemain, le 17, est déclenché un "plan B" improvisé, faute des bombes qui devaient selon Mohamed Houli servir à viser un "monument".


Younès Abouyaaqoub tue 13 personnes sur les Ramblas 

Une Kangoo est louée dans la matinée. Mais l'un des terroristes a un accident, à 15h25, non loin de la station balnéaire de Cambrils, à 120 kilomètres au sud de Barcelone. Le véhicule est abandonné.

La fourgonnette louée le 16 par Driss Oukabir sera bien utilisée deux heures plus tard à Barcelone par Younès Abouyaaqoub. Vers 17h00, en zigzaguant à vive allure sur les Ramblas de Barcelone sur 700 mètres, il tue 13 personnes et en blesse 120. Ce Marocain de 22 ans s'enfuit à pied sans être inquiété, traversant le marché couvert de la Boqueria puis rejoignant la cité universitaire, où un ingénieur a eu la malchance d'avoir garé sa voiture. Il le poignarde mortellement pour dérober sa voiture, selon les enquêteurs. Il force un barrage de police puis disparaît après avoir abandonné la voiture.


Cinq djihadistes foncent sur la promenade à Cambrils 

L'acte III se produit vers une heure du matin le 18. Auparavant, à 21h26, des membres de la cellule ont acheté quatre couteaux et une hache à Cambrils. Puis cinq des djihadistes prennent l'Audi A3 du grand frère de l'un d'entre eux et foncent sur la promenade. Ils tombent sur un barrage de police. Descendent de voiture armés des couteaux et de la hache. C'est là qu'ils tuent une femme d'un coup de couteau et blessent six autres personnes, avant d'être abattus par la police. Ils portaient de fausses ceintures d'explosifs.

Les cinq jeunes abattus, tous marocains, ont grandi dans la petite ville catalane de Ripoll au pied des Pyrénées. Ils ont 17 ans (Moussa Oukabir), 18 ans (Saïd Aallaa, qui a emprunté la voiture de son frère), 24 ans (Mohamed Hichamy). On ignore l'âge des deux autres (Omar Hichamy et Houssaine Abouyaaqoub). Younès Abouyaaqoub, en fuite, sera finalement tué par la police lundi après-midi, dans une région de vignobles à une cinquantaine de kilomètres de Barcelone. 

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