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Berlin embarrassé par l'arrestation d'un officier allemand

L'arrestation cette semaine d'un militaire allemand se faisant passer pour un réfugié syrien et soupçonné de préparer un attentat contre des étrangers tourne au scandale dans le pays, pour l'armée et le système de contrôle des migrants.

Suite à l'incarcération jeudi de cet officier avec le grade de lieutenant, stationné en France, la Bundeswehr se voit accusée de ne pas suffisamment lutter contre les tendances d'extrême droite dans ses rangs.

Surtout, les critiques pleuvent contre l'administration chargée de gérer le flux sans précédent de réfugiés arrivés dans le pays depuis 2015.

- 'Histoire de fous' -

"Cette affaire est totalement étrange, une histoire de fous", a commenté un élu de la gauche radicale allemande, André Hahn, après une première audition, vendredi, au Parlement du contrôleur en chef de l'armée sur le sujet.

L'officier, dont l'identité n'a pas été révélée, a été arrêté jeudi.

Il est soupçonné, peut-être avec l'aide d'un autre homme de 24 ans, d'avoir préparé un attentat à l'arme à feu après avoir mené une double vie pendant plus d'un an.

Les médias évoquent un possible attentat contre des réfugiés ou une autre cible en faisant porter la responsabilité à des migrants. Le quotidien Bild parle d'une "liste" retrouvée par la police de personnes à tuer, notamment des militants de gauche.

Il avait réussi à se faire passer pour un demandeur d'asile syrien et à obtenir en novembre, après un entretien, ce statut de l'Office allemand des migrations, pourtant censé procéder à de strictes vérifications.

Ce statut lui a permis de percevoir 400 euros d'aide sociale par mois, ainsi qu'un logement, en plus de sa solde d'officier de 3.200 euros.

L'affaire est particulièrement embarrassante pour les ministres de l'Intérieur Thomas de Maizière et de la Défense Ursula von der Leyen, mais aussi pour Angela Merkel.

Son gouvernement a promis, après notamment des attentats islamistes commis dans le pays par des réfugiés, de renforcer les contrôles sur l'identité et le parcours des demandeurs d'asile, dont plus d'un million sont arrivés depuis 2015.

- Le gouvernement critiqué -

"M. de Maizière et Mme von der Leyen n'arrivent pas à tenir leurs administrations. (Ils) sont un risque pour la sécurité" du pays, a tonné une responsable du parti social-démocrate, Katarina Barley.

Ce n'est qu'après une première interpellation récente en Autriche, où il était venu récupérer une arme illégale, que la police allemande s'est intéressé à l'officier.

Fait particulièrement troublant, selon plusieurs médias, l'officier a réussi à tromper la vigilance de l'administration chargée de l'asile alors qu'il s'est présenté début 2016 comme un Syrien répondant au nom de David Benjamin, une identité peu crédible pour un ressortissant d'un pays arabe.

Il a affirmé être un Syrien chrétien d'origine française et parlé à l'Office des Migrations en français, qu'il connaissait du fait de son stationnement dans une base franco-allemande près de Strasbourg (est de la France). A aucun moment l'administration n'a vérifié s'il parlait arabe.

Le ministère de l'Intérieur a reconnu une "erreur" et promis de "retourner jusqu'à la dernière pierre (...) pour comprendre comment cela a pu arriver et, s'il y en a, corriger les défaillances" du système, a souligné son porte-parole Tobias Plate.

Samedi, Thomas de Maizière a annoncé avoir ouvert une enquête au sein de l'Office.

Le renseignement militaire est accusé de ne pas avoir fait son travail pour déceler la double vie de l'officier mais surtout ses tendances xénophobes, révélées par le contenu de sa messagerie sur son téléphone portable.

Selon Der Spiegel, la Bundeswehr disposait pourtant "depuis 2014 d'éléments sur (ses) opinions d'extrême-droite" : alors en formation à l'école militaire française de Saint-Cyr, il avait rédigé un travail universitaire parsemés de propos nationalistes et extrémistes, qualifié de "non compatible avec l'ordre libéral et démocratique" par un enseignant et dont l'armée allemande a eu vent, écrit l'hebdomadaire.

Et ce alors que la Bundeswehr a été plusieurs fois dans le passé ébranlée par des affaires sur la présence de sympathisants d'extrême droite dans ses rangs.

Un "groupe de coordination" entre les ministères de la Défense et de l'Intérieur va enquêter, a précisé samedi Ursula von der Leyen, pour qui "l'extrémisme" "n'a de place ni dans la Bundeswehr ni dans la société" allemande.

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