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"Il a essayé de nous soudoyer avec de l'argent": l'un des "héros" de l'Allemagne raconte comment ils ont ligoté l'homme suspecté de vouloir commettre un attentat

D'Angela Merkel à la police en passant par les réseaux sociaux: les trois Syriens qui ont permis l'arrestation de leur compatriote suspecté de vouloir commettre un attentat en Allemagne, dans des trains et dans l'un des aéroports de Berlin, étaient érigés en héros lundi, coupant l'herbe sous le pied des anti-migrants.

"Je célèbre le fait qu'un Syrien livre une personne soupçonnée de terrorisme. Et vous Pegida et les autres ?" a raillé Julia Frick sur Twitter, en référence à ce mouvement qui organise depuis deux ans des manifestations contre les réfugiés et les musulmans.

Il a proposé de les soudoyer avec de l'argent

Jaber Albakr a été livré pieds et poings liés dans la nuit de dimanche à lundi par trois Syriens qui l'ont hébergé dans leur appartement à Leipzig avant de réaliser, en voyant un avis en rentrant de la piscine, qu'il s'agissait de l'homme recherché par toutes les polices du pays depuis samedi. Une fois arrivé à l'appartement, ils l'ont ligoté. "Il a essayé de nous soudoyer avec de l'argent. Nous lui avons dit qu'il pouvait nous donner autant d'argent qu'il voulait, nous ne le laisserions jamais partir", a témoigné l'un d'eux, Mohamed A., auprès de la chaîne de télévision allemande RTL, lors d'une interview filmée de dos, l'homme affirmant craindre d'éventuelles représailles. Selon le journal Bild, le fugitif a proposé 1.000 euros et 200 dollars à ses compatriotes. "J'étais vraiment en colère contre lui, je ne peux pas accepter ça, surtout ici en Allemagne, le pays qui nous a ouvert ses portes", a-t-il ajouté, ses propos étant traduits de l'arabe en allemand par RTL.

La police ne les a pas tout de suite compris

Mohamed et ses amis ont alors contacté alors la police, mais au début, ils ont eu du mal à se faire comprendre, car il n’y avait pas d’interprète au commissariat. "D’abord, j’ai téléphoné, mais ils ne comprenaient rien. Alors j’y suis allé et j’ai essayé de leur expliquer que la personne qu’ils recherchaient était chez moi. Ils n’ont pas compris. Jusqu’au moment où je leur ai montré la photo. Alors là, ils ont démarré tout de suite", a-t-il expliqué.

Il avait un comportement suspect: il voulait déménager et changer de coiffure

Toujours selon Bild, Jaber Albakr avait posté une annonce sur un forum de réfugiés, indiquant qu'il cherchait désespérément un logement et qu'il se trouvait à la gare de Leipzig, où Mohamed A. a été le chercher samedi. Dimanche, le fugitif émet le souhait de changer de coupe de cheveux. Mohamed A. lui rase donc la tête, ce dernier ayant autrefois travaillé comme coiffeur, raconte Bild. Plus tard dans la journée, Mohamed A. voit l'avis de recherche sur Facebook et commence à douter de l'identité du jeune homme. Une fois certain d'être en présence du fugitif, lui et ses compagnons le ligotent à l'aide de rallonges, comme le montre une photo diffusée par Bild et RTL, avant que l'un d'eux ne se rende au commissariat, armé de cette photo, pour le dénoncer. "C'est précisément le genre de comportement citoyen que promeuvent le (parti de droite populiste, NDLR) AfD et Pegida", a ironisé Florian Flade sur Twitter. "Terroriste arrêté : Pegida et les autres: 0, réfugiés: 1", a lancé un autre utilisateur de ce réseau social. 

Il visait des trains et un aéroport

L'arrestation de ce Syrien de 22 ans, soupçonné d'avoir préparé un attentat dans des trains en Allemagne et dans l'un des aéroports de Berlin, apparemment pour le compte du groupe État islamique (EI) selon la police, a relancé le débat sur le contrôle des réfugiés, dont quelque 890.000 sont arrivés en Allemagne l'an dernier. Ce d'autant plus que le pays a connu en juillet deux attentats commis par des réfugiés et revendiqués par l'EI. Mais l'aide décisive apportée par ces trois Syriens à la police représentait pour beaucoup la preuve que les amalgames n'ont pas lieu d'être. "C'est un signal très positif qui montre que tous (les réfugiés) ne doivent pas être soupçonnés", s'est ainsi réjoui un dirigeant du syndicat de policiers BDK, Sebastian Fiedler.

"Tous les Syriens ne sont pas comme lui"

Qualifié de "courageux" et "responsable" par le chef du gouvernement de Saxe Stanislaw Tillich, la région où s'est déroulée la chasse à l'homme ce weekend, le Syrien qui a prévenu la police a même été félicité lundi par la chancelière Angela Merkel. Par la voix d'une porte-parole, celle-ci a exprimé sa "gratitude à l'égard du Syrien qui a informé la police sur la présence du suspect et apporté ainsi une contribution décisive à son arrestation". "C'est un héros", a déclaré à l'AFP l'un de ses voisins, Jihad Darwish, un Syrien de 47 ans. "J'aurais fait la même chose", a-t-il assuré, avant de conclure : "tous les Syriens ne sont pas comme" Jaber Albakr.

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