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L'Opéra de Paris donne le rare "Don Carlos" avec la star Jonas Kaufmann

C'est l'événement lyrique de la rentrée: "Don Carlos" (avec un "s"), version française de l'opéra de Verdi "Don Carlo", qui n'a pas été donné à Paris depuis 30 ans, dans la mise en scène du Polonais Krzysztof Warlikowski, avec une distribution de rêve.

Qu'on en juge: outre Jonas Kaufmann, le ténor le plus demandé du moment, Sonia Yoncheva, Elina Garanca et Ludovic Tézier sur le même plateau.

Les 11 représentations du 10 octobre au 11 novembre (avec une deuxième distribution à partir du 31 octobre) affichent presque complet, mais le grand public pourra voir l'opéra en direct sur Arte Concert à 18H00 et en léger différé en prime time sur Arte le 19 octobre, ainsi que dans plus de 200 cinémas dans le monde entier dans le cadre de la saison Viva l'Opéra.

Un conseil: s'armer de patience et prévoir des collations. L'oeuvre dure en effet 5 heures, sans compter les entractes.

C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles elle est si rarement jouée. "Vienne l'a donnée il y a dix ans, Hambourg aussi. De temps en temps on joue cette version, mais beaucoup plus souvent la version italienne, en 4 ou 5 actes", constate le chef de l'Opéra de Paris Philippe Jordan.

Verdi compose son "Don Carlos" pour l'Opéra de Paris, en 1867 sur un livret français, avant de le retravailler pour les versions italiennes, plus populaires.

Dès la création à Paris, l'oeuvre jugée trop longue est amputée de plusieurs passages pour permettre au public de rentrer chez lui à des horaires décents.

Les passages coupés ont été réintégrés à la partition pour la version donnée il y a dix ans à Vienne, qui comprenait même le ballet initialement prévu.

"Nous n'avons fait aucune coupe, si ce n'est le ballet", explique Philippe Jordan. "Le ballet accompagnait systématiquement le grand opéra à la française. Parfois, la musique est tellement géniale que même si on n'a pas d'idée de mise en scène il faut la garder, comme pour le ballet d'+Aida+. Ce n'est pas le cas pour Don Carlos, c'est une musique assez conventionnelle, et qui n'a pas de sens dramaturgique" dit-il sans regret.

- Le français moins émotionnel -

Ce "Don Carlos" en français est pour le chef de l'Opéra "plus intellectuel, plus politique" que la version italienne (qui sera donnée en cinq actes par l'Opéra de Paris en 2019).

"Déjà, il y a la langue, le français en soi est plus sec que l'italien", remarque-t-il, citant l'exemple du pathétique "Ella giammai m'amo" italien (elle ne m'a jamais aimé) face au triste constat français "elle ne m'aime pas": "c'est plus direct, moins émotionnel".

L'Italien est la langue des sentiments, quand le français met à l'honneur "le théâtre, la politique, le débat sur la liberté, la religion, la vie privée".

Verdi, qui a longtemps oeuvré pour l'unification de l'Italie, soulève des questions politiques, notamment à travers le personnage du marquis de Posa, qui ambitionne de renverser l'opinion publique bridée par l’Église. Il sort des intrigues strictement amoureuses de sa trilogie (Rigoletto, Le Trouvère, La Traviata) pour aborder la politique, même si le coeur de ce Don Carlos est l'histoire d'amour avortée entre le prince Carlos et Élisabeth, qui épouse le roi son père, Philippe, pour raison d’État.

Philippe Jordan avoue une petite préférence pour la version italienne mais souligne "prendre un plaisir énorme à faire cette version là, il y a une cohérence, un autre style: c'est un grand opéra français, écrit par un grand compositeur italien."

Pour les chanteurs, rompus à l'italien plus suave, ré-apprendre la partition en français relève toutefois du défi. D'autant que la distribution a été frappée pendant les répétitions d'une épidémie de rhume...

La première mardi est à haut risque, avec un préavis de grève national déposé par la CGT Spectacle. A l'Opéra de Paris, on croise les doigts.

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