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La nationale 236, route de l'enfer pendant l'incendie au Portugal: des survivants témoignent

Piégé dans sa voiture par l'incendie meurtrier qui a tué au moins 62 personnes au Portugal, Luis Prior a eu la vie sauve en "fonçant au travers des flammes". Moins chanceux, des dizaines d'automobilistes ont trouvé la mort sur la nationale 236, devenue la route de l'enfer.

Dimanche après-midi, au moins une douzaine de véhicules carbonisés jonchaient encore la route qui relie Figueiro dos Vinhos à Castanheira de Pera, derrière un barrage monté par les autorités à hauteur du hameau de Pobrais. Luis Prior, un employé de banque de 55 ans, est retourné sur les lieux du drame dans lequel il a failli périr, lui aussi. Après avoir rendu visite à son beau-frère à Vila Facaia, les deux hommes avaient pris la fuite devant l'avancée soudaine des flammes attisées par des vents violents.


"Les flammes étaient partout"

"Toute cette zone a été engloutie par le feu en l'espace d'une dizaine de minutes", raconte-t-il. "Nous avons tenté de passer d'un côté, puis de l'autre, mais les flammes étaient partout". "J'ai finalement abandonné ma voiture, je suis monté dans celle de mon beau-frère et nous avons décidé de tenter notre chance: nous avons foncé au travers des flammes". Ils ont parcouru "un ou deux kilomètres au milieu des flammes" et sont parvenus à l'autre bout du brasier sains et saufs. A aucun moment, ils n'ont croisé de pompiers, regrette M. Prior.

Au bord de la route, Luisilda Malheiro et son époux Eduardo Abreu, un couple d'agriculteurs âgés tous deux de 62 ans, ont eux aussi échappé à l'enfer de la N-236. Mais, les traits tirés, ils sont encore sous le choc: ils ont perdu plusieurs de leurs voisins alors qu'ils tentaient de fuir le village de Pobrais. Pour cette sexagénaire, la violence des flammes et la vitesse à laquelle elles se sont propagées sont "une chose incompréhensible". "Nous avons pris la fuite à temps, moi sur le tracteur et lui avec notre fourgonnette", témoigne-t-elle. "Notre maison est encore là, mais nous avons perdu tout le reste: les poules, les lapins et les canards. Nous avons seulement pu sauver deux chèvres", ajoute-t-elle, les larmes aux yeux, en se remémorant les cris des animaux.


La population sonnée

A quelques kilomètres de là, un gendarme empêche les journalistes de s'approcher d'une voiture calcinée à l'entrée du village de Nodeirinho, entouré d'une forêt d'eucalyptus et de pins dévorés par les flammes. Du sol noirci s'échappent encore quelques petites colonnes de fumée grise. Auprès de la voiture gisent encore trois corps, dont celui d'un enfant, selon des témoignages recueillis sur place.

A Pedrogao Grande, bourgade où les services de secours ont monté leur centre d'opérations, la population est sonnée par l'ampleur du drame. Assise dans un café à côté d'une femme qui s'effondre en pleurs, Isabel Ferreira, 62 ans, raconte à l'AFP les événements tragiques de Nodeirinho. "Je connaissais plusieurs des victimes. Une de mes collègues a perdu sa mère et sa fille de quatre ans, car elle n'a pas réussi à les sortir de l'arrière de la voiture", explique-t-elle. "On avait déjà eu des incendies dans la région, mais jamais de morts", se lamente-t-elle. "Nous n'avons pas souvenir d'une chose pareille."

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