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Quand les colosses à la force herculéenne se défient au Pays basque

Lever de charrette, de bottes de paille ou de sac de blé, découpe de troncs de 30 cm de diamètre, tir à la corde: en pantalon bleu de chauffe et chemise blanche, 120 colosses s'affrontent sur le fronton de Saint-Palais (Pyrénées-Atlantiques) pour le 67e festival de "force basque".

Un nom qui résume à lui seul la nature incroyablement physique des épreuves de cette discipline, composée de différents jeux issus des travaux agricoles.

"On ne connaît pas leur origine exacte bien qu'elle soit très ancienne", indique à l'AFP Jean-Louis Fourcade, président de l'association "Les Mixains" organisatrice de ce festival, considéré comme l'un des plus prestigieux de ce côté-ci des Pyrénées et qui attire toujours les foules depuis sa création en 1951.

"Autrefois rien n'était mécanisé. Les agriculteurs faisaient d'énormes efforts. Par exemple, ils montaient des ballots de paille au grenier situé au deuxième étage des maisons basques. A la fin des travaux, ils se lançaient des défis. La tradition est restée", poursuit-il.

"J'ai commencé la force basque pour battre un copain du village", explique Mathieu Aphecetche, 28 ans, un gaillard de Saint-Martin d'Arberoue, un des huit villages en lice en ce dimanche.

Sa motivation pour se casser ainsi le dos et les muscles, "c'est l'orgueil", résume-t-il: "l'orgueil entre villages voisins, parce qu'on se voit après, dans les repas, etc."

"Ici c'est devenu La Mecque, le berceau de la force basque. Pour eux c'est une référence de gagner ici", renchérit M. Fourcade.

Vainqueur du concours de lever de charrette, Mathieu a levé cet engin de 356 kg sur sept tours, soit une longueur totale de plus de 180 mètres!

"Force basque" oblige, Mathieu Aphecetche mesure 1,93 m et pèse 105 kg. Un poids pourtant en-deçà des autres concurrents, dont la moyenne évolue entre 120 à 130 kg... "Il ne suffit pas d'être gaillard, il faut avoir le mental!", sourit Mathieu, encore porté par les applaudissements du public massé dans les gradins.

- "La hargne avant tout" -

Dominique Inchauspé, 64 ans, ancien tireur de corde, approuve ces propos de la tête. "Il faut la hargne avant tout. Bien sûr, au tir à la corde, le poids compte plus que dans d'autres disciplines. On met les plus lourds en bout de cordée. Cette année un des tireurs pèse 200 kg", relève le vétéran.

Le tir à la corde (soka tira), le plus populaire des jeux de force basque et épreuve reine du festival de Saint-Palais, oppose deux équipes de dix hommes. Pour gagner, il faut, par traction, amener l'équipe adverse dans son camp sur une distance de 3 m au moins.

Le poids d'une cordée de 10 hommes dépasse allègrement la tonne...

Où la force basque recrute-t-elle ses athlètes? "Il y a pas mal d'agriculteurs. Vous avez des maçons, des charpentiers, pas de comptables, parce que bon, voilà, faut pas esquinter les mains", s'amuse Dominique Inchauspé. Qui se reprend aussitôt: "Vous avez des mécanos, moi j'étais mécano quand je tirais! Mais c'est surtout le monde agricole", reconnaît-il.

La force basque est pratiquée tant du côté français qu'espagnol et cette année, c'est à Sare, au Pays basque français, que se tiendra le championnat des sept provinces basques (trois en France, quatre en Espagne), le 7 septembre.

Essaimés de par le monde par l'importante diaspora basque, ces jeux de force sont également très populaires en Amérique du Nord, aux Etats-Unis par exemple.

"Et même à Saint-Pierre-et-Miquelon, où vit une colonie basque remontant à l'époque de la chasse à la baleine au XVIe siècle", assure Joxe Mari Esnaola, originaire de Segura (Guipuzcoa, Espagne), fournisseur officiel du bois de hêtre découpé à Saint-Palais.

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