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A Oman, l'harmonie règne dans la maison de l'islam

Comme tous les soirs à la mosquée Sayyida Mazoon de Mascate, les fidèles musulmans de différentes communautés gravissent les marches en marbre poli pour prier ensemble au coucher du soleil.

Le sultanat d'Oman --où cohabitent sunnites, chiites et où les ibadites, issus d'une autre branche de l'islam, sont majoritaires-- apparaît comme une oasis de coexistence religieuse, contrairement à la situation dans d'autres pays du Moyen-Orient.

Le respect des autres confessions est inscrit dans la Constitution dont s'est doté le pays en 1996.

Le texte, voulu par le sultan Qabous, au pouvoir depuis 47 ans -un record dans le monde arabe-, comporte plusieurs points dénoncés par des ONG internationales: les partis politiques y ainsi sont interdits.

La loi est par ailleurs parfois utilisée, selon Human Rights Watch (HRW), pour étouffer la liberté d'expression, comme en témoigne la récente fermeture du journal indépendant Azaman.

Mais, selon ses promoteurs, elle est aussi à l'origine de l'harmonie religieuse qui prévaut à Oman, loin des déchirures entre les différents courants de l'islam.

- 'Tous musulmans' -

En cette soirée de novembre, l'atmosphère paisible de Sayyida Mazoon, mosquée ibadite portant le nom de la mère du sultan, contraste avec l'effervescence de la capitale Mascate.

Des garçons en robe blanche immaculée s'agitent dans une cour en plein air devant la classe coranique. Des hommes font leurs ablutions dans d'élégantes vasques, tandis que le soleil projette ses derniers rayons à travers les fenêtres. A l'étage, des femmes prennent place en attendant la prière.

Ahmed, un médecin égyptien de 46 ans, dit avoir choisi cette mosquée ibadite bien qu'étant lui-même sunnite.

"Je me sens très proche de cette mosquée. Les frères omanais ne vous font jamais sentir que vous êtes un étranger", explique-t-il à l'AFP. "Ici, nous sommes tous musulmans. Nous adorons un seul Dieu".

Yahya Rachidi, calotte traditionnelle omanaise brodée sur la tête, se montre attentif aux propos de son ami égyptien.

Membre de la majorité ibadite et en deuxième année d'études de droit islamique, il affirme que la tolérance religieuse est enseignée partout dans le pays.

"Au collège, nous avions des gens de toutes les nationalités et de toutes les confessions. Et nous avons des professeurs de différentes confessions", argue-t-il.

"On entend parler d'érudits qui (ailleurs, ndlr) interdisent d'apprendre à connaître les idées des autres", poursuit-il. Mais ici, "les érudits enseignent cette idée de tolérance et de liberté de pensée".

- 'Non-ingérence' -

Ahmad Majidyar, chercheur au Middle East Institute basé à Washington et spécialiste de l'islam, souligne également que le sultanat d'Oman (4,5 millions d'habitants, dont 46% d'étrangers) agit sévèrement contre toute menace à la cohésion religieuse.

"D'un point de vue juridique, la loi fondamentale du pays interdit toute forme de discrimination fondée sur la religion", déclare M. Majidyar.

Il note que les autorités prononcent des peines d'emprisonnement de plusieurs années contre ceux qui incitent au confessionnalisme et qu'elles refusent parfois des visas à des prédicateurs étrangers jugés extrémistes.

Selon lui, cette situation contraste avec celle de nombreux pays du Moyen-Orient où des prédicateurs musulmans peuvent ouvertement inciter aux divisions confessionnelles.

"Oman a réussi à intégrer ses minorités religieuses dans les structures sociales, politiques et économiques et ne leur donne aucune raison de recourir à l'extrémisme violent chez eux ou de chercher des mécènes étrangers", conclut-il.

Par conséquent, l'Iran chiite et l'Arabie saoudite sunnite, engagés dans une lutte d'influence régionale, ont peu de prise sur les communautés à Oman.

Avant les prières du coucher du soleil, le jeune imam de Sayyida Mazoon traverse la cour de la mosquée avec son petit garçon qui court derrière lui.

Une porte discrète ouvre sur le bureau de Fahad al-Amri, aux murs tapissés du sol en plafond d'exemplaires du Coran et d'interprétations du texte sacré.

"Honnêtement, lorsque nous regardons les problèmes qui agitent le monde et la région, nous craignons qu'ils touchent Oman", déclare M. Amri à l'AFP.

Il se félicite de la politique de non-ingérence du sultan Qabous à l'extérieur et de sa méthode pour résoudre "au sein de la famille" omanaise les problèmes intérieurs.

Portant une robe blanche et un turban assorti, l'imam réfléchit à son rôle dans le maintien de cette concorde.

"En tant que chef religieux, je dois enseigner le respect à la nouvelle génération".

"Toute personne a le droit d'avoir sa propre opinion. Même si vous n'êtes pas d'accord avec elle, vous devez la respecter. Si vous ne la respectez pas, c'est la petite étincelle qui conduira à la catastrophe".

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