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Air France: procès de la "chemise arrachée", tribune de la CGT contre le gouvernement

Le procès d'adhérents de la CGT pour l'épisode de la "chemise arrachée" du DRH d'Air France a été renvoyé en septembre, mais a fourni l'occasion au syndicat d'accuser gouvernement et patronat d'entretenir un "climat de haine", en plein conflit sur la loi travail.

Vendredi matin, quinze salariés de la compagnie aérienne étaient convoqués devant le tribunal correctionnel de Bobigny (Seine-Saint-Denis) lors d'un procès emblématique de l'impasse du dialogue social en France. Mais il a été ajourné peu après son ouverture, la défense demandant son renvoi et la cour estimant préférable de juger cette affaire sur deux journées, les 27 et 28 septembre.

Cinq salariés doivent répondre de "violences en réunion", des faits passibles de trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende, et dix de "dégradations" lors de la manifestation du 5 octobre contre un plan de restructuration d'Air France menaçant 2.900 emplois.

Malgré le renvoi, jusqu'à 500 personnes se sont rassemblées prés du tribunal en soutien aux prévenus tandis que plusieurs milliers de manifestants CGT s'étaient également mobilisés dans la matinée à l'aéroport de Marseille-Marignane.

"Aujourd'hui on a gagné une première manche", s'est félicité le numéro un de la CGT d'Air France, Miguel Fortea.

Philippe Martinez, le leader de la CGT qui a engagé une épreuve de force avec le gouvernement sur le projet de loi El Khomri, a dénoncé à Bobigny un "climat de haine" après l'agression dont a été victime selon lui un manifestant jeudi à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône).

- 'Colère légitime' -

Il a également justifié les réactions de colère des salariés d'Air France en affirmant n'avoir jamais vu "un salarié à qui ont tendait une lettre de licenciement (...) dire merci à son patron". "Un licenciement, ça génère de la colère et elle est légitime, cette colère", a-t-il lancé, déclenchant des applaudissements nourris parmi les militants, dont l'un arborait une chemise blanche avec l'inscription "syndicaliste, pas voyou".

Le 5 octobre, après avoir forcé la grille d'accès au siège d'Air France à l'aéroport parisien de Roissy, une cohorte de mécontents avaient envahi la salle où se tenait le comité central d'entreprise. Au cours d'une bousculade, deux dirigeants et les vigiles assurant leur protection avaient été malmenés.

Sous les cris de "à poil" et "démission", le directeur des ressources humaines Xavier Broseta s'était retrouvé torse nu et le responsable de l'activité long courrier, Pierre Plissonnier, avec sa chemise en lambeaux. Ils étaient parvenus à s'échapper en escaladant un grillage.

Les images de la chemise arrachée avaient suscité un concert d'indignations et fait le tour du monde, confortant la mauvaise réputation de la France en matière de dialogue social. Mais les propos du Premier ministre Manuel Valls traitant de "voyous" les fauteurs de troubles avaient également choqué. Au-delà, l'affaire avait suscité un débat passionné sur la légitimité du recours à la violence physique face à la "violence économique".

Vendredi près du tribunal de Bobigny, la dénonciation de la "criminalisation" de l'action syndicale a constitué le leitmotiv des interventions qui se sont succédé à la tribune.

"On voit bien avec le recul que la campagne politique et médiatique qui s'est déchainée à l'époque contre les militants syndicaux d'Air France s'inscrivait dans une opération permanente qui consiste à assimiler le syndicalisme à la violence", a ainsi dénoncé le secrétaire national du PCF Pierre Laurent à l'unisson avec Olivier Besancenot, du Nouveau Parti anticapitaliste.

Les représentants du personnel ont "de plus en plus de difficultés avec leurs employeurs", confie Abdelkrim Abdesselam, responsable CGT venu de Roubaix, un t-shirt "On lâche rien" du chanteur nordiste HK sur les épaules.

Montrant en exemple le documentaire "Comme des Lions", sur la lutte des PSA d'Aulnay, diffusé sur écran géant à l'initiative de l'intersyndicale, une Parisienne de SUD Santé Sociaux affirme que "la vraie violence, elle est là", dans les plans sociaux qui débouchent sur "des dépressions, des suicides, des vies brisées".

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