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Ancrage socialiste ou retour de la droite: le Chili élit son président

Le Chili a voté dimanche au second tour de la présidentielle pour choisir un successeur à Michelle Bachelet, un scrutin qui s'annonce très serré entre le journaliste socialiste Alejandro Guillier et l'ex-chef d'Etat de droite Sebastian Piñera, avec l'extrême gauche en position d'arbitre.

Quelque 13,4 millions de personnes étaient appelées à se rendre aux bureaux de vote, qui ont ouvert à 08H00 (11H00 GMT) et ont fermé à 18H00 (21H00 GMT), pour des premiers résultats attendus autour de 23H00 GMT.

M. Piñera, 68 ans, est donné favori. L'Ex-chef d'Etat (2010-2014) de droite et milliardaire est arrivé en tête au premier tour, mais avec un score bien moindre que prévu (36,6%), devant Alejandro Guillier (22%), 64 ans.

"Je crois que nous allons gagner avec une différence étroite mais claire, pas millimétrique, nous sommes très optimistes", a déclaré M. Guillier en votant à Antofagasta, à 1.400 km au nord de Santiago.

M. Piñera s'est lui aussi déclaré confiant de l'emporter, et a dit attendre le résultat avec "humilité et espoir".

Le vainqueur gouvernera le Chili de 2018 à 2022.

Contre toute attente, la candidate d'extrême gauche, Beatriz Sanchez, 46 ans, également journaliste, a quant à elle réussi une prouesse en décrochant 20% des suffrages au premier tour, devenant la troisième force politique du pays.

Les électeurs de Mme Sanchez - qui n'a pas donné de consigne de vote mais a confié qu'elle voterait pour M. Guillier - pourraient ainsi faire pencher la balance.

Le 19 novembre, les six candidats de gauche avaient totalisé 55% des voix.

Le Chili, une des principales économies d'Amérique latine, a été dirigé ces quatre dernières années par la socialiste Michelle Bachelet, qui a bouleversé cette société réputée très conservatrice par une série de réformes progressistes, dont l'adoption du mariage homosexuel et la dépénalisation de l'avortement, auparavant interdit.

La loi ne lui permet pas de se représenter, et le vent souffle désormais vers la droite dans la région: l'Argentine avec Mauricio Macri, le Brésil avec Michel Temer, le Pérou avec Pedro Pablo Kuczynski, tous ont désormais des présidents conservateurs, marquant la fin d'un cycle pour la gauche latinoaméricaine.

"Aujourd'hui, personne ne peut rationnellement dire qui va gagner (...) L'électeur ne sait pas si son vote va pouvoir faire pencher la balance en faveur de son candidat", a déclaré à l'AFP Bernardo Navarrete, analyste politique de l'université de Santiago.

La dernière enquête, du 1er décembre, donnait les deux adversaires à égalité, avec encore 21,4% d'indécis.

L'hésitation du conducteur de taxi Jaime Pinto reflétait ce flottement: bien que de gauche, il a dit qu'il voterait "probablement" pour Piñera car "le mieux est l'ennemi du bien", sans exclure toutefois de changer d'avis au dernier moment et de voter pour le socialiste Guillier.

- Parlement fragmenté -

L’élection "va dépendre de la quantité de personnes qui iront voter", souligne Rodrigo Osorio, professeur de sciences politiques à l'université de Santiago. "Plus la participation sera importante, plus Guillier aura des chances de gagner", après un premier tour où seuls 46,7% des électeurs s'étaient déplacés.

"Tous devraient aller voter, ce sont des choses importantes qui se jouent là. Le nouveau président va prendre des décisions importantes pour nous, les vieux, c'est pour ça que c'est important de savoir ce que nous voulons pour l'avenir de notre pays", explique à l'AFP Jorge Aguirre, un retraité de 66 ans.

Sebastian Piñera a lui reçu le soutien du candidat de l'extrême droite José Antonio Kast, qui a remporté 7,9% des voix en revendiquant l'héritage du dictateur Augusto Pinochet (1973-1990).

Quel que soit le vainqueur de dimanche, il n'aura pas de majorité au Parlement. Les législatives, organisées lors du premier tour et pour la première fois avec un scrutin à la proportionnelle, ont laissé un paysage fragmenté dans les deux chambres.

Le futur locataire du palais présidentiel de La Moneda, à compter du 11 mars 2018, aura "besoin de nouer des alliances" avec les autres groupes parlementaires, ajoute M. Osorio, qui estime que ce sera plus facile pour le socialiste que pour le conservateur.

Le successeur de Mme Bachelet à la tête de la cinquième puissance de la région aura en revanche l'économie avec lui. Après quatre années de croissance ralentie à 1,8% en moyenne, le PIB grimpera de 2,8% en 2018, selon la Cepal, commission économique de l'ONU pour l'Amérique latine.

Marqué par 17 années de dictature sous Pinochet, le Chili représente depuis les années 1990 un pôle de stabilité politique et de dynamisme économique dans la région.

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