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"Fichage" d'élèves musulmans à Béziers: enquête préliminaire contre Robert Ménard

Robert Ménard, maire de Béziers élu avec le soutien du FN, a déclenché une polémique, avec des réactions au plus haut sommet de l'État, et suscité l’ouverture d’une enquête préliminaire en faisant état d’un décompte des élèves musulmans dans sa commune.

Il y a "64,6%" d'élèves de confession musulmane dans les école publiques de Béziers, a lancé M. Ménard lundi soir sur France 2 au cours de l'émission Mots Croisés, qui portait sur la crise au sein du FN, sans d'abord fournir aucune explication sur l'origine de ce chiffre.

"Ce sont les chiffres de ma mairie. Pardon de le dire, le maire a, classe par classe, les noms des enfants. Je sais que je n'ai pas le droit de le faire. Pardon de le dire, les prénoms disent les confessions. Dire l'inverse, c'est nier l'évidence", a répondu M. Ménard en fin d'émission à un internaute qui s'interrogeait sur ce pourcentage.

A la suite de cette déclaration, une enquête préliminaire pour "tenue illégale de fichiers en raison de l'origine ethnique", a été ouverte, a indiqué à l'AFP le procureur de la République de Béziers Yvon Calvet qui a saisi le SPRJ de Montpellier.

"Il n'y a pas de fichage des élèves à Béziers (...) et il n'y en aura jamais", a cependant assuré Robert Ménard lors d'une conférence de presse mardi après-midi, ajoutant qu'il réservait "ses autres réponses au juge d'instruction si on les lui demande".

L'édile sera entendu par le SRPJ à Montpellier mercredi, a précisé une source judiciaire sans préciser l'heure de cette audition.

Dans l'après-midi, quatre policiers ont mené une perquisition à la mairie, qui n'avait, selon le Midi Libre, donné aucun résultat, une information non confirmée par le parquet.

Auparavant, le préfet du Languedoc-Roussillon Pierre de Bousquet et la rectrice de l'académie de Montpellier, Armande Le Pellec, avaient saisi la justice en application de l'article 40 du code de procédure pénale. Il prévoit qu'un fonctionnaire ayant connaissance d'un délit ou d'un crime est tenu d'en informer sans délai le parquet.

- 'Relancer le débat' -

"Si elle devait être avérée, l'existence d'un traitement de données déduisant de l'origine supposée d'un prénom l'appartenance réelle ou supposée à une religion constituerait une illégalité particulièrement grave et manifeste à la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés", ont précisé les deux hauts fonctionnaires dans un communiqué.

En visite officielle à Ryad, le président de la République a vivement critiqué M. Ménard, estimant que le fichage était "contraire à toutes les valeurs de la République". "Il y a des principes dans la République et quand ils sont gravement atteints, les tribunaux en sont saisis et des sanctions seront prononcées par les juges compétents", a relevé François Hollande, lors d'une conférence de presse clôturant sa visite au Qatar et en Arabie Saoudite

"Honte au maire" de Béziers Robert Ménard, avait déclaré dès le matin Manuel Valls dans un tweet, ajoutant que "la République ne fait aucune distinction parmi ses enfants".

Robert Ménard est "en dehors des valeurs de la République" avec le "fichage" des élèves musulmans, a renchéri Bernard Cazeneuve comme la ministre de l’Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem.

"Monsieur Ménard, ce n’est plus Reporters sans frontières, c’est raciste sans limite!", a raillé de son côté le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis, au sujet de l'ex-président de RSF. Christian Jacob, patron des députés de l'UMP a également dénoncé les propos de M. Ménard et s'est félicité que la justice soit saisie.

"Aucun acte raciste ne doit rester impuni (...) Les élus de la République ne sauraient se soustraire à leurs obligations et à l'impératif moral d’assurer l’égalité pour chacun de leurs concitoyens ", a aussi déclaré Gilles Clavreuil, délégué interministériel à la lutte contre le racisme.

La communauté musulmane s'est pour sa part dite "scandalisée, écœurée". "Avec de telles attitudes, il ne faut pas s'étonner que des jeunes se révoltent. Un intégrisme en nourrit un autre", a déploré Abdallah Zekri, président de l'Observatoire national contre l'islamophobie au Conseil français du culte musulman (CFCM).

Pour Robert Ménard, cette polémique a au moins eu le mérite de "relancer le débat sur les statistiques ethniques": "On en a besoin de ces statistiques. En 2009, Manuel Valls il était pour. Maintenant il est contre", a-t-il rappelé, demandant au Premier ministre de faire voter la loi qu'il avait proposé de présenter dans ce sens alors qu'il était député-maire d'Evry.

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