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Départ de Philippot: Le Pen risque de perdre un "formidable paratonnerre", estime un politologue

Le départ de Florian Philippot risque de priver Marine Le Pen d'un "formidable paratonnerre" face aux critiques internes, et ne règle pas le débat de fond sur la stratégie politique du FN selon Joël Gombin, politologue de l'Observatoire des radicalités politiques, auteur du livre "Le Front national" (Eyrolles).

Q: Qu'est-ce que le départ de Florian Philippot dit de la situation actuelle au Front national ?

"C'est l'aboutissement d'une tension nouée depuis longtemps au sein du FN, que beaucoup résument autour de questions idéologiques et programmatiques, (ou) de querelles personnelles, (autour de) la place de Florian Philippot. (Mais) la question fondamentale c'est celle de la ligne stratégique du FN. Au cours des dernières années la direction du FN a souvent laissé entendre qu'elle serait en mesure d'accéder au pouvoir. Or, la dernière élection présidentielle a montré toutes les limites qui existent encore. C'est cette contradiction qui éclate aujourd'hui, entre les promesses et des attentes de la part des militants, des cadres du Front national et aussi d'une certaine manière des électeurs, qui ont été déçus de résultats (pourtant) très bons pour le FN. La question c'est de savoir si le départ de Florian Philippot va permettre de régler ce dilemme stratégique.

Q : La question de la personne de Florian Philippot a pris trop de place dans les débats du FN ?

"C'était prévisible (...) que la personnalité de Florian Philippot serait un point d'achoppement, notamment dans quelle mesure Marine Le Pen continuerait de le soutenir. Le risque pour Marine Le Pen dans cette affaire, c'est que cette séquence fasse écran par rapport au débat stratégique, et aussi qu'elle perde un formidable paratonnerre. Florian Philippot avait le grand intérêt d'attirer les foudres de tous ceux qui étaient mécontents de la ligne, qui était celle de Marine Le Pen. Dès lors qu'il ne sera plus là (...) elle sera en première ligne pour la défendre et l'assumer le cas échéant. Jusqu'à présent, (...) il me semble que les signes qu'elle a donnés laissaient plutôt penser qu'elle allait focaliser le débat soit sur des éléments programmatiques très précis, comme la sortie de l'euro, soit sur des éléments assez superficiels, comme la question du nom du Front national, sans forcément aborder le fond de la question stratégique. On va voir dans les semaines qui viennent si le départ de Florian Philippot ouvre un espace pour ce débat-là. Il me semble que ce n'est pas nécessairement le cas parce qu'en vidant Florian Philippot et les philippotistes, avant même le Congrès, ça tend plutôt à interdire le débat qu'à l'ouvrir.

Q : Est-ce que Florian Philippot peut trouver un espace politique hors du FN ?

"Ce que je peux dire c'est que l'histoire des anciens numéro 2 du Front national est assez cruelle. Il n'y en a pas un qui ait réussi son pari de construire quelque chose en dehors du Front national. Même Mégret, (ancien numéro 2 du FN, entré dans un conflit ouvert en 1999 avec le président Jean-Marie Le Pen, conduisant à une scission du FN), qui était objectivement mieux placé je pense lorsqu'il est parti du Front national, n'y est pas parvenu. La voie qui logiquement devrait s'ouvrir à Florian Philippot serait soit d'arrêter son activité politique, soit d'essayer de construire une force vraiment autour de la question de la souveraineté. Mais là encore, l'Histoire montre que jusqu'à présent en France tous ceux qui ont essayé de construire une force politique uniquement autour de la question de la souveraineté sont restés relativement marginaux. Il me semble que les options sont assez limitées au fond pour Florian Philippot".

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