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Des villageois français accueillent des familles chrétiennes d'Irak persécutées par l'Etat islamique

Dans son village de Haute-Garonne, un mécanicien agricole qui est également diacre attend depuis cinq mois les familles d'Irakiens qu'il a proposé d'accueillir dès qu'il a entendu parler des persécutions des chrétiens d'Orient. "Tout est prêt ici, dit-il, il ne leur manque que les visas là-bas".

Neuf mois après l'entrée des jihadistes de l'État islamique (EI) dans la plus grande ville chrétienne d'Irak, Qaraqosh, des Français du sud-ouest continuent de se proposer comme "familles d'accueil", en s'engageant à héberger sur une longue période des chrétiens d'Orient persécutés.

Déjà, depuis août, une cinquantaine de réfugiés irakiens ont pu s'installer en Haute-Garonne et dans les Hautes-Pyrénées, telle Farah, 27 ans, rencontrée dimanche par l'AFP à Lourdes, lors du premier pèlerinage des chrétiens d'Orient accueillis en Midi-Pyrénées.

"A l'arrivée des jihadistes, on avait fui aussi vite que possible vers Erbil (la capitale du Kurdistan irakien, ndlr)", se souvient la jeune femme. "On a dit: on quitte tout pour Jésus. Comme souvenir, je n'ai emporté que des photos de mon beau mariage et de ma maison".

A présent, Farah dit qu'elle ne veut plus rentrer dans son pays où il ne resterait que quelque 400.000 chrétiens contre environ 1,4 million en 1987.

Avec son bébé, Émilie, née en janvier à Toulouse, trois générations de sa famille vivent à présent très bien dans une maison prêtée par un Français de 69 ans, Joseph Merlet, à Baziège (3.000 habitants, à 25 km de Toulouse).

Ancien cadre du groupe Airbus, Joseph avait réagi quand il avait entendu sur France Info un reportage sur les milliers d'Irakiens chassés de chez eux qui affluaient par milliers à Erbil. Début septembre, "j'avais envoyé un mail au consulat de France à Erbil, qui m'avait téléphoné quelques jours après", dit-il.

Moins de deux mois plus tard, Farah et les siens arrivaient à Baziège.

Et depuis, Joseph et sa femme Françoise leur donnent des cours de français en se débrouillant "avec une méthode Assimil pour arabophones".

De belles histoires de solidarité, Philippe Rodier, cadre à l'aéroport de Toulouse, en aurait bien d'autres à raconter, lui qui a fondé en septembre à Toulouse l'association Echo (Entraide aux chrétiens d'Orient).

Echo s'est notamment employée à faire venir les proches d'un traducteur irakien, Mohanad Qazazi, arrivé à Toulouse il y a quelques années, après l'assassinat de son frère aîné.


"Pris aux tripes"

Mais la procédure d'accueil s'est apparemment compliquée au fil des mois, constate M. Rodier. "A l'issue d'une instruction, les Affaires étrangères donnent ou ne donnent pas le visa et les familles d'accueil restent sans explications", déplore-t-il, évoquant ainsi "les visas refusés à des Irakiens âgés et vulnérables et à leur fille".

Depuis la fin juillet, la France a officiellement accordé 1.500 visas d'asile à des chrétiens d'Orient.

Le 19 août, une quarantaine de réfugiés irakiens étaient ainsi ramenés à Paris par un vol spécial, puis de nouveau 150 le 20 septembre. A chaque fois, le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius était à l'aéroport pour les accueillir.

"Nous accueillons ces personnes, mais on ne peut pas dire à tous de partir de leur pays, sinon ce serait une défaite et une victoire de Daech (organisation État islamique). De plus, nous n'aurions pas les moyens de bien les accueillir", avait expliqué M. Fabius en mars à New York.

Dans son village de Carbonne (6.000 habitants à 37 km de Toulouse), le mécanicien agricole Emmanuel Gimbert, lui, s'impatiente. "Ca nous prend tellement aux tripes de savoir que ces chrétiens vivent des choses si dures", a-t-il dit à l'AFP, en marge du pèlerinage de Lourdes.

Il y a déjà cinq mois qu'il s'est engagé à acccueillir deux familles dans la maison attenante à la mienne.

"On a fait appel à la solidarité communale pour la meubler et l'équiper. Une femme de 80 ans qui parle arabe s'est proposée d'alphabétiser les réfugiés. On a déjà donné un concert caritatif en vue de leur arrivée et on est prêts à payer leurs billets d'avion si nécessaire!"

"Tout est prêt... sauf les Irakiens qui n'arrivent pas", conclut ce diacre, souhaitant "plus de concertation entre État et familles d'accueil".

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