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Un journaliste français expulsé d'Egypte, "vifs regrets" de Paris

Rémy Pigaglio, correspondant de la radio RTL et du journal La Croix au Caire, a été expulsé mardi soir par les autorités égyptiennes sans explication, une décision qui suscite l'inquiétude des journalistes sur place et est "vivement regrettée" par la France.

Le journaliste, qui travaillait depuis près de deux ans pour La Croix au Caire, a été retenu à l'aéroport lundi après des vacances en France alors que tous ses papiers étaient en règle, a expliqué mercredi à l'AFP Guillaume Goubert, le directeur du quotidien.

A son arrivée, son passeport et son téléphone portable ont été confisqués par la police aéroportuaire et il n'a pu parler à l'ambassade de France que le lundi soir. Il a également dû passer une nuit en cellule avant de devoir reprendre l'avion pour Paris où il était attendu mercredi, a précisé Guillaume Goubert.

Selon lui, "il semblerait que les renseignements égyptiens (moukhabarat) sont à l'origine de la décision d'expulsion". La rédaction de La Croix a fait part de sa "totale incompréhension après cette décision arbitraire".

"La France regrette vivement cette décision des autorités égyptiennes. Partout dans le monde, elle défend la liberté d’expression et la liberté de la presse", a réagi le Quai d'Orsay.

Le chef de la diplomatie française Jean-Marc Ayrault a évoqué la situation du journaliste mardi avec son homologue égyptien Sameh Choukri, selon le ministère qui a précisé que l'ambassadeur au Caire avait effectué plusieurs démarches auprès des autorités "afin qu’elles reconsidèrent leur décision".

"Rien ne m'a été confisqué et je n'ai pas été maltraité. Aucun interrogatoire n'a été mené. Et je n'ai jamais su, et ne sais toujours pas, pourquoi cette décision d'interdiction d'entrer sur le territoire a été prise", a déclaré Rémy Pigaglio à "La Croix" avant de monter dans l'avion.

"Au vu des circonstances, tout pousse à croire que cette décision a été prise pour intimider tous les correspondants étrangers basés au Caire. C'est un signal très inquiétant pour les médias étrangers", a estimé Alexandra El Khazen, responsable pour le Moyen-Orient de Reporters sans Frontières (RSF).

Selon un journaliste étranger cité par RSF, c'est la première fois qu'un correspondant dont les papiers sont en règle se voit refuser l'entrée dans le pays.

Dans un communiqué publié sur Facebook, les correspondants français en Egypte se sont également inquiétés de cette décision : "l'ensemble des correspondants français en Egypte déplore la répression grandissante des autorités sur les médias égyptiens et étrangers : surveillance, intimidation, arrestation, refoulement, expulsion, détention".

Début mai, le syndicat des journalistes en Egypte avait dénoncé un "recul" de la liberté de la presse dans le pays, accusant le pouvoir d'être en "guerre contre le journalisme", après l'arrestation le 1er mai de deux reporters au siège de l'organisation.

Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi est régulièrement accusé par les défenseurs des droits de l'homme d'avoir instauré un régime ultra-autoritaire qui réprime violemment toute opposition depuis qu'il a destitué en 2013 son prédécesseur islamiste Mohamed Morsi.

La question des droits de l'homme avait été abordée par François Hollande lors d'une visite en Egypte mi-avril, où le président français avait invoqué la nécessaire "liberté de la presse et la liberté d'expression" et discuté avec son homologue des cas "du Français Eric Lang et de l'Italien Giulio Regeni".

Eric Lang est un Français arrêté en 2013 au Caire par la police et battu à mort dans sa cellule, "par des co-détenus" selon le parquet général du Caire.

Giulio Regeni est un étudiant italien enlevé dans la capitale égyptienne le 25 janvier et retrouvé mort neuf jours plus tard dans un fossé, le corps portant les stigmates d'épouvantables tortures. La presse italienne et des diplomates assurent qu'il a été tué par des membres de services de sécurité, ce que l'Egypte nie avec véhémence.

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