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Catalogne: l'ex-président Mas défend la légitimité de ses actes

Ils ont crié "vive la République de Catalogne", et "à bas la justice espagnole" : des milliers de Catalans ont soutenu lundi l'indépendantiste Artur Mas, jugé pour avoir défié Madrid en organisant une consultation sur l'indépendance interdite par la justice.

Au petit matin, ils avaient afflué sur l'avenue bordée d'immenses palmiers longeant le Palais de justice de Barcelone, bravant le froid et de violentes rafales de vent, et agitant le drapeau bleu, rouge et or des indépendantistes.

Les manifestants - 40.000 selon la police locale - ont accompagné Artur Mas, 61 ans, président régional de 2010 à 2016 poursuivi pour désobéissance, jusqu'aux marches du tribunal.

Dans une petite salle d'audience aux teintures rouges à l'abri du tumulte, Artur Mas a ensuite déroulé devant ses juges une longue liste d'arguments en vertu desquels la consultation du 9 novembre 2014 était légitime, voire légale.

Le vote, auquel 2,3 millions des 6,3 millions d'électeurs potentiels ont participé, se prononçant à 80% pour la sécession, n'était pas "un caprice... mais la conséquence de mandats bien précis donnés par le Parlement catalan", issu d'élections démocratiques, a-t-il dit.

Après s'être vu interdire par la Cour constitutionnelle le 29 septembre 2014 d'organiser un référendum, M. Mas avait décidé de planifier cette consultation alternative.

"Nous avons changé le format, sans renoncer à l'objectif (...) : connaître l'opinion du peuple de Catalogne", a-t-il expliqué, en assurant que le processus avait ensuite été mené par des bénévoles pour ne pas enfreindre la loi.

Il ne s'est pas vraiment justifié sur les réquisitions de collèges ou lycées pour le vote, ou la mise à disposition de 7.000 ordinateurs, que l'accusation présente comme des preuves de la participation de l'exécutif à l'organisation du scrutin.

- Moqueries -

Mais il a souligné les contradictions du gouvernement conservateur de Mariano Rajoy, qui a attendu le 4 novembre pour demander à la cour d'interdire cette consultation annoncée mi-octobre.

M. Mas risque dix ans d'interdiction d'exercer une fonction publique et élective. Joana Ortega, ex-vice-présidente, et Irene Rigau, qui était en charge de l'Education, risquent chacune neuf ans d'interdiction.

"C'est la démocratie qui est en procès ici, pas l'indépendance", a déclaré Artur Mas à l'AFP pendant une suspension d'audience.

"C'est la première fois qu'un gouvernement démocratique est jugé pour avoir laissé le peuple voter", a ajouté l'indépendantiste, bien décidé à se servir du procès comme "accélérateur" de la cause séparatiste en démontrant que l'Etat bafoue les droits des Catalans.

La Cour constitutionnelle avait suspendu la consultation à la demande du gouvernement qui estimait qu'elle portait sur un sujet, l'unité de l'Espagne, devant être débattu par tous les Espagnols.

La défense de la singularité catalane, région ayant une langue et une culture propres, tend depuis des décennies ses relations avec Madrid.

La fièvre indépendantiste est montée après 2010, quand la même Cour constitutionnelle saisie par les conservateurs a amendé le "statut" de la Catalogne, voté par le parlement de Madrid et qui lui conférait de larges compétences et le titre de "nation".

Les indépendantistes, majoritaires au Parlement catalan depuis septembre 2015, assurent qu'en septembre au plus tard ils organiseront un véritable référendum d'autodétermination, avec ou sans l'accord de Madrid. Et promettent de faire sécession s'ils l'emportent.

Mariano Rajoy admet, lui, que la "question catalane" est son plus grand défi en 2017. Il compte cependant sur la reprise des investissements locaux et une "opération dialogue" pour normaliser les rapports avec la région divisée à parts égales entre indépendantistes et partisans du maintien en Espagne.

"Il est déjà trop tard", rétorque Mercé Sancho Tusef, manifestante de 68 ans, en comparant la situation à un divorce. "La réconciliation est impossible car ils ont refusé le dialogue pendant trop longtemps".

L'audience, levée vers 13H00 (12h00 GMT), devait reprendre mardi matin. M. Mas a quitté le tribunal comme il était arrivé, encouragé par les chants de ses partisans.

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