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La peur, dès l'ouverture du procès des frères Bengler, caïds de la drogue à Marseille

Leur réputation les a précédés. Le procès des frères Bengler, considérés comme des caïds de la drogue à Marseille parmi les plus violents, s'est ouvert jeudi sur la défection d'un coaccusé, qui a assuré avoir peur de représailles.

François et Nicolas Bengler, 35 et 31 ans, que les policiers marseillais tiennent pour les chefs de la bande des "Gitans", sont engagés dans une guerre contre leurs rivaux des "Blacks", qui aurait fait, de source policière, 16 morts rien que sur ces 10 derniers mois.

Ils sont jugés pendant 12 jours à Aix-en-Provence pour enlèvement avec violences et séquestration et un assassinat qui remonte aux prémices de cette vendetta sanglante: celui d'un adolescent de 16 ans, tué à la kalachnikov, cité du Clos la Rose, le 19 novembre 2010.

Un garçon de 11 ans avait été lui aussi grièvement blessé, fauché par une rafale lors de ce règlement de compte, qui avait soulevé une profonde émotion et suscité de nombreuses réactions politiques.

Dès les premières minutes de l'audience, avant même le tirage au sort des jurés qui marque les premiers instants solennels de tout procès d'assises, le spectre de la violence, des règlements de compte sanglants et de la loi du silence, planait.

Deux co-accusés des Bengler, suspectés d'être leurs lieutenants, sont présents dans le box, mais un cinquième accusé, Larbi Yorro, sous contrôle judiciaire, n'est pas venu. Seul lui n'est poursuivi que pour l'enlèvement. Il n'a pas osé venir devant la cour d'assises, et "craint pour son intégrité physique", affirme son avocat Philippe Jacquemin.

- Un dossier 'vide' -

L'homme a passé plusieurs mois en réanimation en 2014 après avoir été visé par des tirs, précise son conseil. "Ce procès lui fait peur (...), il a la crainte d'être suivi par des gens mal intentionnés", plaide-t-il devant la cour. Les gendarmes iront en vain toquer chez lui, avant que le procès ne reprenne dans l'après-midi.

Outre cet accusé, plusieurs témoins ont déjà annoncé qu'ils feraient faux bond au procès, certificat médical à la clé, tel cet homme dont le médecin assure par lettre à la cour qu'il est dépressif et "ne pourra pas supporter émotionnellement de revivre les faits".

Le témoignage devant les jurés de Lenny, l'enfant âgé de 11 ans en 2010 quand il avait été blessé, l'un des éléments clés de ce dossier, est encore incertain. Aujourd'hui adolescent, lui qui n'avait aucun lien avec le trafic est "psychologiquement assez fort, mais bouleversé", déclarait avant l'audience son avocat Frédéric Coffano.

L'avocat général, Pierre Cortès, a lui-même reconnu qu'il y avait "une ambiance" particulière autour de ce procès, qui se déroule sous haute surveillance. Des policiers du Raid, casqués et équipés d'armes automatiques, supervisaient l'arrivée des accusés au tribunal, jeudi à l'aube.

Une tension qui semble en tout cas épargner le box: "Tchoa" (François en Provençal) Bengler, chemise blanche, cheveux ras, et son cadet Nicolas, en survêtement de la Mannschaft puis en t-shirt blanc, se sont montrés détendus, voire nonchalants.

Profession? "Je suis en détention depuis 70 mois", articule l'aîné face au tribunal.

A leurs côtés, un coaccusé n'a pas hésité à faire interrompre les débats, à peine une heure après leur ouverture pour "une envie très pressante".

Du côté de la défense, les avocats devraient s'appuyer sur l'absence de traces ADN et d'empreintes des Bengler, et dénoncer le recours à des témoignages anonymes pour "charger" les frères, qui se disent victimes de leur sinistre réputation.

Le dossier est "vide, vide, vide", martelait avant l'audience l'un de leurs conseils, Me Emmanuel Marsigny.

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